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AN. 1266. commençoit la lecture, il s'enfuit plus vîte qu'il ne convenoit ; puis les commiffaires l'ayant retenu de force, il enfonça fon bonnet des deux côtés, pour fe boucher les oreilles. Enfin il s'écria prenant à temoins le ciel & la terre du traitement: qu'on lui faisoit; & loin d'écouter ce que difoient les commiffaires, il les auroit renvoyez fans réponse, s'ils ne l'avoient menacé de la punition divine. J'ai donc tenu, dit-il, une conduite bien digne d'un patriarche en machinant la mort de l'empereur, moi qui dans cet exil prie Dieu d'avoir pitié de fon ame, tandis qu'il me fait perir de faim & de foif. Il ajoûta plufieurs reproches mêlés d'imprecations contre l'empereur & le patriarche Germain, & renvoya ainfi les deputez.

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Ducang. nu. mém. n. 78.

Ils arriverent à C. P. le feizième jour d'Août, & s'adrefferent d'abord au patriarche Germain. Aprés lui avoir raconté ce qui s'étoit paffé, ils le prierent instamment d'en retrancher tout ce qu'il y avoit: de désagreable dans le rapport qu'il en feroit à l'empereur. Germain l'executa fi bien, que l'empereur reçût la juftification d'Arfene; & dit: S'il a fu quelque chofe de la conjuration, il aura voulu en detourner les conjurés, & garder le filence plûtôt que de nous les denoncer. D'ailleurs l'empereur. fut touché des fouffrances d'Arfene; & lui affigna auffi-tôt une penfion annuelle de trois cens fols d'or: affurant avec ferment qu'il l'avoit ordonnée dés auparavant, & qu'Arfene n'avoit pas voulu la: recevoir. Et afin qu'il n'en fît plus de difficulté à cause de l'excommunication de l'empereur, il lui.

A

envoïa la penfion au nom de l'imperatrice. En quoi Paleologue n'agiffoit pas tant pour le foulagement d'Arfene, que pour fe preparer l'abfolution qu'il vouloit obtenir à quelque prix que ce fût.

AN. 1266.

Il eut bien voulu être abfous par le patriarche 17: Germain & par tout le concile; mais il craignoit que l'abfolution de Germain ne parût pas valable, à caufe du mépris que le peuple avoit pour ce prélat, comme aïant été transferé de son siége contre les regles. Celui qui donnoit à l'empereur ces défiances, étoit Joseph abbé du monaftere de p.1737 Galesion, qui s'étoit feparé de Germain à cause de l'irregularité de fa tranflation. L'empereur donc entraîné par l'autorité de cet abbé, résolut d'ôter Germain du fiége patriarcal: mais le prélat ne paroiffoit pas difpofé à quitter de lui-même, s'inquiettant peu de ce qu'on difoit de lui. C'est pourquoi l'empereur voulut lui en faire parler, fans toute fois paroître y avoir aucune part : & Joseph fe chargea de la commission.Il dit donc à Germain, comme lui parlant en ami : Ne voïés-vous pas le trouble qui s'eft élevé contre vous, & auquel vous ne pourrés resister, quand même l'empereur vous foutiendroit ? mais il vous abandonnera lorsqu'il verra la grandeur du schisme. Ne voïés-vous pas le puissant parti de tels & tels? lui nommant plufieurs perfonnes de grand crédit declarées pour Arfene, entre-autres Marthe religeufe fœur de l'empereur. Hâtez-vous de quitter cette dignité de bonne grace, plûtôt que d'attendre à le faire hon

c. 18.

c. 19:

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AN. 1266. teusement malgré vous. Mais Germain ne fur point touché de ce confeil, fe tenant affuré de l'affection de l'empereur, qui pour le mieux tromper lui en donnoit de nouvelles marques jufques là que le dimanche des Rameaux, il lui envoïa quantité de monoïe d'argent & de cuivre pour jetter au peuple pendant la proceffion, suivant la

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Coutume..

:.

