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tous leurs vœux & ne leur paroiffe un prix digne de la Vertu, fait grace à la plupart des hommes, quand elle leur impofe la néceffité de fouffrir, pour les ramener de leurs égaremens, & leur applanir les routes de la Sagefle.

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DISCOURS

QUI A REMPORTÉ

LE

PRIX

A l'Académie des Jeux Floraux en 171 1.

SUR CES PAROLES:

Il y a dans les differentes conditions de la vie
une proportion de Biens & de Maux
qui les rend prefque égales.

N

liées

OUS reprochons tous les jours à la Fortune, d'avoir trop inégalement difpensé les biens & les maux. Il eft des conditions, qu'elle a comme adoptées, l'autorité & pour pour les relever par

les combler de plaisirs. Il en eft d'autres qu'elle a humipar la dépendance, & condamnées à la peine & à l'obscurité. Tout fert à étendre l'amour propre des

Grands; tout refferre celui des Petits. Ceux-là font des Mondes vaftes & lumineux, qui tournent autour de leur centre, & en entraînent une infinité d'autres : ceux-ci font de foibles corps, froiffez par tout ce qui les environne, & incapables de réfiftance. Pour les Grands tous les objets font autant de miroirs qui les agrandiffent à leurs yeux. Une Armée leur repréfente les efforts d'un million de bras dépendant du mouvement d'un seul, Un Tribunal leur montre les paffions des Citoyens affujetties à la décifion d'une feule bouche. Une Cour leur offre une multitude d'Efclaves veillant au plaifir d'un Maître. Les respects qu'on leur rend, les graces qu'on leur demande, tout les avertit de leur puiffance. Les Petits au contraire ne trouvent rien qui ne les dégrade. La focieté ne leur fait voir qu'un joug pour la liberté, des châtimens pour la défobéïffance; tous leurs pas font des devoirs impofez par le caprice des Superieurs. Devoirs pénibles, contrainte fâcheufe, où il faut démentir par des préférences exterieures, la préférence fecrette qu'on fait de foi-même. Victimes, ou du moins fpectateurs de l'abondance & des plaifirs des Grands, ils font dévorez par une envie impuiffante. Ils font donc les feuls à plaindre. Non, ne nous y trompons pas. Défendonsnous des apparences, des préjugez, de l'opinion, & nous trouverons dans tous les états de la vie une éga

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que

lité prefque parfaite. Si l'on examine les avantages & les défagrémens de chaque condition en eux-mêmes, on verra que la pompe & l'éclat ne font que les foulagemens des fatigues & des périls de la fuperiorité, & la dépendance eft bien dédomagée par les délices du repos, & de la fûreté. Si nous voulons confiderer le bien & le mal par l'impreffion qu'ils font fur les cœurs, nous ferons perfuadés que l'habitude du bonheur у rend les Grands infenfibles, & fi délicats aux moindres peines, qu'elles leur deviennent des afflictions infuportables, au lieu que l'habitude des peines endurcit les Petits, & referve toute leur fenfibilité pour les plus legeres confolations. En un mot ou la Fortune a mis l'équilibre dans le monde en partageant équitablement les biens & les maux, ou le Sentiment forme cet équilibre par le plus ou le moins de vivacité dont il faifit les uns & les autres.

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L

PREMIERE PARTIE.

A Fortune ne traite avec les meilleurs amis, qu'à des conditions dures, & fous la referve d'une infinité de retours. Entrez dans ces Cabinets fuperbes où le décide le deftin des Empires : le refpect & la crainte en gardent les portes; au dedans le travail, le chagrin, l'inquiétude les foins enchaînent ce

Miniftre fi réveré. Voyez-le environné d'une mul titude innombrable de refforts qu'il faut remuer en même tems avec une proportion jufte: partagé entre mille objets, & occupé de chacun en particulier, comme s'il étoit unique; obligé d'inventer, de délibérer, de réfoudre, d'embraffer les idées les plus éloignées, comme ces Dieux de la Fable, qui d'un pas franchiffoient l'étendue des Mers: en garde contre les furprises d'autrui, & contre les propres réflexions ; il faut manier & mettre en ufage toutes les paffions des Hommes, l'interêt, la haine, la jaloufie, la vengeance, maintenir la paix au dedans, la terreur au dehors, & remporter fur tout l'Univers une Victoire perpé

tuelle.

Ce n'eft pas pour lui que le jour finit & que la nuit commence, fes yeux ne fe ferment guérés par le fommeil: ce n'est pas pour lui que la Nature varie les Saifons, fes yeux ne s'ouvrent point à cette décoration du monde; le préfent eft perdu pour lui; les plus douces liaisons lui font prefque interdites; les noms d'Ami, de Pere, d'Epoux, n'ont rien à prendre fur fon attention. Tant de fatigues encore pour des ingrats ou pour des jaloux ! t des jaloux let

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Le Guerrier, dans un mouvement plus convulfif que le Politique, voit de plus près les évennemens, & ils l'étonnent davantage. La guerre eft tout à la fois l'em

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