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Vafari dit qu'on voyoit autrefois au portique de Saint Pierre de Rome, une table de porphyre incruftée de beaucoup de pierres fines, qui par leur arrangement repréfentoient une cage. Pline parle d'un oifeau fi bien représenté par diftérens morceaux de marbres fur le pavé dont il fait la defcription, qu'il fembloit que ce fût un véritable oiseau qui eût bû dans un vafe peint de la même maniere, & placé auprès de lui. Certains Peuples de l'Amérique ont inventé une maniere de Mofaïque, compofée de plumes d'oifeaux affemblées par filets. On voit dans le Trésor de la Santa Cafa quatre portraits de Mofaïque de plumes.

DE LA PEINTURE A L'ENCAUSTIQUE.

On ne peut fixer l'époque de la Peinture à l'En cauftique. Pline, l'Auteur qui s'eft le plus étendu fur cette maniere de peindre, dit qu'on ne fçavoit pas même de fon tems quel étoit le premier qui avoit imaginé de peindre avec des cires colorées & d'opérer avec le feu (1). Quelques-uns cependant, continuet-il, croyoient qu'Ariftide en étoit l'inventeur, & que Praxitele l'avoit perfectionnée ; d'autres affuroient que l'on connoiffoit des tableaux peints à l'Encauftique long-tems avant, tels que ceux de Polignote, de Nieanor & d'Arcefilaus, Artistes de Paros: il ajoute que Lyfippe d'Egine écrivit sur ses tableaux, il a brûlé, ce qu'il n'auroit certainement pas fait fi l'Encauftique n'avoit été inventé. Quelque peu certaine que foit l'origine de la Peinture à l'Encauftique, il paroît cependant que

(1) Ceris pingere ac Picturam inurere qui primus excogitaverit non conftat. Quidam Ariftidis inventum putant pofteà confummatum à Praxitele. Sed aliquando vetuftiores Encaufticæ extitêre, ut Polygnoti, & Nicanoris & Arcefilai Pariorum. Lyfippus quoque, Ægenæ, Picturæ fuæ infcripfit évéxavsev quod profecto non feciffet nifi Incauftica inventa. Plin. liv. 35. c. XI.

fon invention prit naissance dans la Grece, & que l'art de peindre avec de la cire, des couleurs & le feu, devint familier aux Artistes de ce Peuple.

Il feroit inutile de porter plus loin les recherches fur l'antiquité de l'art d'employer la cire dans la Peinture, elles deviendroient non-feulement infructueuses, mais elles ne répandroient pas plus de lumiere fur les moyens d'exécuter les tableaux avec la cire, les couleurs & le feu, puifque Pline qui nous en a transmis les efpeces, dit peu de chofes du moyen de les pratiquer. Il eft constant, dit-il, que l'on connoiffoit anciennement deux genres de Peinture Encauftique, qui fe faifoient avec la cire & fur l'yvoire, au Ceftrum, c'eft-à-dire au Viriculum (1), avant que l'on connût la pratique de la Peinture fur l'extérieur des vaiffeaux, troifiéme efpece qui s'opéroit avec des cires, qui ayant été rendues liquides par l'action du feu, étoient de venues propres à être appliquées avec le pinceau. Cette Peinture étoit fi folide qu'elle ne pouvoit être

(1) Ceftrum, Viriculum termes que l'on n'entend point relativement à la Peinture à l'Encauftique.

Encaufto pingendi duo fuiffe Antiquitûs genera conftat, cerâ & in ebore ceftro, id eft viriculo, donec claffes pingi cœpere. Hoc tertium acceffit, refolutis igni ceris penicillo utendi, quæ Pictura in Navibus nec fole, nec fole ventifque corrumpitur. Pl. hift. Nat. lib. 35. c. XI.

* M. Monnoye, qui a fourni l'article Encaustique que l'on trouve dans le Dictionnaire Encyclopedique, a traduit les mots in Navibus dans les Vaiffeaux ; il a fans doute eu fes raifons; il a formé le plan d'accommoder Pline à la Peinture au Savon de M. Bachelier, Peinture qui fûrement ne pouvoit pas résister au fel de la mer, au foleil & aux vents, & encore moins à l'eau. Il ne faut pas croire que ce foit une faute d'impreffion, car lorfque M. Monnoye traduit ce que dit Ovide:

Et pica coloribus uftis

Cæleftum Matrem concava puppis habet.

Et la poupe repréfente la Mere des Dieux en couleur Brûlée.

Il repéte que cet Encauftique étoit bien plus pratiquable dans les vaiffeaux.

altérée

altérée ni par le foleil, ni par le fel de la mer, ni par les vents. Quoiqu'il ne paroiffe pas dans ce paffage qu'il foit fait mention de l'efpece d'Encauftique dont on faifoit des tableaux portatifs, on peut cependant préfumer que la premiere efpece étoit employée à cet ufage. Cet Encauftique & celui des vaiffeaux avoient-ils de l'analogie? Quoique cela puiffe être, nous n'oferions cependant trop l'affurer, d'autant que M. le Comte de Caylus & M. Majault, qui ont beaucoup examiné cette matiere, paroiffent mettre de la différence entre les moyens d'exécution de ces deux genres. Voyez leur Mémoire, pag. 26.

