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garde la matiere des cinq Propofitions du Livre de Janfenius.

L'adreffe & l'œconomie avec laquelle la mauvaise doctrine est distribuée dans cet Ouvrage montre assez que ce n'eft point l'effet du hazard ou de la surprise, & fert à cacher davantage le poison. On a pris foin de répandre en plufieurs volumes les parties de cette nouveauté. Il femble qu'on n'ait pas voulu la montrer toute entiere fous un point de veuë, de peur de foulever les lecteurs intelligens & bien intentionez. Mais la féduction n'en eft que plus dangereufe. Le Parti en sçaura bien tirer un jour fes avantages, s'il peut donner cours à cette mauvaife Theologie; étant aisé à ceux qui en auront la clef, de joindre en un même corps tous ces membres dispersez.

Obfervons, mes Freres, les principaux égaremens de cette Theologie. Voïons d'abord comment on y a copié les Ecrivains Janfeniftes, dans les évafions qu'ils ont imaginées pour éluder la force des Cenfures Apoftoliques reçues de toute l'Eglife, & pour justifier indirectement le sens du Livre de Janfenius. Nous examinerons ensuite en détail ce qui favorife plus directement chacune des Propofitions heretiques de ce même Livre.

DIVISION

1o Que les Cenfures Apoftoliques contre les Propofitions de Janfenius ont pour objet le pur Calvinisme, & non le fens du Livre de Janfenius.

DE CETTE

INSTRUCTION,

LES moïens generaux, dont les Difciples de Janfenius fe font fervis, pour foutenir indirectement la PREMIERĘ caufe de fon Livre, fe reduisent à ces trois défenses.

PARTIE.

Le P. Juenin a adopté les trois prin

cipaux moïens ou faux-fuïans, dont

les Janfeniftes fe font

fervis jufques icy, pour

20 Que l'Eglife, en attribuant un fens hereti que au Livre de Janfenius, a pû se tromper, & fures Apoftoliques, qu'on ne lui doit au plus en ce point qu'une fou

éluder les Cen

& pour juftifier in

miffion de filence.

directement le Livre de Janfenius & la doctrine qui y eft

contenuë.

3o Que la Doctrine du Livre de Jansenius se réduit aux cinq Articles, que fes disciples prétendent avoir été approuvez à Rome, & ne contenir que la doctrine de la grace efficace par elle-même & de la prédeftination gratuite felon le fentiment des Thomiftes.

1. EVASION du

le P. Les

Parti, adoptée par Cenfures de la re & de la se Propofition de Janfenius tombent fur le fens & l'herefie de Calvin.

Ces trois faux-fuïans renferment en abregé ce qu'ont écrit les Sectateurs de Janfenius, pour faire l'apologie indirecte des erreurs de fon Livre. La Theologie du P. Juenin introduit fes lecteurs dans ces détours de mauvaise foy fraïez par les Difciples de Jansenius; préjugés indubitables de l'atachement que cet Auteur a eu à ce Parti & à fa Doctrine en compofant fa nouvelle Theologie.

Il est surprenant que le P. Juenin ait osé adopter dans fes Inftitutions Theologiques cette honteuse évafion des Janfeniftes : Que le pur Calvinisme est l'objet veritable des Cenfures, que l'Eglife a portées tres-expreffément contre les erreurs du Livre de Janfenius. Voici comme il s'explique fur la premiere & fur la cinquième Propofition.

a

Patet... hanc...

""

On voit, dit-il, clairement, que la premiere Propofitionem, quæ,, Propofition cenfurée par Innocent X. Quelques primo eft loco inter quinque ab Inno-, commandemens de Dieu font impoffibles à des hommes centio X. damnatas: juftes, lors même qu'ils veulent & s'efforcent de les ac Aliqua Dei prace, complir, felon les forces qu'ils ont prefentes ; & la grace volentibus, & co- leur manque par laquelle ils foient rendus poffibles, dans nantibus, fecundum„ le fens naturel qu'elle prefente d'abord à l'efprit

pta hominibus juftis

رو

e

prafentes, quas ha

bent vires, funt impoffibilia: deeft quo

(comme parle Innocent XII. dans fon Bref aux « Evêques de Flandre) eft non feulement temerai-" re & heretique, mais auffi blafphématoire; parce" qu'elle reprefente Dieu comme injufte legislateur, qui fait des commandemens, qu'il eft impoffible" d'observer même avec la grace la plus efficace; " comme l'a voulu Calvin, qui a été condamné pour XII. in fuo Brevi cad Belgarum Epifpar le Concile de Trente.

que illis gratia, quâ poffibilia fiant, non folùm effe in fenfu obvio (ut loquitur

Innocentius Papa

cr

cela

copos) temerariam

cr

& hæreticam, fed etiam blafphemam; nempe Deum reddit injuftum legiflatorem, qui ea præcipiat, quæ (ut Calvinus ob id à Concilio Tridentino profcriptus voluit) etiam cum efficaciffimæ gratiæ auxilio fervari non poffint. T. 1. p. 647.

