LYCAS.
Depuis qu'il m'a trompé.
? Quelle chaîne rompue
Quelle infidelité t'itrite contre lui
Si j'accuse l'Amour, ce n'eft pas d'aujourd'hui.
Ce n'eft pas d'aujourd'hui, que je me plains des Belles
Je t'ai vu quelquefois fi content auprès d'elles. Peut-être leurs faveurs ont affoupi tes feux.
L'Amour à d'autres cœurs aprend l'art d'être heureux,
Cet art. n'eft pas pour moi.
Tu voudrois, que je pense,
Sous de belles couleurs cacher ton inconftance.
Tu ne parois pas fait pour aimer fans retour.
Je te parle, Berger, fans feinte, & fans détour.
Tu n'as fait que languir dans les chaînes de Flore. LYCAS.
Non. Flore pour aimer étoit trop jeune encore. De fes charmes naiffans ignorant le pouvoir, Flore toucha mon cœur,prefque fans le vouloir. Des louanges, des foins, un air de complaifance, L'habitude, le tems m'aquit fa confiance,
Et les noms hazardez de Maîtreffe, d'Amant, Au lieu de l'offenfer, flatoient fon enjoüment. La Joye & le Plaifir rioient fur fon vilage. En faveur de mes feux j'expliquois ce préfage. Mais quand j'ai dans fon cœur cherché des fentimens, Qu'ai-je trouvé ? Le goût des vains amusemens: C'étoient là mes Rivaux. Ma tendreffe inquiéte Vouloit s'en expliquer; mais Flore plus diftraite Ne prenoit mes difcours que pour un noir chagrin. Mes foupirs, & mes pleurs l'ennuyerent enfin. Peut-être que les ans inftruiront cette Belle
A fentir mieux le prix d'un cœur tendre & fidelle. Et ce bonheur fera pour un autre que moż
Tes foins trop ferieux ont tourné contre toi. Semblable au fuc des fleurs dont fe nourrit l'Abeillé, La Joie aide l'Amour, l'entretient, le réveille. Et felon moi, pour plaire il faut de l'enjoüment
Zélide t'aprendroit à penser autrement.
Zélide, dans nos jeux fi vive & fi légere! LYCA S.
Ecoute. Je l'aimai, j'efperai de lui plaire.
Son acueil m'en flatoit; au fecours de mes feux J'apellois les Plaifirs, les Danfes, & les Jeux. Plus je lui rends de foins, plus mon amour s'augmente Au fortir d'une Fête, où je la vis contente,
Je voulus qué fon cœur s'expliquât avec moi: Mais entend, cher Acis, l'arrêt que j'en reçoi. Comment! vous avez cru Zélide fi facile !
Votre amour eft erop gai, trop libre, trop tranquile. Eh! vous n'avez jamais acufé mes rigueurs. A peine après deux ans de foupirs de langueurs,
Un Amant pouroit-il me parêtre fincere.
Peut-être des foupirs ne vous coûteroient guére Peut-être voudrez-vons prendre un jour ce parti: Mais ce fera trop tard, je vous en averti.
Il vaut mieux, croyez-moi, que cer amour finiffe. A CIS.
Que je reconois bien le Sexe à ce caprice! Que je hais ces Objets, fi fiers de leur beauté, Qui veulent de nos pleurs nourrir leur vanité ! Telle à qui la nature a donné moins de charmes Me trouveroit plus promt à lui rendre les armes. Je gouterois du moins un tranquille bonheur.
Cloris m'a détrompé, j'étois dans ton erreur. A la fête de Pan, nôtre Dieu Tutelaire, Où tout Berger paroît auprès de fa Bergere, Cloris, que j'y vis feule, excita ma pitié. Je l'aborde, & la fuis. Une ombre d'amitié Devint huit jours après une douce habitude. Il fembloit qu'à me plaire elle mît fon étude. Et foit qu'un pareil soin eût de quoi l'embellir
Soit que mon esclavage eût pû l'enorgueillir Quand elle vit mon coeur engagé dans fa chaîne, Sa douceur m'avoit pris, elle devint hautaine, Inquiéte, ombrageufe, & m'acufant fur rien, Ce n'étoit qu'un combat que tout nôtre entretien. Je demandois la paix; elle plus irritée, Je n'aurai pas du moins l'afront d'être quitée, Séparons-nous, dit-elle, & voilà nôtre paix. J'ai peu compté fur vous, fort peu fur mes atraits. Et lorfque j'ai foufert vos ardeurs paffageres, C'étoit pour me vanger du mépris des Bergeres, C'en eft affez pour moi. Cher Acis quel revers £ Je n'en fuis bien épris, que lorfque je la pers. Je croyois moins l'aimer. Juge de mes fuplices. A CIS
L'Amour pour d'autres tems te garde fes délices. Tes nœuds mal affortis ne tenoient pas trop bien Tu trouveras peut-être un cœur fait pour le tien
Echapé des Chaffeurs, dont la troupe l'affiege Le Cerf fe garde bien de donner dans leur piéges
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