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réelles, & les folutions très-folides; tếmoin le cas nouveau & paradoxe de l'interfection de deux Sections Coniques en quatre points du même côté de l'axe dont nous avons parlé dans l'Hiftoire de 1713.

&

Il croyoit l'Algèbre encore fort imparfaite, & fufceptible d'une étendue que l'on ne penfe pas même à y defirer. Il en méditoit des élémens tout nouveaux : mais dans ce qu'il communiquoit à l'Acadé→ mie, il rapportoit quelquefois certaines chofes à ces élémens inconnus, ou les fuppofoit; ce qui donnoit à fes Ecrits une apparence de fimples projets, & même de l'obfcurité. Ses idées pouvoient fe nuire les unes aux autres par leur multitude, l'efpace borné de nos Mémoires ne suffi foit pas toujours pour les contenir toutes; le champ étoit trop petit, pour y ranger une Armée en bataille. C'est dommage qu'il n'ait fait ces élémens, où il auroit pu fe développer en liberté on ne peut douter que l'Ouvrage n'eût été fort confidérable; & un homme capable, comme lui, de fe facrifier entièrement à l'Algèbre, n'eft pas un préfent que la Nature faffe tous les jours aux Sciences.

Il eut en 1708 une attaque d'apoplexie, dont il fortit avec tout fon efprit, & pref que la même force pour le travail. Mais dix

ans après, une feconde attaque le jetta dans une paralyfie qui ne lui permit plus de fortir, & dont il mourut le 8 Novem bre 1719 âgé de 68 ans, après avoir donné toutes les marques d'une folide piété. Ses mœurs avoient toujours été telles que les forment un grand attachement à l'étude & F'heureuse privation

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du commerce du monde.

ÉLOGE

DE M. RENAU. BERNARD RENAU D'ELISAGARAY naquit dans le Béarn en 1652 d'un père qui avoit peu de bien & beaucoup d'enfans. On croit que ce fut par Madame de Gaflion, femmie d'un Préfident à Mortier du Parlement de Pau, & fille de M. Colbert du Terron, Intendant de Rochefort, qu'il fut connu, fort jeune encore, de cet Intendant, qui conçut auffi-tôt beaucoup d'affection pour lui. Il avoit une très-patite taille, mais très-bien proportionnée, & qui tiroit de l'agrément de fa petitesse même, l'air adroit, vif, fpirituel, courageux, M. du Terron le prit chez lui, où il devint le frère de Madame la Princeffe

de Carpegne & de Madame de Barban çon, fes deux filles cadettes, car elles l'ont toujours appelé de ce nom; & pour Madame de Gaffion, l'aînée des trois fœurs il étoit fon fils. Quelque aimable que für naturellement un jeune enfant étranger dans une maifon, il falloit encore que pour y être aimé de tout le monde, il fût bien fe rendre aimable. On lui fit ap prendre les Mathématiques, apparemment parce que le féjour de Rochefort lui avoit: donné lieu de faire paroître des difpofi tions à entendre la Marine. Enfin, en avoit très-bien rencontré, & l'on vit par fon application & par fes progrès, qu'il étoit dans la route où fon génie l'appeloit.

Il ne s'inftruifoit pas par une grande lecture, mais par une profonde méditation. Un peu de lecture jettoit dans for efprit des germes de penfées que la médi tation faifoit enfuite éclore, & qui rapportoient au centuple. Il cherchoit les Livres dans fa tête, & les y trouvoit. Ce qu'il y a de plus fingulier, c'eft qu'il penfoit beaucoup, & paffoit peu de temps dans fon cabinet & dans fa retraite. I penfoit d'ordinaire au milieu d'une converfation, dans une chambre pleine de monde, même chez les Dames. On fe moquoit de fa rêverie & de fes diftractions; on ne laiffoit pas en même temps

de les refpecter. Il faifoit naturellement & fans affectation ce qu'avoit fait, pour une épreuve ou pour une oftentation de fes forces, ce Philofophe qui fe retiroit dans un bain public, où il alloit méditer.

Il y a apparence que M. Renau lut la Recherche de la Vérité, dès qu'il fut en état de la lire. Son goût pour ce fameux Syftême & fon attachement pour la perfonne de l'Auteur, ont toujours été fi vifs, qu'on ne les fauroit croire fondés fur une impreffion trop ancienne. Quoi qu'il en foit, jamais Malebranchifte ne l'a été plus parfaitement; & comme on ne peut l'être à ce point fans une forte perfuafion des vérités du Chriftianifme &, ce qui eft infiniment plus difficile, fans la pratique des vertus qu'il demande, M. Renau fuivit le Syftême jufques-là. Son caractère ferme & vigoureux ne lui permettoit ni des penfées chancelantes, nữ une exécution foible.

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Quand il fut affez inftruit dans la Marine, M. du Terron le fit connoître de M. de Seignelay, qui devint bientôt fon Protecteur, & un Protecteur vif & agiffant. Il lui procura en 1679 une place auprès de M. le Comte de Vermandois Amiral de France, qu'il devoit entretenir fyr tout ce qui appartient à cette impor

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tante Charge. Il en eut une penfion de

mille écus.

Le feu Roi voulant perfectionner les conftructions de fes Vaiffeaux, ordonna à fes Généraux de mer de fe rendre à la Cour avec les Conftructeurs les plus habiles, pour convenir d'une méthode générale qui feroit établie dans la fuite. M. Renau eut l'honneur d'être appelé à ces Conférences, qui durèrent trois ou quatre mois. M. de Seignelay y affiftoit toujours; & quand les matières étoient fuffifamment préparées, M. Colbert y venoit pour la décifion, & quelquefois le Roi lui-même. Tout fe réduifit à deux méthodes, l'une de M. du Quefne, fi fameux & fi expérimenté dans la Marine; l'autre de M. Renau, jeune encore & fans nom. La concurrence feule étoit une affez grande gloire pour lui mais M. du Quefne, en préfence du Roi, lui donna la préférence, & tira plus d'honneur d'être vaincu par fon propre jugement, que s'il eût été vainqueur par celui des

autres.

Sa Majefté ordonna à M. Renau d'aller avec M. de Seignelay, M. le Chevalier de Tourville, depuis Maréchal de France, & M. du Quefne le fils, à Brest & dans les autres Ports, pour y exécuter en grand ce qui avoit été fait en petit devant

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