On employoit auffi l'Encauftique fur les murailles; cette pratique étoit elle une fuite de l'Encauftique des tableaux, ou l'Encauftique des tableaux avoit-il fuggéré aux Barbouilleurs de murailles d'en faire l'application à leurs travaux pour rendre leur peinture plus folide? Il eft impoffible de décider la question, foit que l'on confulte Vitruve ou Pline qui en ont parle. Cependant fi ces deux Auteurs ne difent rien qui puiffe éclaircir cette difficulté, ils nous en dédommagent par une description très-exacte de la maniere de pratiquer cette efpece d'Encaustique.

Voici d'abord ce qu'en dit Vitruve (1), Liv. vII. chap. IX. lorfqu'il parle de la préparation du minium. Cette couleur, dit-il, noircit lorfqu'elle eft exposée au foleil, ce que plufieurs ont éprouvé, entr'autres le Scribe Faberius, qui ayant voulu que fa maifon du mont Aventin fût ornée de belles Peintures, fit peindre tous les murs des périftyles avec le minium, qui ne put durer trente jours fans fe gâter en plufieurs endroits, ce qui le contraignit de les faire peindre une feconde fois avec d'autres couleurs. Ceux qui font plus exacts & plus curieux pour conferver cette belle

(1) Traduction de Perault.

d

1

couleur, après qu'elle a été couchée, bien égalemenɛ & bien féchée, la couvrent de cire punique, fondue avec un peu d'huile ; & ayant étendu cette compofition avec une broffe, ils l'échauffent & la muraille auffi, avec un réchaud où il y a du charbon allumé fondent la cire & l'égalent par-tout en la poliffant avec une bougie & des linges bien nets, conime quand on cire les ftatues de marbre. Cela s'appelle Kañois en grec; cette croute de cire empêche que la lumiere du foleil & de la lune ne mange la couleur (1). Pline dit la même chofe, quoiqu'avec moins de détail (2). Que l'on enduise la muraille de cire; lorsqu'elle fera bien féchée, que l'on la frotte avec un bâton de cire, & enfuite avec des linges bien nets, & la muraille deviendra brillante comme le marbre poli. Il paroît par conféquent qu'il n'y avoit qu'une feule maniere d'employer l'Encauftique fur les murailles.

Voilà tout ce que l'on peut dire fur l'hiftorique & fur le faire des différentes efpeces de Peintures à l'Encauftique, qui fe réduisent à quatre, fçavoir, la Peinture à la cire, celle qui fe faifoit avec le ceftrum ou le viriculum, Peinture fur les vaiffeaux, & Peinture fur la muraille; & pour exécuter ces différentes efpeces, ils mêloient les couleurs avec la cire, ou ils pénétroient la couleur de cire lorfque la Peinture étoit achevée.

(1) Itaque cum & alii multi, tunc etiam Faberius Scriba, cum in Aventino voluiffet habere domum eleganter expolitam, periftylii parietes omnes induxit minio, qui poft dies triginta facti funt invenusto varioque colore. Itaque primo locavit inducendos alios colores. At fi quis fubtilior fuerit, & voluerit expolitionem miniaceam fuum colorem retinere, cum paries expolitus & aridus fuerit, tum ceram punicam igni liquefactam paulo oleo temperatam fetâ inducat. Deinde poftea carbonibus in ferreo vafe compofitis eam ceram apprimè cum pariete calefaciendo, fudare cogat, fiatque ut peræquetur. Pofteà cum candela linteifque puris fubigat, uti figna marmorea nuda curantur. Hæc autem Kavois græcè dicitur. Vitruv. L. VII. C. IX.

(2) Parieti ficco cera inducatur. Poftea candelis fubigatur, ac deinde linteis puris, ficut & 'marmora nitescunt. Plin. Lib. 33. 6. 7.

Le bois étoit la feule matiere fur laquelle on peignoit des tableaux portatifs. Il feroit trop long de rapporter tous les paffages de Pline & des autres Auteurs qui fourniffent la preuve de cette vérité.

Paffons maintenant aux moyens que les Anciens employoient pour l'exécution de leurs différens Encauftiques.

Les couleurs étoient contenues, comme le dit Varron, dans des coffrets à petits compartimens (1) (2). On fe fervoit de broffes ou de pinceaux pour appli quer ou les cires colorées, comme le dit Pline (3), ou la cire fur les couleurs, comme le dit Vitruve.

On employoit le feu, foit pour fondre les cires colorées, foit pour liquéfier la cire pure destinée à être employée fur les couleurs pour les rendre plus folides que la détrempe. Les inftrumens destinés à cet usage portoient le nom de cauteria, dont la forme devoit varier felon les différens travaux auxquels on en faifoit l'application. Le cautere, dit Pline, étoit un des inftrumens des Peintres avec lequel on faifoit fondre les préparations bitumineufes les plus tenaces, dont on faifoit ufage pour la Peinture appellée Encaustique. Cette Peinture s'opere en faisant fondre des cires avec des charbons allumés (4).

Si l'origine de la Peinture à l'Encaustique eft équivoque, l'époque de fa décadence eft auffi fort incertaine. Il eft néanmoins conftant qu'elle fe pratiquoit

(1) Pictores loculatas habent arculas, ubi discolores funt ceræ. Varro de re Ruft. L. 2.

(2) Nam ut Paufanias & cæteri Pictores ejufque generis loculatas magnas habent arculas, ubi diverfi colores fint. Varro de re Ruftica, Lib. 3. cap. 17.

(3) Refolutis igni ceris penicillo utendi.

(4) Cauterium in pictorum inftrumentis continetur, quo bitumi nationes, & fortiores quæque conglutinationes concoquuncur, maxime in ea pi&ura quæ isxavsix appellatur, quæ fit carbonibus inuftis refolutis igne ceris. Pl. L. 22. 6. 23.

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