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un fens qu'ils n'occupent qu'une place to-. tale & entiére; cependant dans ce lieu entier il y a quatre places, une pour chaque quart, dans la place de chaque quart il y a deux places, une pour chaque demi quart, & ainfi à l'infini. Les Gaffendiftes en conviendront encore par les mêmes raifons car où l'on admettra un efpace diftingué de l'étendue de ces fubftances, que ces fubftances pénétrent & dans lequel elles fo meuvent, ou l'on prétendra que leur étendue, qui fubfifte en elles, eft le feul efpace & le feul lieu qu'elles occupent ; fi l'étendue de ces fubilances eft leur efpace & qu'il n'y en ait point d'autre, chaque quart de l'étendue d'une fubftance a fa place diitinguée de la place de l'autre quart, finon réellement, quant au fond & à la fubftance; (parceque les Gaflendifles veulent que ces quarts fubfiftent en une même subftance) du moins quant au lieu & à l'espace, puifqu'un quart n'eft pas l'autre quart (4) Par fup- & que chaque quart eft fon lieu; (a) que Fol fi on veut reconnoître un efpace différent de l'étendue de ces fubftances fimples, dans lequel elles fe meuvent en le pénétrant en tout fens, comme les Gaffendiftes veulent l'admettre, il faudra encore convenir que chaque quart de l'étendue de notre fubftance fimple occupe fa place dans cet efpace, autrement les quatre quarts de l'étendue de cette fubftance ne feroient pas une plus grande étendue qu'un feul, & il feroit inutile de défigner par l'efprit des moitiez & des quarts dans l'étendue de chaque fubitance fumple..

110. Ces deux moitiez, ces quatre quarts, ces huit demi-quarts d'étendue, font chaeun en particulier & tous ensemble dans certe fubftance fimple toute entiére, puifqu'elle n'a point de parties pour être par l'une le fujet d'une moitié, & par l'autre le fujet d'une autre moitié. Elle est toute entiére fujet de chaque moitié, & toure entiére fujet de chaque quart: elle exifte toute entiére fous chaque moitié, toute entiére fous chaque quart; elle est toute entiére en une place fous la moitié, ou sujet de la moitié de fon étendue qui occupe cette place, & toute entiére en une autre place fous l'autre moitié, ou fujet de l'autre moitié de fon étendue qui occupe cette autre place; il faut dire le méme des quarts & demi-quarts de fon étendue, ainfi cette fubftance fimple fe trouve toute entiére en deux endroits, en quatre, en huit, en mille, en cent mille, en une infinité d'endroits de plus petits en plus petits à l'infini. Tout cela eft contenu dans l'idée de la fuppofition, au cas que nous en ayons une idée, car il eft impoffible de concevoir une fubftance fimple & étenduc (6).

III. Mais fi l'on fuppofe une fois qu'une même chofe fe trouve en plufieurs endroits tout à la fois, on ne conçoit plus que la proximité ou l'éloignement de ces lieux faffent rien à l'unité ou à la pluralité de cette chofe. On aura peine, à la verité, à fe perfuader qu'une méme chofe puiffe fe trouver toute cntiére en plufieurs lieux tout à la fois; on ne le concevra peut-être

(b) Par los

1. 9. & 92.

pas bien clairement, auffi n'eft-il pas ceflaire de le concevoir, ni même cela que foit, pour que la propofition que j'avance foit véritable. Elle ne dit point qu'une même chofe puiffe être à la fois en plufieurs lieux; mais fculement que fuppofé une fois que cela foit, la proximité ou l'éloignement de ces lieux ne fait rien à l'unité ou à la diftinction de cette même chose, c'està-dire qu'il ne faut pas moins être deux chofes diftinguées l'une de l'autre, pour être en deux endroits proches l'un de l'autre, que pour être en deux endroits éloignez; & que fi une même chose être pcut tout à la fois en deux endroits l'un proche de l'autre, elle pourra également être à la fois en deux endroits éloignez l'un de l'autre, & qu'à ne confidérer que la feule nature des chofes, l'un n'eft point poflible ou impoffible plutôt que l'autre.

