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cette vertu pour unir les hommes ensemble par l'amour. Par le moyen de cette vertu on entretient dans la pratique des devoirs de la vie commune la fociété civile: Societas humana connecti- Idem. Ibid. ur. Je dis plus, on fe concilie même la miféricorde divine, & divina clementia conciliatur.

Ce qui peut faire la con

clufion d'un Dif

cours fur ce

:

Après tant d'avantages, qui ne travaillera de plus en plus à devenir humble? Qui ne fera de cette vertu fa vertu? Qui n'en fera fa ressource? Invoquons-là du haut du Ciel fur tout le peuple de Dieu; c'eft dans ce beau féjour que femble fujet. ètre retirée cette digne vertu. Humilité précieuse ux yeux de Dieu humilité, vertu des Anges, gertu des Saints, vertu fi convenable à l'homme, i néceffaire au pécheur, fi aimable dans le juste, ant prêchée au Chrétien; defcendez fur la terre k arrêtez-vous au milieu de nous. Humilité, nere des vertus: humilité notre reffource, foyez otre vertu jufqu'à la fin, pure, fincere, pleine; uppléez à l'imperfection de notre piété ; fuppléez la foibleffe de notre pénitence; accompliffez en ous toute justice, confervez-nous dans la crainte, levez-nous dans l'amour, faites-nous croître ans la grace pour être un jour la mesure de notre loire.

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LAN ET OBJET DU SECOND DISCOURS
Sur l'Humilité.

Orfque je me figure le Précurfeur de Jefus- Divifion Christ animé du zele de la vérité, rebuter générale. Lévites chargés des vœux & des fuffrages de Nation, fe refufer à leurs louanges profanes leur dire dans les fentimens de la plus profon

de humilité : Prenez garde, ne confondez pas ferviteur avec le maître, le Précurfeur avec ! Meffie; c'est affez & trop pour moi d'être la voir de celui qui crie dans le désert : Ego vox clama tis in deferto. Préparez la voie du Seigneur : P rate viam Domini. Ah! qu'il eft difficile, m'e crié-je avec S. Bernard, de refuser un honneur qu se présente de lui-même, & de fe connoître t qu'on eft, quand on peut fe faire eftimer, & p toître ce qu'on n'eft pas ! Que l'humilité du faint Précurfeur foit donc la condamnation de notre orgueil; & certes pourquoi dans ce fiécle voiton fi peu de Chrétiens véritablement humbles? Je crois en avoir démêlé les raifons: les uns né gligent l'humilité, parce qu'ils la croyent un fimple confeil: les autres, parce qu'ils la regar dent comme une foibleffe. Ceux-là en font le partage de l'Autel & du Cloître : ceux-ci la renvoyent aux ames baffes & fans fentimens. Les premiers ne la croyent pas néceffaire, & les feconds la méprisent bien loin de s'y croire obligés: Oppofons à cette double erreur deux vérités incon testables, & faifons voir : 1°. Qu'il n'eft point de vertu plus néceffaire: 2°. Qu'il n'eft point de vertu plus raisonnable que l'humilité. Il n'et point de vertu plus néceffaire; pourquoi? Sans l'humilité point de véritable fainteté Il n'ek point de vertu plus raisonnable; pourquoi? Sans T'humilité point de vraie fageffe. Soyons donc humbles, le falut l'exige & la raifon même now

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y porte.

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Soudivi

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Je dis qu'il n'y aura jamais de véritable fainte fions de la fans l'humilité, & par conféquent point de fa

94

premiere

J'en donne trois raisons qui me

me

Partie.

vaincantes. 1°. Parce qu'il eft impoffible de

Au

paroiffent a fifter aux tentations inévitables dans la vie

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l'humilité. 2°. Parce qu'on ne

pratiquera

Joan. 1. 23.
Ibid.

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certains points effentiels de la Loi fans l'humilité. 3. Parce qu'on n'aura jamais de vertu folide & méritoire fans l'humilité.

Partie.

Il fe fait dans le cœur de l'homme comme un Soudivi combat entre l'amour-propre & l'humilité. L'hu- fions de la milité ne s'attache qu'à fes défauts : l'amour-pro- feconde pre ne s'occupe que de fes talens. L'humilité prend plaifir à creufer cet abîme d'imperfections qui font notre fonds: l'amour-propre en détourne fes regards pour s'envisager dans l'idée brillante qu'il fe trace de fon mérite. Dans cette conteftation de l'humilité & de l'amour-propre ; quel fera le juge de la victoire ? C'eft à vous que j'en laisse la décifion; je vais faire paroître à votre tribunal l'un & l'autre, & vous verrez fi les motifs qui juftifient les fentimens de l'humilité ne doivent pas l'emporter fur les vains prétextes qui fervent de fondement à l'amour-propre. Voici tout le plan de cette feconde Partie. J'expoferai 1°. les raifons de l'orgueil & les réponses de l'humilité. 2o. J'apporterai les raifons de l'humilité & les objections de l'orgueil. Raifon de l'orgueil, la naiffance, l'efprit, la beauté, &c. l'on s'en vante. De quelque maniere que l'homme s'envisage, ou du côté de la nature, ou du côté de la grace, ou dans l'ordre de la gloire, l'homme n'eft rien: voilà fur quoi fe fonde l'humilité.

