Sina eft une montagne d'Arabie : : qui represente la Jerufalem d'ici-bas, qui eft esclave avec ses enfans; au-lieu que La Ferufalem d'en haut est vraiment libre, & c'est elle qui est notre mere: car il est écrit: Réjouiffez-vous stérile qui n'enfantiez point: pouffez des cris dejoie, vous qui ne deveniez point meres parceque celle qui étoit délaiffee a plus d'enfans que celle qui a un mari. Nous sommes donc, mes freres, les enfans de la promesse figurée dans Isaac & comine alors celui qui étoit né felon la chair perfecutoit celui qui étoit né felon l'esprit ; il en arrive de même encore aujourd'hui. Mais que dit l'Ecriture? Chaffez la fervante & fon fils; car le fils de la servante ne fera point heritier avec le fils de la femme libre. Or, mes freres, nous ne sommes point les enfans de la servante, mais de la femme libre: & c'est JESUSCHRIST qui nous a acquis cette liberté. I. EXPLICATION. 1. Apôtre par l'explication allegori que de la naissance de deux enfans d'Abraham, l'un qu'il eut d'Agar, lauwe de Sara, nous inftruit de la nature des deux Testamens, l'ancien & le nouveau. Il dit que l'ancien figuré par Agar, n'enfantoit que des esclaves ; & que l'autre, qui eft le nouveau figuré par Sara, engendre des enfans libres. Il nous découvre par-là, que la Synago gue comme Synagogue, & avec l'appareil de toutes ses ceremonies, n'étoit qu'un peuple d'efclaves destinés simplement à figurer la véritable Eglise & le véritable peuple de Dieu qui la devoit fuivre, & dont elle enfermoit déja quelques membres qui appartenoient à la véritable Eglife. Mais il faut remarquer sur cela que quoique le. corps de la Synagogue ne fût composé que de Juifs charnels, animés de l'esprit de fervitude, & qui ne participoient point à la véritable liberté des enfans de Dieu; néanmoins cette servitude ne venoit point proprement de Dieu, mais de la corruption de l'homme. Dieu est la cause de la liberté de ses enfans; mais il n'est pas la cause de l'asservissement de ceux qui vivent dans l'esprit d'esclaves. C'est l'amour qu'ils ont pour les choses du monde, & le défaut d'amour pour Dieu, qui les rend esclaves. Or Dieu n'est cause ni de Pun ni de l'autre. Il a au-contraire comblé les Juifs d'une infinité de graces & de bienfaits qui les devoient porter à l'aimer. Et quoique par un conseil de fa fa gesse élevé au-dessus de tous les esprits des hommes, il n'ait pas amoli la dureté de leur cœur par des graces plus fortes, comme il le pouvoit', il n'est pas caufe néanmoins de cette dureté. Il ne leur devoit point ces graces. Elles n'étoient point des appanages de leur nature, & c'est leur faute de n'avoir pas bien ufé de celles qu'il leur a données. II. Il semble qu'il n'y ait rien de plus confolant pour les Chrétiens que ce que faint Paul enseigne dans ce que l'Eglife nous propose de cette Epitre. Il reconnoît les Chrétiens pour les vrais enfans de Dieu, sa vraie Eglise, ses vrais heritiers, & il exclut les Juifs de tous ces titres. Mais il est bien à craindre qu'il n'y ait présentement peu de Chrétiens qui puiffent prétendre à ces avantages. Car Taint Paul suppose que les Chrétiens dont il parle, foient attachés à Dieu par amour; que l'esprit d'adoption les fasse recourir Dien avec une tendresse d'enfans. Or combien y a-t-il peu de personnes maintenant en qui ces marques paroislent?Cet esprit de liberté opposé à l'esprit de servitude confiste à aimer Dieu avec un efprit d'enfans & une confiance d'enfans, à le regarder comme son souverain bien, le préferer à toutes choses, & à lui confacrer sa vie & ses actions avec une cha fité toute libre, & non avec une contrainte servile. Or comment peut-on prétendre que l'on est dans cette disposition, lorsqu'étant dans les chaînes des paffions & des vices, on ne pense point à les rompre, on ne s'y trouve point mal, & qu'on ne souhaite pas même d'en étre libre? Comment accorder cet amour avec cet esprit tout occupé de la vie présente, tout rempli de prétentions humaines, & fi peu touché des maux de l'ame? Comment l'accorder avec cette froideur cette négligence, & cette inapplication à ce qui regarde Dien ? Comment l'accorder avec ce partage si inégal de fon tems & de ses occupations, par lequel nous donnons presque tout au monde, & presque rien à Dieu? Faut-il s'appliquer un quart-d'heure à Dieu, voilà les gens dans l'ennui? Faut-il s'appliquer aux créatures qui leur plaisent, les voilà dans la joie ? Il est souvent allez difficile de trouver des marques de l'amour de Dien, dans la vie même des personnes qui font profession de pieté. La contume, l'habitude, la crainte, l'amour - propre peuvent être le principe de la plupart de leurs actions. Mais je ne fai comment on pourroit s'imaginer que ceux qui vivent com me l'on vit dans le monde, c'est-à-dire, dans les passions qui occupent les gens du monde, sont des gens délivrés par Jesus-Christ de la servitude des passions. Rien ne donne cette idée. Tout y est contraire, quand on regarde les choses de près. De sorte qu'il faudroit supposer que l'amour de Dieu est une certaine passion insensible qui demeure stérile & fans action dans le fond du cœur. Or c'est une idée toute opposée à celle que l'Ἐcriture & les Peres nous en donnent. Ainsi cette préference que S. Paul donne à l'état des Chrétiens sur celui des Juifs, bien loin d'être un sujet de confiance aut commun du monde, est au contraire un étrange sujet de terreur ; parceque n'ayant pas lieu de reconnoître en eux les marques de cet amour, sans lequel on n'eft point enfant de Dieu, ils ne se peuvent mettre tout au plus qu'au rang des efclaves & des Juifs, qui ne sont point de livrés de servitude.. III. Ne regardons donc plus cette separation que fait l'Apôtre, des Juifs & des Chrétiens, des esclaves & des libres, comme une chose qui ne nous regarde point. Ces Juifs comprennent la plupart des Chrétiens. Ils ont quitté le nom de Juifs sans en avoir quitté l'esprit. Ils remplissent nos Eglises, & ils y occupent fouvent les places les plus éminentes. Ils font effectivement esclaves, mais ils ne font |