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AN. 1278. nes au parti fchifmatique & les y entretenoit par fes careffes. Marie mécontente par elle-même de l'empereur fon oncle, étoit bien informée du chagrin que fa mere avoit contre lui:car ily avoit grand nombre de moines, qui alloient & venoient tous les jours entre ces deux princeffes pour les échauffer dans l'affection pour le fchifme. Marie donc pour se vanger elle & fa mere de l'empereur, envoya en Paleftine Jofeph furnommé Cathare, avec quelques autres, chargés d'instruire le patriarche de Jerufalem de ce qui s'étoit paffé, & exciter le sultan d'Egypte à attaquer l'empereur, tandis qu'il l'étoit d'ailleurs par les Bulgares. Le patriarche de Jerusalem ajoûta foi aux envoyés de Marie, fachant d'ailleurs ce qui étoit arrivé. Et pour autorifer davantage la nouvelle, il les tint pour vrais ambaffadeurs, fans trop examiner de quelle part ils venoient. Il crut même que Theodofe patriarche d'Alexandrie & Euthymius d'Antioche, feroient ce qu'il auroit fait tout seul; c'est-à-dire de s'oppofer à l'union.

Le fultan fut furpris de cette ambassade n'en aïant jamais receu de pareille, & d'ailleurs ne connoiffant point les Bulgares ni leur puiffance, l'ambaffade lui fut fufpecte, & il renvoya fans réponse les émiffaires de Marie. Le patriarche d'Antioche étoit déja à C. P. où il s'étoit refugié : s'étant sauvé des mains du roi d'Armenie d'une maniere qui lui parut miraculeuse, & qu'il attribua à l'interceffion du grand S. Nicolas. Quant au patriarche d'Alexandrie, il avoit été mis fur ce fiége depuis l'union des

églises, & ne pouvant la rompre il fe tenoit en AN. 1173. repos: d'autant plus qu'il n'y avoit pas été apellé, qu'il étoit éloigné & au milieu des infideles, & ne vouloit pas s'exclure de la protection de l'empereur en cas de befoin.

Lxxxví.

Euthymius patriarche d'Antioche mourut à C. Pach.v1 c. 5. P. & plusieurs évêques d'Orient fe trouvant prefens, voulurent lui élire un fucceffeur: car pendant sa maladie Theodoret évêque d'Anazarbe, lui avoit confeillé de mander les plus confiderables outre ceux qui y étoient déja, afin que l'élection fut plus autentique. Tous s'accorderent à élire le Prince, Sup. liv. LXXXVI. c'est-à-dire le moine Theodofe de Villehardouin qui avoit deja été propofé pour C. P. Mais avant qu'il fut ordonné patriarche d'Antioche, l'empereur voulut s'affûrer qu'il foûtiendroit l'union avec l'églife Romaine. Ce qu'il fit par le moïen de l'hiftorien Pachymere, qui avoit grande habitude avec Theodofe.

Cependant l'empereur Michel étant allé faire la guerre en Natolie, & fe trouvant campé prés du lieu où le patriarche Jofeph étoit relegué: ce prélat le pria de le transferer, attendu là rigueur du froid qu'il y avoit éprouvé l'hiver precedent, & auquel il craignoit de ne pas réfifter s'il y passoit encore un hiver. On étoit au mois de Juin 1278. l'empereur fit venir Jofeph, & le retint auprés de lui dans fon camp, le voïant plufieurs fois le jour, le careffant, l'écoutant volontiers & accordant des graces à plufieurs perfonnes par sa mediation. Enfin il lui affi

n.

Pach.vi. c.22.

XXVI.

Rara te de Jean
Veccus.

10.