Il faut dif

J'appelle l'héroïsme de l'humilité la difpofition Preuves de d'une ame tellement morte à elle-même, qu'elle la premiere ne fent pas même les premieres impreffions d'un Partie. orgueil naturel aux autres hommes, d'une ame tinguer ce fi yvre d'abbaiffement & de mépris à qui vous faites qu'il y a de un vrai plaifir quand vous lui faites une injure, parfait & qui vous rend grace d'un affront, comme on re- d'héroïque mercie d'un bienfait; d'une ame enfin qui vole dans l'hu au-devant des humiliations, comme un mondain vec ce qu' Court à la gloire; qui pour le les attirer ces humi

milité d'a

elle renfer

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me d'effen- liations délicieuses met en œuvre de pieux ftrata tiel & d'in- gêmes & d'innocens artifices que peut feule infpi difpenfable fer la fainte folie de la croix ; telle fut l'humilité

Comme l'humilité

corrige das

le Chrêtien
les-petite-
fes & les
baffeffes at-

tachées à

l'orgueil,

des Pauls & des Antoines: telle eft encore celle des forts & des parfaits : mais enfin ce n'est pas celle-là que je prétends vous propofer. Je parle d'une humilité que les injures ne flattent pas, il eft vrai, mais auffi qui ne fe laiffe pas enfler par les louanges, qui ne cherche pas les mépris étrangers, mais qui fe méprife fincérement elle même ; qui ne vole pas au-devant des affronts, mais qui les fupporte dans la patience; trop foible pour aimer les dédains des hommes, mais trop chrétienne pour s'attribuer les dons de Dieu. Auteur anony me manuferit & moderne.

pro

Perfonne n'ignore quelles font les petiteffes, pour ne pas dire les baffeffes, où l'orgueil nous réduit. Je ne fçais ce que vous en pentez: mais moi je ne me figure pas d'homme plus petit qu'un orgueilleux qui cherche à percer : eft-il démarche fi humiliante, où il ne s'abbaiffe dès qu'il croit qu'elle peut le conduire au terme qu'il s'eft pofé, dans l'efpérance de monter? A quoi ne defcend-t-il point? Que d'affiduités, que de foupleffes, que de flatteries; & fi j'ofe m'exprimer ainfi, que d'infamies! il n'a honte de rien, pour vû qu'il puiffe atteindre où il vife. En vérité, qu'est-ce que cela? & pour omettre cent autres articles, je vous demande fi vous comprenez rien de plus mince & de plus étroit qu'une ame de cette trempe, & un efprit difpofé de la forte? Or voilà de quoi l'humilité Chrétienne est le cor rectif le plus efficace, & le plus certain. De toutes ces foibleffes, il n'y en a pas une dont elle ne for exempte & qu'on puiffe lui imputer. Un Chre tien véritablement humble, eft un homme rég dans fes vues, & qui n'en a point d'autres que c

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les de Dieu; défintéreffé & religieux dans fes abbaiffemens volontaires, il eft ennemi de la flatterie & de toute fujétion mercénaire & forcée; équitable dans fes jugemens, il reconnoît le mérite par tout où il eft, & il fe fait un devoir de l'honorer & même de le révérer à fon propre préjudice; indépendant de tout refpect humain, il ne cherche point à plaire au monde, & il le compte pour rien; humble, non-feulement par tempérament, mais par des motifs fupérieurs & divins, il ne s'abandonne point à l'ardeur exceffive de croître, mais fe renferme dans les bornes qu'il a plû à Dieu de lui marquer; il dit comme David Seigneur, mon cœur ne s'eft point élevé : je ne me fuis point évanoui dans mes penfées ni dans mes défirs, je n'ai point porté mes regards au-deffus de moi : Domine, non eft exalta- Pf. 130. 1. tum cor meum, neque elati funt oculi mei, neque ambulavi in magnis. Qu'est-ce qu'un homme qui sçait ainfi s'abbaiffer, finon un grand homme ? Travaillé fur un Livre de piété.

fortir vic

torieux.

Ne vous imaginez pas que l'homme humble La tentafoit tout-à-fait à couvert des atteintes de l'orgueil: tion de l'or. il nous est si naturel, qu'il veut toujours faire de gueil ne peut rien nouveaux progrès, & d'un dégré paffer à un au- fur l'hom-, tre il y a même des temps & des conjonctures me humoù la tentation eft difficile à vaincre ; mais l'hum- ble, il ble Chrétien fçait la réprimer, fçait la furmon- fait en ter; & par une fainte violence fe rendre maître d'une paffion dont l'empire néanmoins eft fi étendu. Il eft ce que Dieu l'a fait naître & ce qu'il veut qu'il foit; fi dans le cours des années la Providence l'appelle à quelque chofe de plus, il la laiffe agir, & attend en paix qu'elle fe déclare. Jufques là nul empreffement, nulle inquiétude; point d'autre foin que de vivre felon Dieu dans fon état, & de fournir faintement fa carriere. Tome II. ( Morale II. Vol.) V v

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