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Sageffe,

quelque jaloux qu'il fût de fon autorité, il lui abandonnoit entiérement la conduite des affaires.

IL AVOIT grande raison d'en pruden- ufer ainfi. Y eut-il jamais chez auce,gravité du Sé-cun peuple un Sénat comme celui nat Ro- de Rome, (je parle des bons tems

main,

de la République) où les affaires fuffent traitées plus mûrement, ou avec une prévoiance plus éclairée, ou avec un plus grand zêle pour le bien public? Le Saint-Efprit n'a pas dédaigné, comme le remarque Mr. Boffuet dans fon Difcours fur l'Hiftoire univerfelle, de louer dans 1. Mac-le Livre des Maccabées la haute cab. VIII. prudence & les confeils vigoureux de cette fage Compagnie, où perfonne ne fe donnoit de l'autorité que par la raifon, & dont tous les membres confpiroient à l'utilité publique fans partialité & fans ja

loufie.

Une forte d'éblouiffement paffager avoit fait oublier à la plupart

part des Sénateurs les anciennes maximes dans une affaire importante. Rome & Pyrrhus étoient prefque d'accord d'un Traité de paix qui auroit fait peu d'honneur à la République. Appius Claudius, tout aveugle & infirme qu'il étoit,fe fait porter en chaise dans le Sénat,. diffipe en un moment tous les nuages qui avoient aveuglé cette, fage Compagnie, & fait rompre le Trai té qui étoit prêt de se conclure.

Tout le monde fait la célébre réponse de Cinéas à Pyrrhus, qui lui avoit demandé ce qu'il penfoit du Sénat Romain. Il lui dit qu'en voiant cet augufte Corps, il avoit cru voir une affemblée de Rois,. tant il paroiffoit de dignité, de grandeur, & de majefté dans leur maintien, dans leurs difcours, & dans; toute leur perfonne.

Fabricius foutint dignement cette: idée dans la converfation qu'il eut: avec le même Pyrrhus, où le Ro»65 main,

veilleusement un fi haut perfonnage par leur conduite & par leurs fentimens. Car leur grandeur n'étoit point appliquée fur leur fortune : elle avoit racine en eux, elle tenoit à leur efprit & à leur cœur.

Voila ce qu'étoit le Sénat. C'eft à lui que Rome devoit toute fa puiffance & toutes les conquêtes.. Outre que c'étoit de fon fein qu'on tiroit tous les Généraux & tous les Commandans, c'étoit là que fe formoient les grandes entreprises, que fe prenoient les généreuses réfolutions, que fe traitoient les importantes affaires de l'Etat avec un fecret & une fageffe qu'on a peine à Liv. lib. comprendre. Une délibération au 42. cap. fujet de Perfée dernier Roi de Macédoine, tenue dans une Compagnie de trois cens hommes, demeura fecrette pendant quatre ans entiers, & l'on ne fut ce qui s'y étoit paflé que lorfque la guerre fut achevée.

34.

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Quelle

Quelle reffource pour une nation, fi l'on en connoiffoit l'avantage, qu'un Conseil toujours subsistant, où, par une tradition vivante, fe confervent fans altération & fans dépériffement les anciennes maximes & l'efprit, pour ainfi parler, de l'Etat ! C'eft la plus jufte idée qu'on fe puiffe former du Sénat de Rome. Quand a à la place des Rois, dont le pouvoir defpotique, fous le dernier Tarquin, étoit devenu infupportable, on eut créé des Ma giftrats annuels, le Sénat fut regardé dès lors comme le Confeil public & perpétuel de la République, & comme devant être le gar

dien

a Cùm regum po- nis auctoritate uti mateftatem non tuliffent giratus, & quafi mini, (majores noftri,) ita ftros grayiffimi confimagiftratus annuos cre- lii effe voluerunt: Seaverunt, ut confilium natum autem ipsum Senatus reipublicæ proximorum ordinum proponerent fempiter- fplendore confirmari, num.... Senatum reip. plebis libertatem & cuftodem, præfidem, commoda tueri atque propugnatorem collo. augere voluerunt, Cic. caverunt. Hujus ordi- pro Sext, n. 137.

1

Maximes

mes lou

dès le

dien des Loix, l'ame des délibérations, le défenfeur de la liberté & des intérêts du Peuple. L'autorité, à proprement parler, du moins celle qui vient de la prudence & de la fageffe, réfidoit dans cet auguste Corps. Elle paffoit de là, & étoit communiquée aux Magistrats, qui en étoient comme les miniftres; & les autres Ordres de la République contribuoient à relever le mérite & la gloire du Sénat. En un mot, il étoit le fidéle dépofitaire des principes de politique de l'Etat..

ON VERRA dès les commen& coutu- cemens, comme je l'ai déja obserables évé, un plan de gouvernement fortablies mé fous les Rois mêmes, & fortifié enfuite fous les Confuls, dont jamais Rome ne s'écarta: je parle des grands principes de politique.

com

mence

ment.

tion con.

Atten- Lorfque le menu peuple fut détinuelle chargé de tout impôt, le Sénat, en

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