AN. 1279. gna pour demeure le monaftere de Cofmidion à C. P. Aïant ainsi regagné l'affection du vieillard, il le gratieufoit, & difoit qu'il le vouloit rétablir dans le fiége patriarcal; & Jofeph difoit qu'il étoit prêt d'y rentrer pourvû qu'on revocât ce qu'on avoit fait, c'est-à-dire l'union avec les Latins. Ce qui étoit impoffibile principalement depuis la promotion du nouveau pape Nicolas, à qui l'empereur étoit prêt d'envoïer des ecclefiaftiques pour affermir l'union. Il y avoit déja quatre ans que Jean Veccus étoit patriarche de C. P. quand au mois de Février de la Pach VI. feptiéme indiction, c'est-à-dire l'an 1-279. quelquesuns de fon clergé propoferent contre lui des accufations, qui bien que fauffes & frivoles, ne furent pas défagréables à l'empereur: car il avoit fort à cœur d'humilier ce prélat & moderer l'ardeur de fon zele, & la vivacité de fes follicitations. Ces accufateurs étoient excités par Ifaac évêque d'Ephefe, qui étoit alors le pere fpirituel de l'empereur. Il ne pouvoit fouffrir que le patriarche étendit sa jurisdiction immediate fur quelques lieux de Natolie; croyant qu'elle devoit être bornée à la feule ville de C. P. & que ce qui en étoit dehors devoit être foumis aux évêques diocesains. Il fe prévalut donc de l'occafion où l'empereur étoit mécontent du patriarche, & obtint de lui une conftitution, qui entre plufieurs autres difpofitions, , porte que les terres & les monafteres dépendans du patriarche feroient foumis à l'évêque diocefain, quelque part qu'ils fuflent fitués, Mais,

C. II.

dit Pachymere, c'étoit ôter au patriarche le titre d'Oecumenique, le bornant à la ville de C. P. fans lui laiffer même un territoire comme au moindre évêque.

AN. 1279

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Les pourfuites contre Veccus durerent deux mois entiers, pendant lefquels l'empereur joüoit deux perfonages: tantôt fouffrant qu'on l'accufat & qu'on lui fît des reproches en face, tantôt prenant fa défense, & traitant fes adverfaires de ca- 13 lomniateurs. Enfin le patriarche Veccus fatigué de ces infultes, réfolut au mois de Mars & à la mi carême de renoncer à fa dignité. Il en fit écrire l'acte par Pachymere & le prefenta à l'empereur, qui feignit de ne le pas recevoir : puis Veccus fe retira au monaftere dedié à la Vierge, fous le titre de Panachrante, c'eft-à-dire, Immaculée. Ainfi le fiége de C. P. demeura vacant; car l'empereur ne vouloit point le remplir d'un autre ; & même dans cet intervalle il envoya fon fils Andronic à Veccus, pour tâcher de l'adoucir.

XXVII.

Legats du pape

à C. P.

Alors arriverent les legats du pape Nicolas, favoir l'évêque de Groffetto & les trois freres Mineurs. Ils rencontrerent l'empereur comme il reve- < 14 noit d'Andrinople; & lui, voulant leur cacher la renonciation du patriarche, leur dit, qu'étant fatigué des travaux de fa charge, & voulant prendre quelque relâche, il étoit forti pour un tems du palais patriarcal; mais qu'ils confereroient avec lui dans quelqu'un des monafteres de C. P. Cependant il envoya dire au patriarche, qu'il quittât tout Tome XVIII,

Rr

reffentiment de ce qui s'étoit paffé, puisque c'étoit

AN. 1279. plûtôt pour s'accomoder au tems que de propos deliberé; & qu'il fe rendît au monaftere des Manganes pour y conferer avec les legats, sans rien témoigner du paffé. L'empereur ayant donné cet ordre entra avec les legats à C. P.

que

Or il favoit à quoi tendoit principalement leur legation: que l'union des églises ne devoit pas fe terminer à des paroles, mais paroître par les effets, en faifant la même confeffion de foi. Et les legats étoient encore excités à l'exiger par les Grecs divifés d'avec l'empereur, qui s'entretenant avec les freres Mandians meflés avec eux, difoient cette paix étoit une illufion; & qu'il falloit éprou ver les Grecs en voyant s'ils diroient le fymbole comme les Latins. Par là ces fchifmatiques croïoient jetter l'empereur dans un grand embarras: car s'il n'accordoit pas ce que les Latins demandoient, la paix feroit rompuë; & s'il accordoit au prejudice de fes promeffes, il feroit encore plus coupable, & les fchifmatiques fe fortifieroient dans le pretexte de refuser l'union avec des tranfgreffeurs manifeftes de leur parole.

L'empereur donc fçachant quelle étoit la charge des legats, vit bien qu'elle alarmeroit les Grecs, même ceux qui étoient alors paifibles, s'ils l'apprenoient tout d'un coup: c'eft pourquoi il affembla les évéques & le clergé, fans permettre aux laïques d'affister à cette affemblée, & leur dit: Vous favés avec quelle difficulté l'affaire de l'église a été ame

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