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PRIERE A ESUS-CHRIST.

SEL

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EIGNEUR, nous ne vous demandons ni les biens ni les maux, vous choifirez de nous faire triompher ou de nous humilier; rempliffez feulement nos ames d'une ferme confiance, qu'elles fe tournent vers le centre de leur repos. Vous difiez à ceux que vous guériffiez, qu'ils étoient fauvez par la Foy, lorfqu'ils l'étoient par vôtre puiflance. Tout eft fait pour nous dès que nous fçavons efperer en vous. Ne nous refufez pas les tourmens s'ils font utiles à nôtre falut; attirez-nous, attachez-nous à vous aux dépens de tout frapez & la Nature fe taira, ou plutôt vôtre Grace parlera à nos cœurs. Elle relevera leur foibleffe: elle ne manque jamais à ceux qui l'implorent.

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DISCOURS

QUI A REMPORTÉ

LE

PRIX

A l'Académie des Jeux Floraux en 1712.

SUR CES PAROLES:

La plupart des chofes que l'on regarde dans les Hommes comme des effets de leur vertu, ne font que des ·· effets de leur foibleffe.

AUT-il que la curiofité,fi habile à pénétrer les caufes des Phénomenes de la Nature, foit fi peu éclairée fur les Principes des actions humaines! Nos yeux fe laiffent ébloüir, & prennent pour la Vertu tous les Phantômes qui peuvent la contrefaire. Malgré nôtre jaloufie contre les réputations éclatantes, une certaine pareffe nous empêche d'aprofon

dir fi elles font méritées. Le défir de nous confirmer dans une opinion avantageufe de nous-mêmes nous fait penfer qu'il peut y avoir dans le monde beaucoup de Vertus veritables ; & cette pente à croire & à admirer, faifit tout ce qui a quelque ombre de Grandeur, fans fe rendre plus difficile fur l'Examen.

Mais eft-ce un Examen dans lequel il foit permis d'entrer ? On va dégrader l'homme en le montrant à hui-même ; aux noms de Vertus, on va fubftituer ceux d'interêt & de vanité toute fa conduite ne paroîtra que foibleffe foibleffe, qu'un échange continuel de paffions facrifiées les unes aux autres, & toute fa gloire une ufurpation. Cette découverte ne coûtera-t-elle point trop à nôtre orgueil, & peut-être à la focieté? Nous fommes affez imparfaits pour avoir befoin de nous faire grace réciproquement. Eh! qu'importe à l'Univers que la fource de nos actions. foit fi pure, pourvû qu'elle répande avec abondance les biens utiles au General

Illufion contraire au fentiment de nôtre propre excellence & à l'utilité publique. Nous avons dans l'ef prit une idée de Vertu parfaite : fi nous apliquons té merairement cette idée aux premiers objets, nous nous préparons la honte d'être trompez: la Raifon ne doit pas feulement gémir de cette honte, elle doit la prévenir. Nous fentons que nos actions pourroient avoir une fin plus noble celle que que nous nous propofons

Il devroit être en nous de faire de grandes chofes fans trouble, fans inégalité, fans faste, fans les faire payer trop cher aux hommes. Ils s'apperçoivent à leur tour la fource des biens que nous leur promettons tarit, dez qu'elle eft corrompue. Nous leur manquons au befoin; ces Vertus chimeriques ne fe foutiennent pas, elles s'évanouiffent. manside

que

· Démêlons donc toutes les fauffes couleurs qu'elles empruntent; dévelopons tout le miftere des paffions; redreffons nos jugemens par une défiance furveillante. Peut-être eft-ce affez honorer l'Humanité, que de nous croire traitables fur un point fi délicat.

..

En qui voit-on des apparences de Vertu plus impofantes que dans les Heros & dans les Sages? Ces deux genres d'Hommes ont partagé l'eftime univerfelle. Les premiers en la cherchant ouvertement & à grand bruit; les derniers par une conduite plus paifible & plus miftericufe. Les uns en domtant les Hommes, les autres en paroiffant fe domter euxmêmes. Ceux-là l'ont arrachée par la force, ceux-ci l'ont obtenuë par les avantages de la raison. C'eft donc en difcutant les Sages & les Heros que nous connoîtrons que la plupart des choses que l'on regarde dans les Hommes comme des effets de leur vertu, ne font que des effets de leur foibleffe.

PREMIERE

PARTIE!

L'A

'AMOUR de la vie & le défir du repos paroiffent 'fi naturels, que l'Univers eut raifon de s'étonner à l'afpect de ces nouveaux Hommes qui renonçoient à de fi chers avantages. Pour peu qu'ils procurassent de biens & de fûreté à ceux dont ils étoient environnez, quels honneurs n'en devoient-ils pas attendre? Ils fe devouoient pour fauver, aggrandir, vanger leur Patrie, & ils ne demandoient d'autre récompenfe que Faveu qu'on ne pouvoit refufer à la verité, le témoi gnage public de leurs fuccès. Qu'ils fiffent couler trop de larmes & de fang, leurs crimes étoient des vertus aux yeux de ceux qui en profitoient; leur gloire trouvoit à s'accroître par les plaintes & le defespoir des Vaincus ; les Vaincus quelquefois, pour se déguifer leur propre foibleffe, élevoient la puiffance du Vainqueur: il étoit loüé par tous les Peuples fuivant la crainte des uns, fuivant l'efpérance des autres ; & de toutes ces voix fe formoit ce bruit qui a retenti jusqu'à la Posterité la plus reculée.

Larmes jalouses, verfées par un Fils fur les trophées de fon Pere, tous les âges vous ont fait trop d'honneur. L'impuiffance de vivre avec foi-même & de fouffrir le repos, un amour propre, convaincu malgré foi de fa

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