On me répondra fans doute qu'une chofe eft implicitement contenue dans un acte, lorfque, par exemple,à la queftion qu'on nous feroit, fi dans la volonté d'accomplir les Commmandemens, nous entendons auffi renfermer l'amour de Dieu, nous répondons fans héfiter que nous le voulons de tout notre cœur.Car c'est en ce fens, qu'on explique ordinairement ce terme d'implicite; & c'est en ce sens, que tous les Philofophes & tous les Théologiens reconnoiffent que l'amour de la béatitude eft au moins implicitement renfermé dans tous nos actes; parce que fi l'on nous: demande ce que nous voulons dans chacune de nos actions en particulier, nous répondons fans balancer que nous voulons être heureux, & que nous ne voulons autre chofe.

Donnons encore, fi vous voulez,une autre exemple de ceci,& plus familier & plus fenfible. Vous partez pour Rome, & quoi-qu'à chaque pas vous ne penfiez pas à Rome par un acte exprès, il eft cependant très-certain qu'implicitement c'est à Rome que vous voulez aller ; puifque,fi l'on vous demande où vous allez, vous répondrez conftamment que vous allez à Rome. Ce qu'on veut donc implicitement, on le veut très-abfolument & très-réellement, quoiqu'on n'exprime pas toujours cette volonté par un acte formel & refléchi; & par conféquent c'est ainsi qu'il fau droit expliquer ce qu'on dit, que dans la Pénitence eft implicitement renfermée la volonté d'aimer Dieu, l'entendant en ce fenis, qu'on le veut en effet fou verainement & de tout le cœur,

quoiqu'on n'exprime pas toujours cette volonté, & quoiqu'on n'en faffe même aucun acte exprès & réfléchi; & ceci bien entendu fuffiroit peut-être.

Mais fi c'eft ainfi qu'on l'entend, & fi vous voulez en effet accomplir ce premier précepte, de telle forte que vous foyez toujours prêt de répondre à quiconque vous demandera fi vous le voulez, que vous le voulez en effet; pourquoi les Miniftres de la Pénitence fe feroient-ils une peine de le demander ? Pourquoi le pénitent feindroit - il de fe le demander à lui-même ? Craindra-t-il de produire au-dehors le fentiment qu'il a déja conçu dans fon cœur? UnChrétien peut-il ne pas fe réjouir, quand on lui parle de l'obligation d'aimer Jefus Chrift? Et fon cœur peut-il être affez éloigné

de lui pour ne pas faire au moins quelque effort pour l'aimer, quand on l'y excite ? Et celui que vous trouveriez dans cette

difpofition, oferiez-vous lui donner le nom de Pénitent ou même de Chrétien? A Dieu ne plaife: Miniftres de la réconciliation & de la charité de notre Dieu, pourquoi vous taisez-vous donc? Et pourquoi vous difpenfez-vous de faire fentir la neceffité de l'ai mer? Oh fans doute! Ils craignent que ce pénitent n'aime trop tôt le Dieu de fon cœur, & que fa juftification trop prompte ayant prévenu le Sacrement, il ne demeure inutile & fans effet: car c'est là tout ce qu'ils ont રે nous dire ; & je ne fçai s'il nous faut encore quelque chofe de plus, je ne dirai pas feulement pour fermer la bouche, mais pour confondre à jamais tous ces

raifonneurs, qui fur une matiere de cette importance, n'ont à nous donner que des réponses fi fri

voles & fi vaines.

Mais peut-être cet amour implicite l'entendent-ils d'une autre maniere, & peut-être l'expliquent-ils dans le même fens qu'on explique la foi des anciens juftes qui croyoient en JesusChrift d'une maniere implicite, & fans le connoître ; parce que cette foi fe trouvoit implicitement dans celle qu'ils avoient en Dieu comme rémunerateur & plein de mifericorde ; ce qui réduiroit alors tout leur raifonnement à prétendre qu'unChrétien & qu'un Pénitent qui fait profeffion du defir de fe rétablir dans l'amitié de Dieu, n'eft pas cependant plus obligé de penser à l'aimer, que les anciens juftes de penfer à Jefus-Chrift qu'ils ne connoiffoient pas encore.