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quelque homme de bien, & tu la porteras plus AN. 1270. facilement. Prens garde de n'avoir en ta compagnie que des gens de bien, foit religieux ou feculiers, & leur parle fouvent. Ecoute volontiers les fermons en public & en particulier : recherche les prieres & les indulgences. Aime tout bien & hai tout mal en qui que ce foit. Perfonne ne foit affés hardi pour dire devant toi parole qui excite au peché, ou pour médire d'autrui; & ne souffre point que l'on blasfême en ta prefence contre Dieu ou fes faints, fans en faire auffi-tôt juftice. Rens fouvent graces à Dieu de tous les biens qu'il t'a faits, enforte que tu fois digne d'en recevoir encore plus. Sois roide pour la justice, & loïal envers tes fujets, fans tourner à droit ni à gauche. Soûtiens le parti du plus pauvre, & fi quelqu'un a un intereft contraire au tien, fois pour lui contre toi, jusques à ce que tu faches la verité: car tes confeillers en feront plus hardis à rendre juftice. Si tu retiens quelque chofe du bien d'autrui, par toi ou par tes officiers, & que le fait foit certain, rendsle fans delai; s'il eft douteux, fais-le éclaircir promptement & foigneusement.

Tu dois mettre toute ton application à faire vivre en paix & en justice tes fujets, principalement les religieux & les ecclefiaftiques. On raconte du roi Philippe mon aïeul, qu'un de fes confeillers lui dit un jour, que l'église faifoit plufieurs entreprises fur fes droits, & diminuoit fa jurisdiction. Le roi répondit, qu'il le croïoit

AN. 1270.

bien : mais quand il regardoit les graces que Dieu lui avoit faites, il aimoit mieux négliger fon droit, qu'avoir difpute avec l'église. Aime donc, mon fils, les ecclefiaftiques, & garde la paix avec eux tant que tu pourras. Aimes les religieux, & leur fais du bien felon ton pouvoir, principalement à ceux par qui Dieu eft plus honoré, & la foi prêchée & exaltée. Tu dois à ton pere & à ta mere amour, refpect & obéïffance. Donne les benefices à des perfonnes capables & dignes, par confeil des gens de bien, & à ceux qui n'ont point de benefices. Garde-toi d'entreprendre la guerre fans grande déliberation, principalement contre des Chrétiens; & s'il la faut faire, preserve de tout dommage les ecclesiastiques & les innocens. Appaise les guerres & les conteftations le plûtôt que tu pourras, comme faint Martin faifoit. Sois foigneux d'avoir de bons prevôts & de bons baillifs, & t'enquiers fouvent comment ils se conduisent, eux & les gens de ta maison. Travaille à empêcher les pechés, fur tout les pechés honteux & les vilains fermens, & à détruire les hérefies de tout ton pouvoir. Prens garde que la dépenfe de ta maison foit raisonnable & mefurée. Je te prie, mon cher fils fije meurs avant toi, que tu faffes fecourir mon ame de meffes, & de prieres par tout le roïaume de Fran ce, & que tu m'accordes une part fpéciale dans tous les biens que tu feras. Enfin je te donne toutes les benedictions qu'un pere peut donner à un fils. Dieu te garde de tout mal, & te don

,

ne la grace de faire toûjours fa volonté, afin que AN. 1270. nous puiffions aprés cette vie le louer ensemble

fans fin. Amen.

& vous

Le roi donna une pareille inftruction à fa fille Obs. Join. p. 400. Ifabelle reine de Navarre. Il y répete les mêmes preceptes, infiftant fur l'amour de Dieu, jufqu'à dire Quand vous feriés certaine de n'être jamais récompensée du bien ni punie du mal que vous feriez, vous devriés vous garder de rien faire qui déplût à nôtre Seigneur étudier à faire les chofes qui lui plairoient, purement pour l'amour de lui. Il lui recommande d'obéir à fon mari: de n'avoir point trop d'habits à la fois, ni de joïaux felon fon état, mais faire au lieu des aumônes, au moins du fuperflu; de n'emploïer pas trop de tems ni de foin à fe parer: ne point donner dans l'excés des ornemens, & plûtôt en diminuer tous les jours.