L'empereur ufant enfuite d'un artifice plus caPachim. v. c.20. ché, fit écrire à Germain par Chalazas métropolitain de Sardis, déclaré contre Arfene, qui avoit rejetté fon ordination comme illegitime. Il écrivit donc à Germain, lui conseillant de quitter le fiége patriarcal, & Germain envoïa la lettre à l'empereur, commençant à s'en defier. L'empereur lui fit reponfe: Je fuis affés occupé des affaires de l'état qui m'accablent: vous avez entre les mains Chalazas pour le punir felon les canons, faites-en ce que vous jugerés à propos avec les évêques: je ne m'en veux point mêler. Alors Germain ouvrit les yeux, & voïant la mauvaise volonté de l'empereur, il réfolut de quitter. C'étoit au mois de Septembre 1266. & à l'Exaltation de la fainte croixjaprés avoir officié follemnellement il fe Gregoras. iv.c.8. retira le foir même, au logement qu'il avoit à C. P. prés l'Arfenal. Dés le matin l'empereur l'aïant apris y vint avec le fenat, les évêques & tout le clergé; & faifant bien l'affligé, il le pria de revenir, le menaça de l'y contraindre, & n'obmit. rien pour bien jouer fon perfonage. Germain diffimulant de fon côté, témoigna à l'empereur une

C.21.

grande reconoiffance: ajoûtant qu'il fe fentoit confumé de vieilleffe & d'infirmité, & qu'il étoit prêt à donner par écrit & de bon cœur fa renonciation au fiége de C. P. priant l'empereur & les évêques prefens de la recevoir. En même tems il la donna, affurant que quoi qu'il arrivât il ne reprendroit jamais fa dignité, quand même l'empereur l'y voudroit contraindre.

Alors l'empereur aïant entre les mains ce qu'il défiroit ceffa de le preffer; feignant que c'étoit par defefpoir d'y reuffir, & réfolut de lui rendre tous les honneurs poffibles. Premierement il le pria de dire fon avis touchant le choix de fon fucceffeur: puis il lui donna le titre de fon pere, & en parlant, & par écrit, comme Germain lui avoit don né le premier le titre de nouveau Conftantin, que porterent depuis les empereurs de C. P. A ces propofitions de l'empereur, Germain répondit: Dieu pourvoira d'un digne pasteur à son église & l'aidera dans fon miniftere. C'eft auffi à ce pasteur choifi de Dieu que convient le titre magnifique de pere de l'empereur. Quant à ma fubfiftance, j'en laiffe le foin à celui qui nourrit les petits des corbeaux; & d'ailleurs mon église est affés riche pour me nourrir avec fon évêque. Il entendoit l'églife d'Andrinople, où il avoit fait mettre en la quittant fon neveu nommé Barlaam ou Bafile, homme peu appliqué à fes fonctions spirituelles, mais aimant la parure, les chevaux & les armes : qui fut dépofé en concile aprés la mort de fon oncle.

AN. 1266.

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AN. 1266.

XLVII.

Iofeph patr.

de C. P.

Pachym. IV.c.23.

Gregor. IV.c.S.

P. 223.

Quand Germain fe fut retiré l'empereur Michel Paleologue délibera avec les évêques fur le choix d'un patriarche, comme s'il n'eût point encore pris fon parti. Ceux donc qui ne favoient pas l'état des choses propoferent divers fujets, mais ceux qui penetroient l'intention du prince n'en nommerent point d'autre que Jofeph abbé de Galesion. C'étoit un homme venerable par fes cheveux blancs, vertueux & bien inftruit de la vie fpirituelle, dont il avoit long-tems pratiqué les exercices dans le repos du monaftere. Il ignoroit ab-. folument les sciences profanes, & étoit naturellement simple & facile, mais non fans politesse. Car autrefois étant marié il avoit été à la cour, ferDucange famil. Vant en qualité de lecteur dans le clergé de la princeffe Irene, foeur du jeune empereur Jean Lafcaris. Il étoit liberal & communicatif; & nonobstant l'aufterité de la vie monaftique qu'il pratiquoit depuis long-tems, il étoit guai, agreable en converfation, & donnoit volontiers à manger, principalement à ceux qui en avoient befoin, tenant même une table délicate. Il fut élû le vingthuitiéme de Decembre l'an 6775. felon les Grecs, commencé au mois de Septembre precédent, avec l'indiction dixiéme felon nous l'an 1266. & il fut facré le premier jour de Janvier fuivant 1267. felon les Grecs la même année 6775. Jofeph devoit Pech. c. 24. être ordonné par Pinacas archevêque d'Heraclée en Thrace, fuivant l'ancien privilege de cette églife; mais comme ce prélat avoit été ordonné par Germain, Jofeph ne voulût pas l'être de fa

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