1 jusqu'au pied des côtes sablonneuses du levant; la gauche étoit entièrement boisée; on voyoir en face du château quatre petits carrés, entourés d'arbres taillés en boule, & au milieu de ce parterre, un bassin avec un jet d'eau : tel étoit le côté du nord avant que la coignée vînt éclaircir toute la partie gauche, découvrir la tour & la hauteur de mont Epiloy, dont la couleur vaporeuse & l'éloignement donnent une grande profondeur au tableau. La rivière produite par la chûte d'eau du midi, fe précipite en cascade dans les foffés du château, & se divife, pour l'entourer, en deux bras qui viennent se réunir devant la façade du nord; de là, poursuivant son cours en serpentant dans la prairie, elle baigne plufieurs îles: fur la pointe la plus élevée de l'une d'elles, est placé un bâtiment gothique, dominé par une vieille tour d'un bon style; cette fabrique, par sa forme & fa maffe, met les fonds dans leur point de perspective. A l'endroit qui paroît être l'extrémité de la ri vière, on a construit un moulin dans le genre de ceux que l'on trouve en Italie. En avant des bois de la gauche on aperçoit un joli hameau qui se dessine agréablement à travers les arbres. Le clocher de l'abbaye de Chaalis, s'élève au dessus de ce plan, & paroît en faire partie, quoiqu'il en soit encore fort éloigné. Ce qui mérite d'être remarqué dans la composition du tableau du nord, c'est la manière savante dont il est lié au pays: on diroit que celui-ci appartient en entier au Seigneur d'Ermenonville : le grand art en effet est de savoir, par la difpofition des masses & des plans, s'approprier, pour ainsi dire, le bien de ses voisins. En Angleterre même, on n'a jamais pensé à dessiner un tableau fait pour être vu de la maison. M. de Gérardin, qui n'a point cherché à imiter le genre anglois dans ses compositions, est le premier qui se soit occupé de l'ensemble, & c'est aussi lui qui a donné le premier, en France, l'exemple d'embellir les campagnes, & qui a réduit cet art en principes dans son excellent Ouvrage fur les jardins. Parmi les nombreuses imitations auxquelles Ermenonville a servi de modèle, je ne connois que Lufancy où l'on ait cherché à compofer un tableau pour la maison, & où l'on ait mis la campagne dans le jardin, & le jardin dans la campagne. On ne réufssira cependant jamais à faire quelque chose de bien, de noble, de grand, dans le genre pitto refque, fi l'on ne commence d'abord par méditer l'ensemble; c'est la base de toute bonne 1 composition. Cet ensemble étant bien disposé, les détails naîtront, pour ainsi dire, d'euxmêmes: c'est à ce principe fondamental, dont il ne faut jamais s'écarter, qu'on doit tout l'agrément de ceux des jardins d'Erme nonville, que nous allons parcourir. Pour commencer la promenade, après avoir defcendu le pont qui est à droite de la terrasse du château , prenez le sentier qui ramène au midi, à la vue de la cascade, dont les eaux, divisées par les masses de rochers qui s'opposent à son cours, se détachent sur le fond de la forêt, & produisent un bel effet. On fort de l'enceinte du château par une barrière qui tient à un des pavillons d'entrée: celui-ci sera célèbre à jamais; c'est celui qu'habitoit J. J. Rousseau ; c'est là qu'il a terminé sa carrière. Les grands peupliers qu'on aperçoit de l'autre côté de la rue, ombragent un bassin formé par la fontaine du village : fur un piédestal, se lisent ces deux infcriptions: Le jardin, le bon ton, l'usage Peut être anglois, françois, chinois; Sont de tout temps, de tout pays: |