I X.
Mort de S. Louis.

Duchesne p. 393

Joinville p. 128

La maladie continuant d'augmenter, Louis reçût les facremens avec grande devotion, aïant encore une entiere liberté d'efprit : - jufques-là que quand on lui donna l'extrême-onction, il difoit les verfets des pfeaumes & les noms des P463. faints aux litaines. Aprochant de sa fin il n'étoit plus occupé que des chofes de Dieu & de la propagation de la foi. En forte que ne pouvant plus parler que trés-bas & avec peine, il difoit à ceux qui aprochoient leur oreille de fa bouche: Pour Dieu, cherchons comment on pourroit prêcher la foi à Tunis. O qui pourroit-on y envoier! & il nommoit un Jacobin qui y avoit été

Duch. p. 4744

AN. 1270.

autrefois & étoit connu du roi de Tunis. La nuit de devant fa mort il difoit: Nous irons à JeruDuch. p. 474. falem. Quoique les forces lui manquaffent peu à peu, il ne ceffoit point de nommer autant qu'il pouvoit, les faints aufquels il avoit le plus de dévotion, principalement faint Denis & fainte Geneviève, & quand il fe fentit prés de fa fin, il se fit mettre sur un petit lit couvert de cendre,. où les bras croifez fur la poitrine & les yeux au ciel, il rendit l'efprit fur les trois heures aprés Spicil. p. 559. midi, le lundi vingt-cinquième jour d'Août 1270. aïant vécu cinquante-cinq ans & regné prés de quarante-quatre.

Lez.

X.

P. 464.516.

A peine avoit il expiré quand le roi Charles Retour des croi- de Sicile arriva au camp, & raffura par fa prefence & fa fermeté l'armée defolée. Le corps du faint roi fut demembré pour le faire bouillir, feparer les chairs & conferver les os, luivant l'ufage du tems. Le roi Charles demanda le cœur, les entrailles & les chairs, qu'il fit dépuis enterrer dans l'abbaïe de Montreal prés de Palerme. Les os furent mis dans une caiffe pour être raportés en France. Tous les feigneurs firent ferment au nouveau roi de France Philippe, à qui on donna depuis le furnom de Hardi : il avoit vingt-cinq ans, & en regna quinze.

Duch. p. 521.

Il y eut encore quelques combats où les François eurent l'avantage, & ils auroient pû prendre Tunis: mais ils jugerent plus à propos de faire une treve de dix ans qui fut conclue le trentiéme d'Octobre à ces conditions. Le roi

de France & fes barons feront entierement rem- AN. 1278. bourfés des frais de leur voyage; le port de Tunis fera franc pour le commerce, au lieu que les marchands payoient le dixiéme de leur charge. Le roi de Tunis payera au roi de Sicile le tri- 12. but annuel que païoient fes predeceffeurs. Il mettra en liberté tous les Chrétiens qu'il tient en prison ou en esclavage, & leur laissera l'exercice libre de leur religion. C'eft qu'il y avoit à Tunis une grande multitude de Chrétiens, mais efclaves des Sarrazins, un convent des freres Prêcheurs & des églifes où les fideles s'affembloient tous les jours. Or le roi les avoit tous fait mettre en prifon, quant il apprêt que l'armée Françoise étoit entrée fur fes terres. Il fut convenu Spicil. to.2. p. 56 20 de plus qu'il permettoit à l'avenir aux Chrétiens to 11.p. 560. de demeurer dans les principales villes de fon royaume, & d'y poffeder toutes fortes de biens, mêmes des immeubles, fans payer que le tribut ordinaire des Chrétiens libres; qu'ils pourroient y bâtir des églifes, dans lesquelles on prêcheroit publiquement la foi Chrétienne, & qu'il feroit permis à qui voudroit de recevoir le bap

tême.

Ce traité venoit d'être conclu quand on vit arriver Edouard fils aîné du roi d'Angleterre, avec Edmond fon frere & quantité de nobleffe croifée pour la terre fainte. Lorsqu'il apprit le traité Knyght.p.2456, il fut fort mécontent, & dit aux François : Avonsnous pris la croix & nous fommes-nous affemblez ici pour traiter avec les infideles? Dieu

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