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ment la fermeté de son caractère, et qu'il périt avec un courage qui méritait une meilleure cause. Après la mort de Dâher, le Capitan Pacha établit Djezzâr Pacha d'Acre et de Saide, et lui confia le soin d'achever la ruine des rebelles. Fidèle à ses instructions, Djezzâr les attaqua par la ruse et par la force, et réussit au point d'amener Otmán, Seïd et Ahmed à se rendre en ses mains. Ali seul résista ; et c'était lui qu'on desirait davantage. L'année suivante (1776), Hasan revint; et de concert avec Djezzâr, il assiégea Ali dans Dair-Hanna, lieu fort, à une journée d'Acre; mais il leur échappa. Pour terminer leurs inquiétudes, ils employèrent un moyen digne de leur caractère. Ils apostèrent des Barbaresques, qui, prétextant d'avoir été congédiés de Damas, vinrent dans le canton où Ali se tenait campé. Après avoir raconté leur histoire à ses gens, ils lui demandèrent l'hospitalité. Ali, à titre d'Arabe et d'homme qui n'avait jamais connu la lâcheté, les accueillit; mais ces misérables fondant sur lui pendant la nuit, le massacrèrent, et vinrent demander leur récompense, sans cependant avoir pu s'emparer de sa tête. Le Capitan se voyant délivré d'Ali, fit égorger ses frères,

Seïd, Ahmad et leurs enfans. Le seul Otmân fut conservé en faveur de son rare talent pour la poésie, et on l'emmena à Constantinople. Le Barbaresque Degnizlé, que l'on renvoya de cette Capitale à Gaze avec le titre de Gouverneur, périt en route avec soupçon de poison. L'Émir Yousef effrayé, fit sa paix avec Djezzâr; et depuis ce moment la Galilée, rentrée aux mains des Turks, n'a conservé de la puissance de Daher qu'un inutile souvenir.

CHAPITRE XX V I. Distribution de la Syrie par Pachalics, selon l'administration Turke.

APRÈS que le Sultan Selim Ier se fut emparé de la Syrie sur les Mamlouks, il y établit, comme dans le reste de l'Empire, des Vice-rois ou Pachas (1), revêtus d'un pouvoir illimité et absolu. Pour s'assurer de leur soumission et faciliter leur régie, il divisa le pays en cinq gouverne

(1) Le terme Turk Pacha, est formé des deux mots persans Pa châh, qui signifient littéralement Vice-Roi.

mens ou pachalics, dont la distribution subsiste encore. Ces pachalics sont celui d'Alep, celui de Tripoli, celui de Saide, récemment transféré à Acre, celui de Damas, et enfin celui de la Palestine, dont le siége a été, tantôt à Gaze, et tantôt à Jérusalem. Depuis Sélim, les débornemens de ces pachalics ont souvent varié; mais la consistance générale s'est maintenue à peu près la même. Il convient de prendre des notions un peu détaillées des objets les plus intéressans de leur état actuel, tels que les revenus, les productions, les forces et les lieux remarquables.

CHAPITRE XX V I I.

Du Pachalic d'Alep.

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Le pachalic d'Alep comprend le terrain qui s'étend de l'Euphrate à la Méditerranée entre deux lignes tirées, l'une de Skandaroun à Bir, par les montagnes; l'autre de Bèles à la mer, par Marra et le pont de Chogr. Cet espace est en grande partie formé de deux plaines;

l'une, celle d'Antioche à l'ouest ; et l'autre, celle d'Alep à l'est: le nord et le rivage de la mer sont occupés par d'assez hautes montagnes, que les anciens ont désignées sous les noms d'Amanus et de Rhosus. En général, le sol de ce gouvernement est gras et argileux. Les herbes hautes et vigoureuses qui croissent par-tout après les pluies d'hiver, en attestent la fécondité; mais elle y est presque sans fruit. La majeure partie des terres est en friche; à peine trouve-t-on des cultures aux environs des villes et des villages. Les produits principaux sont le froment, l'orge et le coton, qui appartiennent spécialement au pays plat. Dans les montagnes, l'on préfère la vigne, les mûriers, les olives et les figues. Les côteaux maritimes sont consacrés aux tabacs à pipe, et le territoire d'Alep aux pistaches. Il ne faut pas compter les pâturages, qui sont abandonnés aux hordes errantes des Turkmans et des Kourdes.

Dans la plupart des pachalics, le Pacha est, selon la valeur de son titre, Vice-roi et Fermier-général du pays. Dans celui d'Alep, ce second emploi lui manque. La Porte l'a confié à un Mehassel ou Collecteur, avec qui elle compte immédiate

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ment. Elle ne lui donne de bail que pour l'année seulement. Le prix actuel de la ferme est de 800 bourses, qui font un million de notre monnoie; mais il faut y joindre un prix de babouches (a) ou pot-de-vin de 80 à 100 mille francs, dont on achète la faveur du Visir et des gens en crédit. Moyennant ces deux sommes, le Fermier est substitué à tous les droits du Gouvernement, qui sont, 1°. les douanes ou droits d'entrée et de sortie sur les marchandises venant de l'Europe, de l'Inde ou de Constantinople, et sur celles que le pays rend en échange. 2°. Les droits de passage sur les troupeaux que les Turkmans et les Kourdes amènent chaque année de l'Arménie et du Diarbekr, pour vendre en Syrie. 3°. Le cinquième de la saline de Djeboul; enfin le miri ou impôt établi sur les terres. Ces objets réunis peuvent rendre quinze à seize cents mille livres.

Le Pacha privé de cette régie lucrative, reçoit un traitement fixe de 80,000 piastres (c'est-à-dire, de 200,000 livres) seulement. L'on a de tout temps reconnu ce fonds insuffisant

(a) Pantoufles Turkes.

Tome II.

I

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