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sait rendre le feuillé des arbres, les fleurs d'un clos printanier, le flou des herbes dans une verte clairière, et pourtant M. Chintreuil n'est pas complet, il néglige un peu ses premiers plans; encore un effort, et l'artiste ne pourra plus recevoir, même de la plus sévère critique, que des louanges méritées.

M. Keymeulen a exposé: un Site boisé, aux environs de Pyreford, comté de Surrey, et une Vallée dans les Alpes

bernoises.

L'aspect de ces deux tableaux est charmant. Le dessin en est excellent, et la touche d'une finesse excessive. On sent dans ce travail une grande habileté de main; la couleur est sobre, la lumière bien distribuée. M. Keymeulen a peut-être outré un peu l'aspect vaporeux de ces deux toiles. On sent dans M. Keymeulen un admirateur passionné de la nature et un poète autant qu'un artiste.

Nous trouvons de Karl Daubigny cinq tableaux: Près d'Anvers et Bords de la Seine, un Paysage, Environs d'Anvers, la Rentrée des foins.

Ces cinq toiles ont montré de nouveau les admirables qualités de M. Daubigny, un des maîtres illustres du paysage. Tout dans ces tableaux respire le calme, la fraicheur, la simplicité. Ses ciels ont d'admirables transparences; dans les terrains et dans les arbres on trouve des intensités de verdure qui affirment un talent viril. On ne voit point de défaillances dans les différentes productions de M. Daubigny, mais au contraire, si on examine son œuvre depuis vingt-cinq années, on y remarque une élévation croissante et bien graduée de son talent.

Nous arrivons à l'une des toiles les plus remarquables de l'exposition de Reims; nous voulons parler du tableau de M. Kindermans, intitulé: Pâturage de la Semoy (Ardennes).

Dans les écoles paysagistes, si brillamment représentées dans ce concours, aucune œuvre n'a fait sur nous une plus vive impression.

Ce tableau représente une rivière calme et limpide, coulant entre deux coteaux chargés de forêts qui, sur certains points de ses bords, ont l'air de se pencher, curieuses, pour se mirer dans cette onde solitaire. Toute cette nature est calme, reposée, et on n'y sentirait point la présence de l'homme, si une légère fumée ne se dégageait d'une chaumine noyée dans le feuillage. Cette vapeur monte tranquillement dans l'éther et s'étend peu à peu sur les cimes des arbres voisins, qui s'estompent finement sous ce voile léger. La rivière, au sortir de cette gracieuse vallée, s'étale sur de grasses prairies.

Jamais le pinceau d'un artiste n'a donné à une eau plus de transparence et n'en a mieux fait sentir la profondeur. Le dessin de cette toile est irréprochable, la couleur sobre et bien vraie, la lumière habilement distribuée. On s'arrache avec quelque peine à cette contemplation, et l'on croit avoir vu déjà ce site aimé dans ses meilleurs et ses plus frais souvenirs. Nous sentons dans M. Kindermans un ami et un habile observateur de la nature, et surtout un maître dans l'art de la représenter.

M. le comte de Bylandt a exposé un Souvenir du Lac des Quatre Cantons et une Vue du midi de l'Italie.

Ces deux toiles révèlent une main d'une habileté remarquable dans la touche, une couleur brillante, très-fondue. Les paysages de M. Bylandt ont un aspect vaporeux, vivement éclairé par une lumière de la plus grande pureté. Ses œuvres ont peut-être quelque chose de trop fini, de trop brillant. On désirerait un peu plus de réalisme dans la manière, très-distinguée d'ailleurs, dont M. de Bylandt voit et rend la nature.

Nous trouvons trois tableaux de M. Lambinet, le Port Marly, Bougival et l'Ile de Croissy, à Bougival.

M. Lambinet est aussi un des maîtres de l'école paysagiste, il brille surtout par la sincérité avec laquelle il rend la nature. Le talent de M. Lambinet est fait de simplicité. et d'observation vraie. Les plans de ses tableaux sont tous en harmonie parfaite, sa couleur sobre, ses ciels et ses lumières habilement conçus. Deux des toiles exposées par lui à Reims, le Port Marly et l'Ile de Croissy, sont de sa meilleure manière.

Nous trouvons de M. Huberti une Vue prise à Comblainle-Pont et un Verger au printemps.

Ces deux toiles révèlent de bonnes qualités de couleur et de lumière, mais elles nous paraissent trop peu étudiées, et leurs différents plans n'avoir point la valeur qui leur convient.

