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M. Richer paroît n'en pas porter

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un jugement fi avantageux dans la pré- ECRITS SUR face qui eft au-devant du recueil de fes LA FABLE. fables, imprimé en 1730. & qui est elle-même un traité abregé sur ce gen→ re de poëfie. Il eft vrai qu'il ne nomme point M. de la Motte; mais il le peint, & on ne peut méconnoître fon intention aux traits dont il charge fa peinture. Ce que l'on pourroit croire c'eft que tout ce qu'il dit tombe plus fur les fables de M. de la Motte que fur le difcours qui les précede. Du refte je ne vois rien dans la préface de M. Richer fur le génie de la fable, fur fes qualités, fur fon ftyle, &c. qui n'eût déja été dit par M. de la Motte lui-même, & par le pere Brumoy. C'eft plutôt une apologie que M. Richer fait de lui-même contre ceux qu'il fuppofe pouvoir lui reprocher trop de préfomption d'avoir compofé des fables après M. de la Fontaine, qu'un discours fur la fable.

Pour M. de Rémond de faint Mard, Réfléx. fup on fent davantage en lifant fes réflé- la poef. &c. xions fur le même fujet, qu'il a eu en vûë de cenfurer plufieurs principes de M. de la Motte, quoique l'un & l'autre fe reffemblent par bien des endroits, & peut-être par les plus effentiels. Ce

LA FABLE,

refléx. de M.

qui paroît choquer le plus M. Rémond ECRITS SUR dans M. de la Morte, c'eft le choix que celui-ci a fait des perfonnages moraux, tels que la mémoire, le jugement, l'imagination. M. Rémond voudroit les bannir entiérement; il ne fçait de quelle couleur est tout ce monde-là: tant que dure la fable où il figure, fa fatigue fubfifte, fon cerveau peine, fon imagination ne fçait où s'accrocher. Je ne fçai fi je dois dire qu'elle a tort. M. Nicolas qui a répondu aux réfléxions de M. Rémond, Itr. fur les dans les lettres que je vous ai déja ciRém. p. 43. tées, prétend au moins que fi les êtres moraux n'ont point de couleur, ils ont de l'étenduë, du volume, en un mot qu'ils figurent; & que pour donner à notre imagination de quoi s'acrocher, il fuffit de lui offrir quelque chofe de palpable. Cependant M. Nicolas convient que les êtres deftitués d'organisation nous plaisent moins dans les fables que les êtres organifés; que par cette raison il vaut mieux entendre parler une plante qu'une lime, la premiere étant plus analogue à notre être, & notre plaifir croiffant à proportion de l'analogie que les chofes ont avec nous. Il avouë de même, que nous préférons les animaux aux plantes dans la fable, parce qu'ils ont, comme nous, le talent de fentir

LA FABLE.

& en quelque façon celui de raisonner; que de plus, outre ces qualités géné- ECRITS SUR rales, ils en ont de particulieres qui les diftinguent, & qui les font contraster entre eux : qu'il y a feulement une attention à avoir, c'eft que les animaux différants entre eux, on ne doit faire dire à chacun que ce qui eft propre au caractere que nous lui connoissons, & qui ne convient précisément qu'à celui que nous faifons parler. Tout cela eft vrai: mais M. Rémond n'ayant pas dit autre chofe, étoit-ce la peine de le contredire?

On ne voit pas bien non plus ce qui déplaît à M. Nicolas dans l'éloge que l'Auteur des réfléxions fait du style familier dans la fable, & dans la préférence qu'il lui donne fur le style foutenu. Le caractere que M. Rémond fait de l'un & de l'autre me paroît au moins aussi jufte qu'il eft peint élégamment. Mais peutêtre auffi que l'Auteur des lettres n'a pas eu intention de le cenfurer fur cet article; car j'avoue que ce qu'il en dit, m'a paru fi obscur que je n'ai pû deviner fa pensée. Je fuis fâché que mon intelligence m'ait fi mal fervi, ce font fans doute, des beautés que je perds.

M. Rémond parle auffi des contes, nouveau genre de poëfie qui dans l'u

fage que M. de la Fontaine, & pluECRITS SUR fieurs autres en ont fait, n'eft propre LA FABLE. qu'à corrompre les mœurs. Il examine en peu de mots fi l'on doit préférer le conte à la fable, & il décidé pour celle-ci, parce qu'elle a l'avantage d'être plus variée, de porter plus de réflé– d'être continuellement foute

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nue par l'allégorie. Le mérite principal du conte ne fe tire, dit-il, que de notre concupifcence. On ne peut en dire plus pour le décrier; & cet aveu a quelque chofe d'édifiant. Mais l'Auteur des réfléxions le gâte auffi-tôt en prodiguant fes éloges aux contes de M. de la Fontaine, quoiqu'il foit en même-tems obligé d'avouer, ce qui eft vrai, qu'à la faveur des tours délicats que l'Auteur a fçu y employer, ils n'en portent que mieux leur poison à des imaginations naturellement gâtées comme les nôtres. Pourquoi donc les louer? Le poifon en eft-il plus eftimable, parce qu'il tue plus agréablement ?

Je finis le compte que j'avois à vous rendre du petit nombre d'écrits fur la fable dont on a enrichi notre langue en vous rapportant ces vers d'un Poëte moderne qui s'eft déja acquis une grande réputation dans ce genre de poefie, & qui en expriment en peu de mots

tous les caracteres & les avantages que

l'on peut en retirer. Ces vers font de ECRITS SUR M. Peffelier; & la pièce d'où ils font LA FABLE. tirés, eft fort connue. Voici donc ce

qu'il dit :

Sublime dans fa fin, fimple dans ses difcours,
Pour orner la raison, l'Apologue a recours

A tout ce que l'on voit, a tout ce qui refpire,
Et tient le monde entier foumis à fon empire.
Dans fes mains le plaifir produit l'inftruction.
Toujours fupérieure à la diftinction

Des rangs & des humeurs, des fexes & des âges,
Dans la pompe des Cours, dans l'ombre des Villages,
La fable se diftingue, & le bien des Etats
L'éleve quelquefois jufques aux Potentats.

Elope au

Patn, fcen, 1,

N

CHAPITRE X.

Des Ecrits fur la Satyre.

O u s n'avons guéres plus d'écrits en notre langue fur la fatyre que fur la fable; mais nous en avons de plus anciens : & ce genre de poëfie eft aussi plus anciennement en usage chés nous. Dès les premieres années du fiécle dernier, Jean Vauquelain de la Fresnaye, l'un de nos premiers fatyriques François, compofa fur ce fujet un difcours qui n'est pas indigne d'être lû. 11 avoit

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