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Ces Eaux, dont le cristal recevoit ton image,
Dont les bords préfentoient le fommeil à tes fens,
Ces Echos tant de fois réjouis de tes chants,
Ces Prez où tu danfois, cette aimable Fontaine,
Tout nous redemandoit la charmante Erixene.

Mais dis-moy ce qui peut te rendre à nos defirs?
ERIXEN E.

La liberté, la paix, le goût des vrais plaifirs.

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Mais lorfque par fes dons la Nymphe Galatée
Te tira de nos bois, tu parus fi flatée,

Car tu devois la fuivre en un lieu plein d'apas.
ERIXEN E.

J'ay fuivy Galatée, & ne m'en repens pas.

IPHISE

Mais ce lieu fi charmant, c'étoit la Cour, je penfe.

ERIXEN E.

C'eft ainfi qu'on l'apelle.

IPHISE.

Où la magnificence,

L'or, & les diamans brillent de toutes parts.

ERIXEN E.

Ce fpectacle a bientôt épuifé les regards.

IPHISE.

Mais tant d'autres plaifirs que ce féjour aprête,
Car tous les jours, fans doute, y font des jours de fête
ERIXEN E.

Tu crois donc qu'à la Cour habite le plaifir.

IPHISE.

Eh! que feroient de mieux des gens pleins de loifir,
Au comble de l'honneur, au fein de la richeffe ?

ERIXENE

Non, mille & mille foins les devorent fans ceffe.
La Cour n'a des plaifirs que l'éclat & le bruit.
Tout le jour on s'agite, on ne dort point la nuit.
Ces plaisirs, préparez avec tant de dépense,
Sont à leurs fpectateurs bien moins doux qu'on ne penfe
Tel gemit en fecret, qui montre un front joyeux;
Car le trouble du cœur n'ofe paffer aux yeux ?
Tel fourit à l'objet dont l'aspect feul le bleffe,
Contrainte, dont le poids ajoute à leur trifteffe.
Aj

IP HISE.

Pourquoy cacher l'ennuy dont on eft tourmenté ?
ERIXEN E.

Iphife, ainfi le veut une Divinité,

Dont le culte eft bizare, & les loix font pefantes.
IPHISE.

Quoy! Pomone, Ceres, Déeffes bienfaifantes,

Nos Dieux, Pan, Apollon; n'y font pas

adorez?

ERIXEN EL : mion 2 oup ! NI

On reçoit leurs préfens, leurs noms font ignorez..
Mais la Divinité, qui dans ces lieux habite,
Chaque jour implorée, & chaque jour maudite,
Eft un monftre fans yeux, vray tyran des humains, I
Qui toûjours par caprice ouvre & ferme fes mains,
Qui forme en un moment, & détruit les ouvrages,
Qui careffe les foux, qui fe moque des fages,-
Qui donne des defirs, allume des fureurs,

́Et d'une noire envie empoisonne les cœurs
On l'apelle Fortune; & fous ce joug fervile
Penfes-tu que l'on goute un fommeil bien tranquile?

IPHISE.

On dort mieux quand on n'a que le foin des troupeaux ;
Pour nous eft le fommeil: le murmure des eaux,
Ou le gémissement de quelque Tourterelle,
Bien loin de le troubler, l'amene, ou le rapelle.
Mais auffi la Fortune a t'elle tous les vœux à
De l'Amour en ce lieu méprife-t'on les feux M
ERIXEN E. So,

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On pare de ce nom quelques desirs frivoles, I Un commerce indifcret de regards, de paroles,

Un lien qui fe noue & se brise en un jourjob r

Iphife à ton avis eft-ce-là de l'Amour pikai org

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Ah! de quelque dépit ton ame eft poffedées àlast) Car enfin de la Cour j'ay toure une autre idée : li Ce que tu m'en as dit m'étonne, & franchements E Sur ce que j'en ay vu, j'en raisonne autrement.

ERIXENE

Eh! qu'en as tu donc vûr

IPHISE,

Moy! j'en ay vû le Maîtres

Ecoute, & mon recit t'étonnera peut-être.

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J'étois affile aux pieds de cet orme, où Daphnis Ecrivit tant de fois le nom de Coronis,

1

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Mes troupeaux un peu loin paiffoient dans la prairie
J'aperçus tout-d-coup des hommes, des chevaux,

Mais des chevaux fifiers, & des hommes fi beaux: 1
Nous voilà, difoient-ils, égarez de la chasse.
L'un d'entr'eux, c'est le Prince, & luy feul les efface.
L'air done its luy parloient ne me l'aprit pas mieux, J
Qu'un éclat tout divin, qui brilloir dans fes yeux. U
Bergere, indiquez-moy, dit-il, quelque fontaine.
Auffi-tôt je le guide à la fource prochaine.

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C'est là que je le vis, tour comme jeste vois, it
Il me regarda même, & me parla deux foist

Je tremblois, mais à tort ; il eft la douceur même.
Oh! qu'heureufe cent fois eft la Nimphe qu'il aime!?
Il n'étoit point couvert d'or, & de diamans
Il n'a pas, felon moy, grand befoin d'ornemens.
Peut-être les Heros en négligene l'ufage.
La fatigue animoit l'éclat de fon visage,

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