De M. Fanart: les Bords de la Loire dans le Val d'Amour (Jura).

Il y a donc une Loire dans le Jura? Nous pouvons nous adresser cette question sans risque de confirmer l'ignorance des Français en géographie, car ni cartes, ni dictionnaires géographiques n'ont pu nous révéler l'existence de ce cours d'eau.

La couleur de cette toile est bonne, peut-être trop riche; on pourrait désirer plus de fermeté dans le dessin.

M. Michel expose deux paysages.

La vue de ces toiles cause une impression de tristesse et de grandeur. Au milieu de cette sombre nature, on dirait qu'un drame va s'accomplir. Comme dans certains paysages de Rousseau, et surtout dans les toiles de Van Artois, le roux-brun domine dans les tableaux de M. Michel qui, d'ailleurs, dénotent un sérieux talent.

Nous trouvons de M. de Kniff un paysage désigné an livret: Inondation.

M. de Kniffest un des paysagistes belges les plus estimés. Cette réputation est de toute justice. Les toiles de M. de Kniff renferment toutes les qualités qu'on peut demander à un peintre de paysages, la couleur, le dessin, la touche, la lumière, l'observation vraie. La critique essaierait en vain de mordre sur ces œuvres remarquables. M. de Kniff rend surtout d'une admirable manière le feuillé et les trones des arbres. Aussi ses tableaux ont-ils eu à l'exposition rémoise un succès mérité.

Le paysage de M. Diaz, exposé à Reims, est une véritable fête pour les yeux. Que de vigueur, d'exubérance de talent et aussi de végétation dans ces beaux arbres illuminés par un coup de soleil perçant entre deux nuages, tandis que le ciel de ce tableau nous montre de sombres nuées s'enroulant comme dans un immense tourbillon! On sent que la foudre et l'ouragan vont bientôt sortir de ce cabos nuageux. Si l'homme est impressionné à la vue de cette menace des éléments, la nature, elle, reste, dans le tableau de M. Diaz, toujours souriante et toujours confiante dans ses éternels retours de jeunesse et de fraîcheur.

Le talent de M. Diaz a eu ses heures de défaillance après des années de triomphe et d'éclat ; mais combien le maître s'est relevé depuis lors! Le chiffre que ses tableaux atteignent dans les ventes publiques aujourd'hui, alors qu'il est encore dans toute la force du talent et de la production, indique bien quelles qualités recommandent aux gens de goût les œuvres de ce charmant artiste.

Personne n'a mieux que lui le secret de ces tons ambrés et blonds qu'on retrouve dans le paysage exposé à Reims, de ces finesses, de ces demi-teintes, de ces transparences qu'une longue et attentive étude de la nature a rendu fa

milières au talent de M. Diaz. A lui le secret de ces clairières où le soleil glisse ses rayons entre les verts rameaux et projette sur les gazons ses flèches d'or et ses plus beaux sourires.

N'oublions pas deux paysages de M. Kuvasseg, qui brillent par la couleur, la lumière et l'air, et par une disposition fort harmonieuse des plans. 、

M. Kuvasseg, un de nos paysagistes les plus remarqués, sait surtout parfaitement choisir les paysages qui font le mieux valoir les qualités qui lui sont propres.

M. de Tournemine a exposé un Souvenir d'Andragite. L'Egypte est là, avec son ciel d'un bleu implacable, son grand fleuve dont les sources encore inconnues vont sans doute révéler leur dernier secret. Sur ces bords du Nil. M. de Tournemine, le peintre des éléphants et des lions à la fauve crinière, nous montre tout un monde de phénicoptères aux ailes roses, d'ibis, de pélicans caquetant, dormant sur une patte, se baignant et pêchant, scène charmante et vraie sans doute, qu'on dirait empruntée aux premiers âges du globe, lorsqu'un pas humain n'avait point encore troublé le calme de ces imposantes solitudes.

Parmi les tableaux de marine, nous avons remarqué un Soleil couchant, de M. Gudin, toile charmante de détail, de touche et d'air.

Un Clair de lune sur la Tamise, de M. Auguste Mutin. Un Canot de sauvetage à Blankenberg, de M. François Musin, et deux bonnes marines, de MM. Van Beest Heemskerk et Jongkind.

Parmi les peintures d'animaux, nous citerons les deux magnifiques toiles de M. Mélin, un des plus grands succès de l'exposition, la Chasse au sanglier et le Relancer, dignes en tout point de figurer à côté des œuvres de Desportes, d'Oudry et de Snyders.

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