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tous les points de la question, il a exposé le mal, étudié ses causes, fait connaitre ses conséquences et proposé carrément un remède dont l'efficacité est constatée par 70 ans d'expérience. Il aurait donc mérité le prix, si la forme de son mémoire n'était pas aussi défectueuse. Les idées y sont entassées d'une manière confuse; il y a de nombreuses répétitions et beaucoup de digressions qui sortent du sujet. Le désordre qui règne dans sa rédaction, en rend la lecture fatigante et a fait penser à votre commission que le prix n'était pas mérité. Elle vous propose de donner à l'auteur, à titre d'encouragement, une médaille d'argent de première classe.

La société a adopté les propositions de la commission.

Le rapporteur,

Docteur SALLE.

DE LA COMMISSION (1) NOMMÉE POUR VISITER LES

GROTTES PRÉHISTORIQUES

DE COIZARD-JOCHES ET DE COURJEONNET

AINSI QUE LE

MUSÉE FONDÉ PAR M. JOSEPH DE BAYE.

M. Auguste NICAISE, rapporteur.

LU DANS LA SÉANCE PUBLIQUE DU 26 AOUT 1873.

MESSIEURS,

Votre commission nommée pour visiter les grottes préhistoriques découvertes à Coizard-Joches et à Courjeonnet par M. Joseph de Baye, ainsi que le musée fondé par lui au château de Baye, s'est acquittée le lundi 14 avril 1873 du mandat que vous lui avez confié.

Cette journée, Messieurs, prendra une grande place, non-seulement dans les annales de notre Société, mais encore dans la mémoire de chacun des membres de votre commission; car ce jour, la nature et la science, les plus curieux monuments archéologiques et la meilleure hospitalité se sont réunis pour lui faire trouver trop rapides les heures consacrées à cette intéressante excursion.

(1) Membres de la commission: MM Emile Perrier, président, Savy père, Moignon, Burel, Auguste Nicaise, Vagny, Morel et Quinquet de Monjour, secrétaire.

En effet, partie de Châlons d'abord, et d'Epernay ensuite, pour se rendre au château de Baye, votre commission a suivi, par une belle matinée de printemps, cette voie pittoresque dont les stations s'appellent Brugny, Montmort, Champaubert, et réveillent les plus grands noms et les plus purs souvenirs de notre histoire nationale.

Brugny, dont l'antique château, presque perdu au fond d'une riante vallée que dominent les hautes futaies de son parc en amphithéâtre et des forêts voisines, est la propriété de l'illustre famille de Clermont-Tonnerre.

Montmort, dont le vieux manoir, qui appartint successivement aux familles de Hangest, de Brezé, de Béthune-Sully et de Remond, semble encore menacer de ses tourelles altières le passant émerveillé et rêvant de l'histoire.

Champaubert, qui porte le fier nom de la bataille, et dont la colonne commémorative racontait, il y a quelques mois encore, à nos envahisseurs cinq jours de victoires consécutives (du 10 au 14 février 1814), qui s'appellent Champaubert, Montmirail, Château-Thierry et Vauchamps.

Enfin, Baye, la patrie de Saint-Alpin, l'illustre apôtre des Gaules, de celui qui sut attendrir le Fléau de Dieu, le légendaire Attila des champs catalauniques.

Tels sont, Messieurs, les grands souvenirs, les glorieuses légendes qui se pressaient dans nos esprits lorsque nous entrâmes dans le musée préhistorique fondé par M. Joseph de Baye dans l'antique demeure dont il porte le nom, et dont ses belles découvertes archéologiques lui ont exclusivement fourni les intéressants matériaux.

Là, dans une longue et haute salle, entièrement ornée et meublée dans le goût sévère du xve siècle, où tout appelle l'esprit à l'étude et à la méditation, se pressent dans d'élégantes vitrines en bois de chêne sculpté et en fer

poli tous les objets qui composent les armes, les ustensiles, les ornements de ces populations qui vécurent en deçà de l'histoire et de la tradition et que la science préhistorique fait sortir chaque jour des limbes qui obscurcissent encore le berceau de l'humanité.

Là s'étalent sur le velours, où les a religieusement couchés la main qui sut les arracher à leurs sombres retraites, les haches, les couteaux, les flèches, les poinçons, les grattoirs en silex, ces élégants polissoirs à main, qui cons tituent à la fois un ornement et un ustensile, les aiguilles et les poinçons en os, les colliers, les bracelets en coquilles, en vertèbres de poisson, les percuteurs en silex, les concasseurs, les nucléi ou noyaux dont furent détachés les longs couteaux aux vives et tranchantes arêtes, les vases grossiers façonnés sans l'aide du tour du potier, et cuits au soleil ou au feu extérieur, et enfin les nombreux crânes et les ossements de ces êtres primitifs dont le musée de M. Joseph de Baye nous redit, dans sa muette éloquence, les mœurs, les besoins, et même les passions et les luttes.

En effet, Messieurs, ce n'est point sans une vive curiosité mêlée de quelque émotion qu'on aperçoit ces vertèbres qui retiennent encore le silex homicide, la petite flèche à tranchant transversal, type presque inconnu jusqu'aujourd'hui dans la balistique préhistorique, ou la pointe de lance qui donnèrent sans doute la mort à ceux qu'elles frappèrent.

M. Joseph de Baye a trouvé dans les grottes de Coizard et de Courjeonnet un nombre considérable de ces flèches à tranchant transversal, dont un ou deux spécimens avaient été déjà découverts en France. Mais les savants étaient divisés sur l'usage qu'en faisaient les populations préhistoriques. Les uns n'y voyaient qu'une lame de ciseau destinée à être retenue dans une gaîne en os ou en bois, un instrument en un mot. D'autres au contraire, les classaient

timidement parmi les armes de jet. Les découvertes de M. Joseph de Baye ont apporté la plus vive lumière sur cette question par un témoignage matériel des plus intéressants.

Nous avons remarqué surtout dans ce musée des haches. en silex dans leurs emmanchures en cornes de cerf, les unes engagées encore dans les concrétions calcaires qu'amassérent autour d'elles des siècles nombreux, d'autres, au contraire, parfaitement dégagées de cette gangue, et donnant les preuves évidentes du long et patient travail que nécessita leur fabrication de la part de l'ouvrier préhistorique.

La gaîne d'un de ces instruments, fatiguée sans doute par des chocs répétés et par l'usure, et fendue dans toute son épaisseur et dans une partie de sa longueur, a été réparée par le procédé employé aujourd'hui pour raccommoder les objets céramiques. Deux trous ont été percés en regard l'un de l'autre, et une attache en filaments végétaux ou en matière tendineuse, disparue sous l'action du temps, a sans doute servi à reserrer cette solution de continuité, et à maintenir la hache dans son alvéole. Le même procédé a été appliqué pour raccommoder un vase en argile grossière.

Mais notre attention a été particulièrement attirée par cinq magnifiques haches en silex taillé de l'époque quaternaire et du type de Saint-Acheul, trouvées par M. Joseph de Baye à la surface du sol. Ce sont les premières, croyonsnous, découvertes en Champagne, et elles constituent ainsi des monuments d'une excessive rareté sur notre sol champenois, et d'une antiquité beaucoup plus reculée que celle des instruments trouvés dans les grottes de Coizard et de Courjeonnet, car ceux-ci appartiennent à l'époque de la pierre polie, dernière période de l'époque néolithique.

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