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Par une autre donnée quatre jours devant, le A N. 1290. pape déclare au même roi qu'il a fixé le tems du 12. 13. Ó6. paffage general à la Terre-fainte au jour de la faint Jean 1293. & regle les payemens de la decîme de fix ans qu'il lui avoit accordée. Nous avons vû que dés l'année 1284. le roi Edouard avoit déclaré au pape Martin IV. qu'il étoit refolu de fe Liv. LXXXIV. 11. croifer demandant les decîmes à certaines conditions, fur lefquelles le pape trouva de la difficulté. La negociation continua avec Honorius IV. & Nicolas IV. fous lequel Edouard se croisa effectivement l'an 1288. à Blanquefort en Gascogne. Chr. Trivet. 1o. 8 Le pape Nicolas regla donc avec les envoyez de ce Spi. p. 653. prince le tems du paffage & les conditions aufquelles

il recevroit la decîme,& Edouard les accepta, mais il est inutile d'en expliquer le détail, puisque le voyage ne fe fit point.

Le roi Philippe le Bel ne s'étoit point croifé, & Rain. 1290. n. 9. toutefois le pape Nicolas le regardant comme le prince le plus capable de fecourir la Terre fainte, lui envoïa Jean de Samois fon penitencier de l'ordre des freres Mineurs, pour le prier d'y envoyer promptement un fecours fuffifant de cavalerie & d'infanterie, principalement d'arbalêtriers, avec un nombre convenables de galeres; en un mot de' prendre fous fa garde la Terre-fainte, jufques au paffage general des croifez. Le roi prit l'avis de fon confeil, qui confiderant les affaires qu'il avoit fur les bras & l'état prefent des chofes, conclut que pour lors il ne devoit pas fe charger de la gar de de la Terre-fainte, puifque fi par malheur il y

AN. 1290.

III.

des Billettes.

Le blanc. Mon.p.

403.

977.

Labbe bibl. to. 1.

p. 663.

mefarivoit, on pourroit lui en imputer la faute. C'est que les gens fenfez voyoient bien que la perte de cette terre étoit inévitable.

&

Cette année arriva à Paris un miracle celebre Miracle du Juif fur l'euchariftie. Une pauvre femme avoit emprunté trente fols à un Juif, & lui avoit donné en gage fa meilleure robe. Les trente fols valoient Dubreuil Ant. p. la moitié d'un marc d'argent. La fête de Pâque approchant, la femme vint trouver le Juif & le pria de lui rendre fon habit pour ce feul jour, qui cette année étoit le fecond d'Avril. Le Juif lui dit: Dubois hift. p. 513. Si tu m'apportes ce pain que tu recevras à l'église, que vous autres Chrétiens appellez votre Dieu, je te rendrai ta robe pour toûjours & fans argent. La femme en convint; & ayant reçû la communion à faint Méri fa paroiffe, elle garda la fainte hoftie & la porta au Juif. Il la mit fur un coffre & la perça à coups de canif; mais il fut bien étonné d'en voir fortir du fang. Il y enfonça un clou à coups de marteau, & elle feigna encore. Il la jetta dans le feu, d'où elle fortit entiere voltigeant par la chambre; enfin il la jetta dans une chaudiere d'eau bouil lante; qui parut teinte de fang; & l'hoftie s'élevant au-dessus, la femme du Juif, qu'il avoit appellée, vit à la place J. C. en croix.

La maison où ceci se paffoit, étoit dans la ruë nommée alors des Jardins, à prefent des Billettes, à cause, comme l'on croit, de l'enseigne du Juif. Un de fes enfans étoit à la porte quand on fonna la grande meffe à fainte Croix de la Bretonnerie qui est tout proche; & voyant paffer

paffer quantité de gens, il leur demanda où ils alloient. Nous allons, dirent-ils, à l'église adorer nôtre Dieu : Vous perdés vôtre peine, dit l'enfant, mon pere vient de le tuer. Les autres mépriferent le difcours de l'enfant, mais une femme plus cu; rieuse entra dans la maison du Juif, fous pretexte de prendre du feu. Elle trouva l'Hoftie encore en l'air, la reçût dans un petit vaiffeau qu'elle portoit,& la remit au curé de faint Jean en Gréve, qui eft la paroiffe de cette rue. Elle lui raconta ce qui s'étoit paffé; & il en rendit compte à Simon de Bussi évêque de Paris, qui fit prendre le Juif & toute fa famille. Le coupable interrogé confessa tout ; & l'évêque l'ayant exhorté à se repentir & renoncer au Judaïfme, il demeura obftiné. C'est pourquoi il fut livré au prevôt de Paris, qui le condamna au feu, & le fit executer.

