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meurons en Dieu, & Dieu en nous , qui nous unit parfaitement à Dieu par un amour reciproque & d'amitié, & qui nous y uniroit éternellement fi nous ne nous en féparions par notre propre volonté : mais qu'il en eft feulement la préparation prochaine ; puifque cet amour n'opere encore que le defir fouverain de la charité & de l'amitié de Dieu qui n'induit pas par lui-même la justice, mais qui met feulement l'ame en état de la recevoir par une acceptation volontaire & libre de la grace & des dons par lefquels nous devenons juftes & amis de Dieu; puifqu'en un mot ce n'eft encore que le mouvement & l'impulfion du Saint Efprit vers la juftice, & non l'habitation du Saint Efprit dans l'ame, & la poffeffion de la juftice.

Confondre donc cet acte formé de la charité commencée,

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M. de

190.5.19.

ou cette charité actuelle for- Lett. de M. mée, avec la charité habitante de Sens & juftifiante, comme fait M. Troyes, l'Archevêque de Sens, c'eft 185.186. confondre le mouvement avec le terme le commencement avec la perfection, le defir avec la poffeffion. C'eft ne pas entendre, ou plûtôt ne vouloir pas entendre les chofes les plus fimples, ni démêler les notions les plus diftinctes: c'eft brouiller toute l'Ecriture & toute la Tradition, & tomber dans une erreur dangereufe; parce que, comme nous le remarquerons tout à l'heure, il n'y a plus d'apparence qu'on puiffe éxiger cette charité commencée comme une

difpofition neceffaire pour être juftifié dans le Sacrement de Penitence lorfqu'on la prend

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186. 190.

pour la juftice parfaite.
Mais comparer cet acte for-

Ibid. p. mé de la charité commencée
191. avec l'acte formé de cupidité, &
conclure de ce que celui ci ne
laifle pas fubfifter la juftice dans
le cœur, que l'autre ne peut
fubfifter fans la grace de la
juftification; ajouter à cette
comparaison l'excellence de la
charité qui a par fa nature & par
elle-même la force de nous unir
à Dieu, & la bonté de Dieu
qui eft plus prompte à pardon-
ner qu'à punir, c'eft s'appuyer
fur de foibles objections que
M. de Meaux anéantit d'un
feul mot: c'eft oublier
que Dieu
pour conferer la juftice, a éta-
bli un Sacrement necessaire de
neceffité de moyen, & attri-
buer à la charité commencée,
la prérogative de la charité par-
faite contre les Decrets du Con-
cile de Trente.

L'acte formé de cupidité eft un confentement plein & parfait à préferer la créature à Dieu, & par conféquent un peché mortel par lequel en abandonnant Dieu, on mérite d'en être abandonné ; en irritant le S. Efprit, on mérite qu'il fe retire, & qu'il livre l'ame à elle-même, à fon amour propre, à fes tenebres & à fes paffions. L'acte formé de la charité commencée eft auffi un confentement plein & abfo

lu à recevoir le Saint Ef-Conc. Trid. prit dans son cœur, par lequel ch. 7. & 8. on veut préférablement à tout, cette juftice qui n'eft autre que Dieu même habitant en nous, poffedant & gouvernant notre ame. Mais parce que Dieu eft fouverainement libre dans fes dons, que la grace de la juftification eft entierement gratui

te, & que tout ce qui la préce de & y prépare ne peut la mériter d'un mérite proprement dit, il n'y a nulle conféquence qu'on la reçoive auffi-tôt qu'on la defire, & qu'on la préfere à tout. On eft feulement disposé à la recevoir.Mais il faut voir quand & comment il a plû à Dieu de la donner. Or nous fçavons que c'eft au Sacrement que Dieu l'a attachée. Et le Concile de Trente nous apprend à concilier la force de la charité, la bonté de Dieu, & la vertu du Sacrement, de telle forte que Dieu accorde la grace de la juftification à la charité commencée par le Sacrement actuellement reçû, & qu'il a réservé à la charité parfaite le privilege de reconcilier fur le champ l'homme avec Dieu, non toutefois fans le vœu du Sacrement.

II.

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