au roì faint Louis, disfant, que dans le defir qu'il AN. 1269.
avoit, lui, fon clergé & fon peuple de revenir
à l'obéillance de l'églife Romaine, ils avoient
fouvent envoïé au faint fiége, fans avoir reçû
fatisfaction fur cette affaire. C'est pourquoi it
prioit le roi de vouloir bien s'en rendre arbitre,
promettant d'observer inviolablement ce qu'il en
décideroit; & il l'en conjuroit par le fang de J. C.
& le dernier jugement. Le roi defiroit ardem-
ment la réunion des schismatiques, mais il favoit
qu'il ne lui apartenoit pas de prononcer en cette ma-
tiere purement fpirituelle : c'eft pourquoi il répon-
dit l'empereur, qu'il ne pouvoit fe charger de
cet arbitrage, mais qu'il folliciteroit volontiers
la conclufion de l'affaire auprés du faint fiége,
auquel il appartenoit d'en décider. Pour cet ef-
fet il envoïa en cour de Rome deux freres Mi-
neurs Eustache d'Arras & Lambert de la Coutu-
re, avec des lettres pour les cardinaux qui gou-
vernoient l'églife Romaine pendant la vacance
du fiége; & les envoïés leur expoférent la pro-
pofition de l'empereur Grec & la réponse du

roi.

L

A

Saint Louis étoit depuis quelques années en commerce avec le roi de Tunis, & ils avoient reçû plufieurs fois des envoïés l'un de l'autre. Car plufieurs perfonnes dignes de foi faifoient entendre au faint roi, que ce prince Musulman avoit grande inclination pour la religion chrétienne, & qu'il l'embrafferoit volontiers s'il en trouvoit une occafion honorable, & qui le mit Tome XVIII. T

AN. 1269.

Rain. 1270. n.2.

23:41

en fureté à l'égard de fes fujets. Louis le defiroit ardement, & difoit quelques fois : O fi je pouvois me voir parrain d'un tel filleul! & dans cette espérance il voulut aller au bas Languedoc comme pour vifiter fes terres; afin que fi Dieu infpiroit au roi de Tunis de recevoir le baptême, il fe trouvât plus proche pour favorifer cette bonne œuvre. Le jour de faint Denis neuviéme d'Octobre 1269. le roi fit baptifer folemnellement dans l'église même du faint, un Juif fameux, dont il fut le parrain. Le roi de Tunis lui avoit encore envoïé des ambaffadeurs : il voulut qu'ils affiftaffent à cette céremonie, & il leur dit dans l'ardeur de fon zéle: Dites de ma part au roi vôtre maître, que je voudrois, tant je defire. le falut de fon ame, paffer le refte de mes jours. en prison chés le Sarrazins, fans jamais voir la lumiere du soleil, pourvû que lui & son peuple fe fiffent Chrétiens de bonne foi.

Les cardinaux qui gouvernoient pendant la vacance du faint fiége, aïant oui les deux freres Mineurs que faint Louis leur avoit envoïés, touchant l'affaire des Grecs, lui firent réponse par une lettre dattée de Viterbe le quinziéme de Mai 1270. où ils lui difent, qu'ils ont renvoïé l'exécution de cette affaire au cardinal évêque d'Albane légat en France; & avertiffent le roi de fe défier des artifices des Grecs, qui ont fait fouvent de pareilles propofitions feulement pour gagner du tems. Le même jour les cardinaux écrivirent au légat, lui donnant pouvoir de re

prendre avec Paleologue la négociation commencée par les deux derniers papes Urbain & Clement, fans s'écarter des conditions qu'ils avoient' prefcrites aux Grecs. Ce légat étoit Raoul de Chevrieres auparavant évêque d'Evreux, à qui le pape Clement avoit donné la croix de fa main, & l'avoit déclaré légat pour la croifade: mais de peur qu'on ne prétendît que la mort du pape eût annullé fa commiffion, les cardinaux la lui confirmérent, & en effet il accompagna faint Louis dans le voïage.

Avant

AN. 1270.

Rain. 1269. n.7.

V.

