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EN ON E.

Nos Vignes l'an paflé n'eurent ny Fruits ny Fleurs
Attendant vainement de tardives chaleurs.

IRIS.

Bergeres n'aimons plus: l'Amour eft trop bizares Par deux chemins divers tu vois qu'il nous égare. N'aimons plus, jurons-en à la face des Dieux. EN ONE.

Que fçait-on ? S'il vouloit un jour nous traiter mieux

T

ECLO GUE

XIV.

OUS les ans, parmi nous, une Course galante,

Retrace les travaux de l'Amant d'Ata-
lante.

Sous l'apas du plaifir, nos Pafteurs autrefois
D'un utile Exercice établirent les loix.

Ils fçavoient s'il importe aux Bergers d'être agiles.
Que le Troupeau s'égare en des lieux dificiles,
Qu'un Loup vienne enlever un Mouton à leurs yeux,
Il faut ravoir fa proye. Heureux qui court le mieux!
Telle eft de cette Fefte & la caufe & l'ufage.
Sur les bords de l'Alfée environez d'ombrage,
Aux rapides Coureurs s'ouvre un Champ spacieux;
Au bout trois Pommes d'or pour le victorieux.
La Carriere eft étroite, épineuse, gliffante,

Le Combat dangereux. Ce n'eft point une Amante,
Qui ménage en fuyant Hypomene empreffé;

Tous Rivaux, l'un par l'autre eft fouvent renverfé.
Le Champ eft couronné d'un long rang de Bergeres.
Toujours quelque interêt y méne les plus fiéres,
Et la Joye ou la Crainte écrite dans leurs yeux
Dévoile affez fouvent le fecret de leurs feux.
Timarete à Nifus fouhaitoit la victoire:

Mais Timarete enfin, jalouse de sa gloire,
N'avoit à cet Amant témoigné que rigueur.
Amour, quand veux-tu donc lui montrer fon bonheur
Le Signal eft donné, l'on ouvre la Barriere,
Les yeux des Afpirans dévorent la Carriere.
Ils partent, fendent l'air, tels que les Aquilons,
La pouffiere fous eux s'éleve en tourbillons.

Nifus brûloit de vaincre aux yeux de fa Bergere, Et le vrai Prix pour lui c'eft l'efpoir de lui plaire:

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Car fouvent par la gloire on touche une Beauté,
Dans un jour de Triomphe on eft mieux écouté.

Euryale & Damon, tous deux Amans d'Irene, Suivent Nifus de près, & l'œil les fuit à peine. Mais les forces bientôt leur manquent à tous deux. Als font place à Tircis, qui n'eft pas plus heureux,

Sa Maitreffe Philis déja faifoit la fiére,

Quand Tircis ébloui tombe, & mord la pouffiere.. Les difcours de Philis, fon ton audacieux,.

Avoient déja fur elle atiré tous les yeux;

Tous les yeux à plaifir jouiffoient de fa honte.
Nifus court d'une ardeur auffi sûre que promte:.
Mais par vint Concurrens il eft ferré de près,
Et l'on ne fçait encor quel fera le faccès.
Prefque au milieu du Champ toute la Troupe avance.
Nilus piqué de voir la victoire en balance,
Perce la foule, paffe ; & dans ces rangs pressés,
Deux font à fes côtés, il les a terraffés.

Mais tandis qu'à Nifus aplaudit l'Affemblée,
Du fang d'une Geniffe à l'autel immolée,

La terre étoit humide: il gliffe, il tombe...ô Dieux! Timarete en frémit, pouffe un cri jufqu'aux Cieux.

A la voix d'une Amante, un Amant fe ranime.
Du Sort qui le trahit Nifus ne voit le crime,
Que pour le réparer, Se leve, prend l'effor

Sur l'Autel de l'Amour font les trois Pommes d'or
Voilà Nifus au but: fur le Prix il fe jette,

Et le vient aporter aux pieds de Timarete,

Timarete en rougit. Ah que ce prix m'est doux ? Dit-il, il vous eft dû, je le manquois fans vous. Vos cris ont dans mon cœur reveillé mon courage; Ce cœur fi plein de vous, ce cœur dont l'esclavage....... Non, dit-elle, ce cri que je laiffe éclater, Ce n'eft qu'à la Pitié qu'on le peut imputer. Nul autre fentiment n'entrera dans mon âme.

La Bergere fe tut. Le Berger pour fa flâme A, dit-on, commencé d'efperer dès ce jour. La Pitié fert fouvent d'interpréte à l'Amour.

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