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mais ayant appris la mort de ce prince, il en ajoûta AN. 1291. une pour l'empereur Rodolfe, où il témoigne la crainte qu'il a que ce royaume foit troublé par les Tartares, les Sarrafins, les Payens & les heretiques dont il eft rempli, au grand préjudice de la religion. C'eft pourquoi il prie l'empereur d'accorder sa protection au legat. La lettre est du neuviéme de Septembre 1290. Au commencement de Rain, 1290. n. 45 l'année suivante il y envoya Jean évêque d'Iefi 46.6%, pour s'informer des circonftances de la mort du roi Ladiflas; savoir s'il s'étoit repenti de ses crimes, & s'il étoit mort en vrai Chrétien. De plus il avoit ordre de déclarer à l'empereur Rodolfe & à fon fils Albert duc d'Autriche, que le royaume de Hongrie appartenoit au pape & à l'église Romaine; avec proteftation que perfonne de quelque dignité ou condition qu'il fût, n'entreprit de s'y attribuer aucun droit ou y caufer aucun dommage. La lettre eft du fecond de Janvier 1291. C'est que Rodolfe avoit invefti fon fils Albert de ce royaume, comme d'un fief devolu à l'empire. Au refte cette prétention du pape n'étoit pas nouvelle, & plus de deux ans auparavant Gregoire VII. l'avoit foûtenuë comme un droit incon- sup. liv. LX111.

teftable.

n. II.

XV.
Lettres du pape au

Eftienne roi de Servie & la reine Helene fon épouse envoyerent au pape Nicolas, Marin archi- roi de Servic. diacre d'Antivari, qui demanda de la part du roi des perfonnes capables d'inftruire & de rame- Rain. n. 43° ner au sein de l'église les heretiques de la Bossine, qui étoient en grand nombre, & qui s'effor

Tome XVIII.

Zzz

AN. 1291.

n. 40.

7. 38. 39.

32.42.

çoient par leurs difcours féduifans d'alterer la for catholique. Le roi demandoit des missionnaires qui fçuffent la langue du pays, & dont la vie exemplaire pût édifier les peuples. Sur quoi le pape manda au provincial des freres Mineurs en Efclavonie de choifir deux freres de l'ordre, tels que le roi les defircit, pour les envoyer dans la Boffine; & il en donna avis au roi, lui recommandant ces deux religieux par fa lettre du vingt-troime de Mars 1290.

La reine Helene fit dire au pape par le même archidiacre d'Antivari, qu'elle fe propofoit d'avoir l'efté fuivant une conference avec George: empereur des Bulgares, pour le ramener à la foi catholique & à l'obéiffance de l'église Romaine. C'est pourquoi elle prioit le pape d'écrire à ce prince; ce qu'il accorda volontiers, & exhorta la reine à poursuivre courageusement fa pieuse entreprise. Le pape n'écrivit pas feulement à l'empereur des Bulgares; mais encore à leur archevêque, l'exhortant de travailler à la réunion du roi & de toute la nation; mais il ne connoiffoit pas la perfonne de ce prélat, puifqu'il témoigne douter s'il étoit le même qu'il avoit vû autrefois à C. P. Toutes ces lettres font de la même datte, c'eft-à-dire, du vingt-troifiéme de Mars.

La reine Helene & l'archevêque d'Antivari écrivirent aussi au pape, qu'une ville d'Albanie nommée Sava, aprés avoir été long-tems ruinée, s'étoit rétablie de nouveau, & que le peuple qui y étoit catholique ayant inftamment demandé un évêque,

AN. 1291.

le clergé de la ville avoit élû un prêtre nommé
Pierre, & avoit demandé à l'archevêque de con-
firmer l'élection, mais il n'avoit point voulu l'ac-
corder fans la permiffion du pape. Le pape ré-
pondit: Si aprés l'information convenable, vous
trouvez l'élection canonique & la perfonne capa-
ble, nous vous mandons de la confirmer, de l'avis
du prieur des freres Précheurs, & du gardien des
freres Mineurs de Ragufe, & de facrer ensuite l'élû.
La lettre eft du onzième de Juin 1291. La ville de Baudrand.
Sava doit être la Sappe en Albanie,à present ruinée.

X V I. Prife d'Acre & perte de la Terrefainte. J. Villani VII. 6.

138.

s. Anton. hift. 3.231.