La B. Ifabelle

Vie par Agnés.

que de partir le faint roi assista aux funérailles d'Ifabelle de France fa foeur unique, de France. digne d'un tel frere. Elle réfolut dés sa jeunesse de fe confacrer à Dieu, & refufa le mariage p. 170. avec Conrad fils de l'empereur Frideric II. qui v. Chatelain.nes. lui fut propofé & confeillé par le roi fon frere, martyr.p.12. & même par le pape Innocent IV. Elle donnoit la plus grande partie de fon tems à la priere & à la lecture de l'Ecriture fainte, qu'elle lifoit en latin; car elle l'entendoit fi bien, que fouvent elle corrigeoit les lettres que fes chapelains avoient écrites en fon nom, fuivant l'ufage du temps. Elle jeûnoit fouvent, & en géneral prenoit fi peu de nourriture, que l'on admiroit qu'elle en pût vivre. Elle fe confeffoit tous les jours, prenoit fouvent de rudes difciplinès, & gardoit un grand filence. Elle nouriffoit quantité de pau- p. 172. vres & les fervoit de fes mains: fes aumônes étoient immenfes.

2.1716

Aïant réfolu de faire une fondation, elle dou- p.173

AN. 1270.

Hemer.

Dubreuil. Antiq. p.1256.

toit fi elle fonderoit un hôpital ou une maison de l'ordre de fainte Claire. Elle confulta fecrettement Henri de Vari chancelier de l'église de PaAcad. p. 125, ris, qui étoit alors son confeffeur, & il lui confeilla la maison religieufe. Elle fonda donc l'ab--baïe de Longchamp prés de Paris au coucbant, où les religieuses entrerent en clôture la veille de la faint Jean vingt-troifiéme Juin 1261. & la regle. qu'on leur donna fut examinée par plufieurs doteurs de l'ordre, entre autres par faint Bonaventure. La princeffe donna à cette maison le nom. de l'Humilité de nôtre Dame, elle s'y renferma elle-même, mais fans faire profeffion, ni prendre. l'habit; & y mourut faintement le vingt-deuxiéme de Février 1269.c'est-à-dire 1270. avant Pâques,. à l'âge de quarante-cinq ans. Elle voulut être enterrée au-dedans du monaftere; & le roi Louis Lashefe liv. L. fon frere, qui étoit prefent, fe tint lui-même à la porte, pour empêcher qu'il n'y entrât que les perfonnes néceffaires.. Il fit un petit difcours. plein d'onction pour confoler la communauté de cette perte. La vie d'Isabelle fut écrite par Agnés de Harcourt troifiéme abbeffe de ce monaftere; & elle l'écrivit à la priere du roi Charles de Si cile frere de la fainte, auprés de laquelle elle avoit vécu. Elle raconte quarante miracles operés par fon interceffion. Depuis le pape Leon X. en 1.5 21.permit de l'honorer à Longchamp comme bienheureuse...

6.

"Gall..chr. to 4. 2575.

VI.

Au même mois de Février 1 270.le roi Louis fit fon Départ de faint teftament compofé principalement de legs pieux.

Hous

Duch: p. 438.

П donne fes livres aux freres Prêcheurs & aux AN. 1270. freres Mineurs de Paris, à l'abbaïe de Roïaumont, Joinv. observ. p. & aux freres Prêcheurs de Compiegne. Il donne certaines fommes d'argent à un trés- grand Duboulai. p. 392. nombre de monafteres & d'hôpitaux; & entre les convents de Paris il nomme les Carmes, les Guillemins qui étoient à Montrouge, & les Hermites de faint Auguftin. Il donne auffi aux pauvres écoliers de faint Thomas du Louvre, de: faint Honoré & des Bons-enfans. Il donne de. quoi acheter des calices & des ornemens aux pauvres églifes de fes domaines. Il ordonne la continuation des penfions aux baptifés qu'il avoit fait venir d'outremer,c'est-à-dire, aux infideles dont il avoit procuré la converfion. Il nomme pour executeurs de ce teftament Etienne évêque de Paris, Philippe élû évêque d'Evreux, les abbés. de faint Denis & de Roïaumont, & deux de fes clercs. La datte eft du mois de Février 1269..c'està-dire 1270. avant Pâques. Au mois de Mars fuivant le roi donna pouvoir à l'évêque de Paris de Gall.chr.10.1.p. conferer tous les benefices de fa nomination qui vaqueroient pendant fon abfence en régale ou autrement, par le confeil. du chancelier de l'églife de Paris, du prieur des Jacobins & du gardien des Cordeliers. Enfin le roi nomma pour regents du roïaume Matthieu abbé de faint Denis, & Simon de Clermont feigneur de Néelle.

448.

Labbe Mestan

Le Vendredi quatorziéme jour de Mars le roi fe rendit à faint Denis, où il reçût la gibeciere p.662. & le bourdon. de pelerin de la main du légat

T. iij,