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<< imposteur, nommé Mohammad-ben-Ismaël, enseignait qu'il était inutile de pratiquer le jeûne, «la prière, la circoncision, le pélerinage, et «<d'observer les fêtes; que les prohibitions du porc et du vin étaient absurdes; que le mariage des frères, des sœurs, des pères et des << enfans était licite. Pour être bienvenu de « Hakem, il soutint que ce Kalif était Dieu lui« même incarné ; et au lieu de son nom Hakem«b'amr-ellah,quisignifie gouvernant par l'ordre << de Dieu, il l'appela Hakem-b'amr eh, qui si«gnifie gouvernant par son propre ordre. Par << malheur pour le Prophète, son nouveau Dieu << n'eut pas le pouvoir de le garantir de la fureur << de ses ennemis : ils le tuèrent dans une émeute << aux pieds même du Kalif, qui peu après fut << aussi massacré sur le mont Moqattam, où il en«< tretenait, disait-il, commerce avec les Anges. »

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La mort de ces deux Chefs n'arrêta point les progrès de leurs opinions : un disciple de Mohammad-ben-Ismaël, nommé Hamza-ben-Ahmad, les répanditavec un zèle infatigable dans l'Egypte, dans la Palestine, et sur la côte de Syrie, jusqu'à Sidon et Beryte. Il paraît que ses prosélytes éprouvèrent le même sort que les Maronites,

c'est-à-dire, que persécutés par la communion régnante, ils se réfugièrent dans les montagnes du Liban, où ils pouvaient mieux se défendre; du-moins est-il certain que peu après cette époque, on les y trouve établis et formant une société indépendante comme leurs voisins. Il semblerait que la différence de leurs cultes eût dû les rendre ennemis; mais l'intérêt pressant de leur şureté commune les força de se tolérer mutuellement; et depuis lors, ils se montrent presque tou. jours réunis, tantôt contre les Croisés, ou contre les Sultans d'Alep, tantôt contre les Mamlouks et les Ottomans. La conquête de la Syrie par ces derniers ne changea point d'abord leur état. Sélim premier, qui au retour de l'Egypte ne méditait pas moins que la conquête de l'Europe, ne daigna pas s'arrêter devant les rochers du Liban. Soliman II, son successeur, sans cesse occupé de guerres importantes, tantôt contre les Chevaliers de Rhodes, les Persans ou l'Yemen, tantôt contre les Hongrois, les Allemands et Charles-quint, Soliman II n'eut pas davantage le temps de songer aux Druzes. Ces distractions les enhardirent; et non contens de leur indépendance, ils descendirent souvent de leurs mon

tagnes pour piller les sujets des Turks. Les Pachas voulurent en vain réprimer leurs incursions: leurs troupes furent toujours battues ou repoussées. Ce ne fut qu'en 1588, qu'Amurat III, fatigué des plaintes qu'on lui portait, résolut, à quelque prix que ce fût, de réduire ces rebelles, et eut le bonheur d'y réussir. Son Général Ybrahim Pacha, parti du Kaire, attaqua les Druzes et les Maronites avec tant d'adresse ou de vigueur, qu'il parvint à les forcer dans leurs montagnes. La discorde survint parmi les chefs, et il en profita pour tirer une contribution de plus d'un million de piastres, et pour imposer un tribut qui a continué jusqu'à ce jour.

Il paraît que cette expédition fut l'époque d'un changement dans la constitution même des Druzes. Jusqu'alors ils avaient vécu dans une sorte d'anarchie, sous le commandement de divers Chaiks ou Seigneurs. La nation était surtout partagée en deux factions, que l'on retrouve chez tous les peuples Arabes, et que l'on appelle parti Qaisi, et parti Famâni (1). Pour simpli

(1) Ces factions se distinguent par la couleur qu'elles affectent à leurs drapeaux ; celui des Qaisis est rouge, et celui des Yamanis blanc.

fier la régie, Ybrahim voulut qu'il n'y eût qu'un seul chef qui fût réponsable du tribut, et chargé de la police. Par la nature de son emploi, cet agent ne tarda pas d'obtenir une grande prépondérance, et sous le nom de gouverneur, il devint presque le Roi de la République; mais comme ce Gouverneur fut tiré de la nation, il en résulta un effet que les Turks n'avaient pas prévu, et qui manqua de leur être funéste. Cet effet fut que le Gouverneur rassemblant dans ses mains tous les pouvoirs de la nation, put donner à ses forces une direction unanime qui en rendit l'action bien plus puissante. Elle fut naturellement tournée contre les Turks, parce que les Druzes, en devenant leurs sujets, ne cessèrent pas d'être leurs ennemis. Seulement ils furent obligés de prendre dans leurs attaques des détours qui sauvassent les apparences, et ils firent une guerre et ils firent une guerre sourde, plus dangereuse peut-être qu'une guerre déclarée. Ce fut alors, c'est-à-dire, dans les premières années du dix-septième siècle, que la puissance des Druzes acquit son plus grand développement: elle le dut aux talens et à l'ambition du célèbre Emir Fakr-el-din, vulgairement appelé Fakardin. A peine ce prince se vit-il chef et gouverneur

de la nation, qu'il appliqua tous ses soins à diminuer l'ascendant des Ottomans, à s'agrandir même à leurs dépens; et il y mit un art dont peu de Commandans en Turquie ont offert l'exemple. D'abord il gagna la confiance de la Porte par toutes les démonstrations du dévouement et de la fidélité. Les Arabes infestaient la plaine de Balbek et les pays de Sour et d' Acre; il leur fit la guerre, en délivra les habitans, et prépara ainsi les esprits à desirer son gouvernement. La ville de Bairout était à sa bienséance, en ce qu'elle lui ouvrait une communication avec les étrangers, et entre autres avec les Vénitiens, ennemis naturels des Turks. Fakr-el-din se prévalut des malversations de l'Aga, et l'expulsa : il fit plus; il sut se faire un mérite de cette hostilité auprès du Divan, en payant un tribut plus considérable. Il en usa de la même manière à l'égard de Saide, de Balbek et de Sour; enfin, dès 1613, il se vit maître du pays jusqu'à Adjaloun et Safad. Les Pachas de Damas et de Tripoli ne voyaient pas d'un œil tranquille ces empiétemens. Tantôt ils s'y opposaient à force ouverte, sans pouvoir arrêter Fakr-el-din: tantôt ils essayaient de le perdre à la Porte par des

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