La prife d'Acre & la ruine des Chrétiens à la Terre-fainte, donnerent bien-tôt au pape des affaires plus preffantes. Depuis la perte d'Antioche, de Tripoli, de Tyr & des autres villes que les Chrétiens latins avoient en Syrie, comme ils se trouverent reduits à la feule ville d'Acre, elle augmenta confiderablement en peuple & en puiffance. Le roi de Jerufalem, le roi de Chipre; le prince d'Antioche, le compte de Tyr & celui de Tripoli, les Templiers & les Hofpitaliers, les legats du pape, & les croifez entretenus par les rois de France & d'Angleterre, tous y faifoient leur residence; enforte qu'il se trouvoit jusques à dix-fept tribunaux qui condamnoient à mort, indépendans les uns des autres ce qui caufoit une grande confufion. Depuis que le roi Henri eut M Victorin. fait tréve avec Kelaoun Elalfi fultan d'Egypte, il vint à Acre environ feize cens hommes, tant pelerins que foudoyers, qui fe difoient envoyez de la part du ils prétendirent n'être point obli

pape;

,

22.974

A N. 129 1. gés à la tréve faite fans eux, & n'écoutant point de raifon, ils fe mirent à piller & tuer tous les Mufulmans, qui fur la foi du traité apportoient à Acre des vivres & d'autres marchandises. Ils sortirent même enfeignes déployées, car les habitans d'Acre ne pouvoient les retenir fans grand danger; & ils firent des courses aux environs, pillant & tuant les habitans de plufieurs villages.

Le fultan l'ayant appris envoya fes ambassadeurs à ceux qui commandoient dans la ville, demander la réparation de ces dommages, & qu'on lui envoyât prifonniers quelques-uns des infracteurs de la tréve pour en faire juftice. Les habitans d'Acre furent partagez fur la réponse qu'ils devoient faire ; & quelques-uns foûtinrent, que fuivant une coûtume immémoriale on n'étoit plus obligé à tenir les tréves avec les infideles, quand quelqu'un des plus grands princes de deça la mer jugeoit à propos de les rompre. Or, ajoûtoient-ils, ceux dont il s'agit font venus de la part du pape chef de toute la Chrétienté. On envoya donc feulement faire au fultan des excufes, dont il ne fut Sanut p. 230. pas fatisfait. C'eft pourquoi il vint avec une puif fante armée au mois d'Octobre 1290. à deffein d'exterminer ce qui reftoit de Chrétiens latins en Syrie; mais il mourut en chemin, & fon fils Calil autrement Melecferaf lui fucceda. Celui-ci pourfuivant le deffein de fon pere, vint mettre le siege devant Acre le cinquième d'Avril 1291.. avec une armée de cent foixante mille hommes & foixante mille chevaux. Henri roi de Chi

pre

& de Jerufalem, vint au fecours le quatriéme AN. 1291. de Mai avec deux cens chevaliers & cinq cens hom- p. 231. mes de pied; les infideles cependant pouffoient toûjours leurs attaques; & enfin le vendredi dix-huitiéme du même mois ils donnerent un affaut fi violent, qu'ils entrerent dans la ville & s'en rendirent maîtres.

Les troupes des affiegez étoient commandées par le maître du Temple, qui s'avança pour repouffer les ennemis, & fut tué en combattant vaillamment ; la plupart des Chrétiens se retirerent vers la mer qu'ils avoient libre, & quelquesuns fe refugierent dans le Temple. Le roi Henri Nang chr. 1290. s'embarqua la nuit & s'enfuit honteusement avec ceux qu'il avoit amenez & trois mille autres. Le patriarche Nicolas, qui avoit fortement exhorté les affiegez à la défense, fut tiré malgré lui par les fiens à une chaloupe, pour gagner une galere qui étoit proche ; mais il reçût charitablement tant de monde dans fa chaloupe qu'elle coula à fonds. Ainfi mourut le dernier patriarche latin de Jerusalem, qui ait refidé dans le pays: car Papebr. to. 14. ceux à qui les papes ont donné ce fiege, de tems Pralim. n. 272. en tems, n'en ont eu que le titre feul. Il y avoit Antonin. 1o. 3.

dans Acre un monaftere fameux de filles de fain- 781. te Claire, dont l'abbeffe apprenant que les Sarra- Vading. 1291.n.I. frns étoient dans la ville, affembla toutes les fœurs en chapitre, & leur dit: Mes filles méprifons cette vie pour nous conferver à nôtre époux,· pures de corps & de cœur, faites ce que vous me verrez faire. Auffi-tôt elle fe coupa le nez & fon Zzz iij

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