112. Suppofé par exemple que l'on puiffe concevoir que je fois tout entier dans le lieu où je fuis à préfent, & en même tems tout entier dans un autre licu tout proche & hors de celui-là, qui touche ce premier, il ne fera plus difficile après cela de concevoir que je fois tout entier à Paris, & en même tems tout entier à Rome, puisque la proximité des lieux diftingucz les uns des autres, ne fait pas l'unité des chofes qui font dans ces lieux diftinguez.

113. Il s'enfuit delà, que fi on accorde une fois qu'une fubftance fimple foit en même tems toute entiére fous chaque moitié, toute entiére fous chaque quart & demi-quart de fon étendue en différens

lieux proches les uns des autres & conti-
nus les uns aux autres, comme on ne peut
s'empêcher de l'accorder; fuppofé qu'elle
foit étendue (c), elle pourra également être
en même tems toute entiére fous chaque
moitié,
, quart & demi-quart de cette mê-
me étendue en des lieux très-éloignez les

uns des autres.

(c) Par les n. 109 & 110.

114. Or cela fuppofé, elle fe trouveroit divifée par morceaux, finon dans fa fubftance, du moins dans fon étendue ; d'où il s'enfuit qu'il eft impoffible qu'une étendue devienne indivifible; même par la fimplicité de la fubftance qui feroit fon fujet. Ajoutez à cela l'impoffibilité qu'unc étendue fubfitte en un fujet fimple, cideffus (d) clairement démontrée ; & il ne reftera plus aucun doute que toute éten- & 921 duc ne puifle être divifée à l'infini.

cane,

car

115. Il reste encore à réfoudre une chiil faut donner ce nom aux difficultez qu'un Philofophe entêté de fon fentiment fait pour fe défendre contre les raifons les plus évidentes; il pourra donc s'en trouver qui diront que les quatre lieux, dans lefquels les quatre quarts de l'étendue de notre fubftance fimple fe trouvent, étant unis, ne font point en effet quatre lieux, mais un feul & unique licu, patcequ'ils font continus. Ils fe fonderont fur un fentiment, qui quoiqu'évidemment faux & contraire aux premiers principes de la raison, n'a pas laillé de s'introduire dans les Ecoles, & d'y être foûtenu tête levée; Savoir que les parties de l'étendue

étant continues les unes aux autres, no

(d) N. 91

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font point diftinguées lorfqu'elles fe reffemblent, & qu'elles ne font diftinguées que quand elles commencent à être fépa rées. C'est-à-dire que fi on prend une toise de bois, les trois pieds qui font depuis fon milieu jufqu'à un de fes bouts, ne font point diftinguez des trois pieds qui font depuis le même milieu jufqu'à l'autre bout; d'où il s'enfuit que quand on coupera cette toife par le milieu, on féparera une chofe d'elle-même. Certainement quand on voit des Philofophes foûtenir une pareille fauffeté, il eft inutile de raifonner avec cux pour les convaincre : car il faudroit pour cela leur oppofer quelque chofe de plus clair que la vérité qu'ils combattent. Or peut-on trouver une vérité plus claire que celle-ci, que les deux moitiez d'un bâton font diftinguées l'une de l'autre non feulement par imagination, mais réellement & en effet.

116. Ce qui eft plus furprenant, c'est que ces mêmes Philofophes établissans dans leur Logique (e) le fyftême des distinctions, ne donnent point de marques plus certaines de la diftinction réelle entre deux chofes que la féparabilité de ces deux chofes, ou le fimple pouvoir qu'elles ont d'être féparées l'une de l'autre ; & quand ils viennent à la queftion préfente, ils veulent que cette feparabilité ne prouve plus que la diftinguibilité, c'eft-à-dire le pouvoir d'être diftingué.

117. Il paroît que deux motifs ont engagé ces Philofophes à foûtenir ce fentiment contre toute raifon. Le premier eft

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