AN. 1290,

La femme & les enfans du Juif fe convertirent & reçûrent le baptême & la confirmation de la main de l'évêque. L'Hoftie miraculeuse fut gardée à faint Jean en Greve, où on la montre encore : & le peuple nomma la maison du Juif, la maifon des miracles: où quatre ans aprés Renier Flaming bourgeois de Paris fit bâtir à fes dépens une chapelle donnée enfuite aux freres hofpitaliers de la charité N. Dame. Ce miracle fut connu dans les pays étrangers, & Jean Villani auteur du tems le rapporte dans fon hiftoire de Florence. Renoul de Homblieres évêque de Paris étoit mort dés le douziéme de Novembre 1288. Entre autres liberalités qu'il fit à fon églife, il lui laissa Dubois.so.2.p. §12Tome XVIII.

Yyy

Lib. v11.c.136.

AN. 1290. trois cens livres parifis pour fonder l'office de la con ception de la Ste Vierge, ce qui fait croire qu'il a le premier établi cette fête dans l'église de Paris. Pour lui fucceder, le chapitre élût tout d'une voix un Italien nommé Adenulfe d'Anagni, qui avoit été prevôt de faint Omer, & chanoine de Paris, puis il s'étoit retiré à faint Victor. Son élection fut confirmée, mais il mourut avant que d'être facré. On élût donc évêque de Paris Simon Matifas, dit de Buffi du lieu de fa naiffance dans le Soiffonnois. Il fut premierement profeffeur en droit civil & canonique, puis juge en l'échiquier de Rouen, qui étoit le fouverain tribunal de Normandie. Il fut élû évêque en 1289. étant archidiacre de Rheims & chanoine de Paris ; dont il remplit le fiege pendant quinze ans.

Rain. n. 49. Va-ding. n. 3.

En Provence & dans les pays voifins, le com merce avec les Juifs avoit introduit chés les Chrétiens beaucoup de fuperftitions. Plufieurs dans leurs maladies & leurs autres peines tenoient des lampes & des chandelles allumées dans les fynagogues, & y faifoient des offrandes, pour obtenir la guerifon aux malades, l'heureufe navigation à ceux qui étoient fur mer, la delivrance aux femmes en travail, & la fecondité aux fteriles. Pour cet effet ils rendoient le même refpect que les Juifs au rouleau qui contient les cinq livres de la loi : ce qui paroiffoit aux autres Chrétiens une espece d'idolâtrie. Le pape voulant reprimer ces abus, écrivit aux freres Mineurs, qui exerçoient l'office de l'Inquifition dans les provinces d'Arles, d'Aix & d'Em

brun, d'en informer foigneufement,& de proceder contre les coupables, comme contre des idolâtres AN. 1290. ou des heretiques. La lettre eft du vingtiéme de Fé

vrier 1290.

XII. Apoftoliques

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La même année le pape Nicolas renouvella la condamnation de certains prétendus religieux qui condamnez. fe nommoient Apoftoliques. La bulle eft adreffée Rain. 1290. n. 51. à tous les évêques, & le pape parle ainfi : Le pa- sup. liv. Lxxxvià pe Gregoire X. condamna au concile de Lion tou- n. 48. tes les religions & les ordres Mandians, inventez aprés le concile general de Latran, qui n'ont point été confirmez par le faint fiege. Toutefois le pape Honorius IV. fut informé, qu'au mépris de cette défenfe quelques-uns avoient pris unnouvel habit sous le nom de l'ordre des apôtres, & se répandoient en differentes parties du monde, mandiant & menant une vie scandaleufe, quelquesuns même infectez d'herefies. Ceft pourquoi il voulut abolir entierement cette fecté, & vous ordonna de contraindre par cenfures tous ceux qui la profeffoient, & qui fe trouveroient dans vos diocéfes, à en quitter l'habit & de les exhorter à entrer dans quelque ordre approuvé, s'ils vouloient embraffer la vie religieufe. Que s'ils mépriforent les cenfures ecclefiaftiques, vous les puniffiez par prifon ou autrement, implorant même, s'il étoit befoin, le bras feculier, & que vous défendiffiez aux fideles de les recevoir ou de leur donner l'aumô ne. Nous avons cette conftitution du pape Honorius en datte du onzième Mars 1285. Le pape Conf. 1. Rain. Nicolas la confirme, & ajoûte : Nous vous ordon- 1286. m., 36.

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Bullar. Honer.

IV.

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