a

"propofitione ferendum fit: Semipelagianum eft dicere

Il n'eft pas plus refervé fur la cinquiéme Pro• Patet quodnam pofition. Voici fes termes. "On voit évi- judicium de hac demment quel jugement on doit porter de cette Propofition: C'est un Semipelagianifme de dire, cc que JESUS-CHRIST eft mort, ou qu'il a répandu fon" Jang generalement pour tous les hommes. Cette Propo-« fition entendue au sens de Calvin eft impie, blafphématoire, dérogeante à la bonté de Dieu, &" heretique; car elle fupofe que ceux d'entre les reprouvez qui ont reçû le Sacrement du Batême où de la Penitence, ne font point juftifiez, ou," s'ils le font, qu'ils ne le font pas par les merites de J. C. Innocent X. l'a ainfi declaré, & toutes les Eglifes du monde ont souscrit à son jugement.

Chriftum pro omnibus omnino hominibus mortuum of fudiffe, fcilicet intellecta in fenfu Cal

fe, aut fanguinem

«

vini, hoc eft, co fenfu ut Chriftus pro falute duntaxat pradeftinatorum mor

«

"

tuus fit, eft impia, blafphema, contume«liofa, divina pietati derogans, & bare

"

tica. Nec mirum, fupponit enim eos ex reprobis qui aut in infantia, aut in adulta ætate cum debitis difpofitionibus baptizantur, vel in facramento pœnitentiæ abfolvuntur, justificationem non confequi, vel fi eam confequantur, eam ex Chrifti meritis non confequi, que duo, blafphema funt & hæretica. Ita declaravit Innocentius Papa X. cujus judicio omnes orbis Ecclefiæ fubfcripferunt. T. 4. p. 475.

Est-il donc vrai que les fouverains Pontifes & l'Eglise aïent cenfuré ces Propofitions de Jansenius

en y fous-entendant les glofes Calviniftes, que le P. Juenin y ajoute, & dans le fens de Calvin qu'il leur attribuë? Peut-on croire que le fens de Ĉalvin foit le fens naturel, dont parle Innocent XII. dans fes Brefs, lui qui y declare expreffément contre les fubterfuges des Janfeniftes, que le fens qui fe prefente dabord à l'efprit, eft celui qui eft marqué dans le Formulaire d'Alexandre VII. où certainement il n'eft fait mention que du fens de Janfenius? N'y a-t-il d'herefie & de blafphême fur la poffibilité des commandemens, fur la grace, fur la liberté, & fur la mort de J. C. pour le falut des hommes, que dans le pur Calvinifme? Et étoit-il queftion du fens de Calvin, quand l'Eglife a cenfuré nommément les cinq Propofitions extraites du Livre de Jansenius comme impies & heretiques dans le fens propre & naturel de l'Auteur ?

On l'a dit dans

l'Ordonance contre

le Cas de Confcience, p. 48. & on le

pur

Nul Theologien Catholique (comme nous l'avons déja remarqué dans notre Ordonnance fur le Cas de confcience) n'a attribué le Calvinisme repete encore icy, aux Propofitions de Janfenius. Par exemple, perqu'aucun Thcolo- fonne ne lui a imputé fur la premiere Propofition, gien Catholique n'a attribué le Calpur

qui

vinifme aux Propofitions de Janfenius. C'eft en vain que l'Auteur de la pretenduë Défense de tous les Theologiens contre l'Ordonnance de M. l'Evêque de Chartres, art. 15. a voulu prouver le contraire. On lui avouera que Janfenius & Calvin conviennent en certaines choses. Ils ont avancé l'un & l'autre cette propofition impie, heretique & blafphematoire: Les Commandemens de Dieu font impoffibles aux juftes. En ce point ils ont été condamnez l'un & l'autre par le Concile de Trente, feff. 6. chap. 11. & Can. 18. Et c'est là ce qu'ont voulu dire les Auteurs citez dans la Défense. Mais Janfenius & Calvin font fort differens dans la maniere d'expliquer cette propofition impie; Janfenius ne reconnoiffant l'impuiffance de garder les Commandemens que dans les juftes qui n'ont pas la grace effi au lieu que Calvin pretend qu'elle fe trouve generalement dans tous les juftes.

cace

,

On ne peut dire, & perfonne n'a jamais dit, que Janfenius ait été fi loin que Calvin, ni qu'il ait admis toutes les glofes que l'Ecrit à trois colonnes & à fon exemple le P. Juenin

y a

qui eft mot-à-mot dans fon Livre, le principe & le fens de Calvin (Les Commandemens de Dieu font impoffibles aux juftes avec la grace la plus efficace, à caufe que leur concupifcence corrompt leurs meilleures actions.) Il est manifeste au contraire, que Janfenius reconnoit, que les Commandemens font poffibles à tous ceux qui ont la grace efficace, laquelle felon lui eft le feul fecours qui les rend pof

fibles.

y a ajouté, pour en

faire

une propofition pure Calvinifte, nempe Deum reddit injusti lepracipiat, qua (ut giflatorem, qui ea Calvinus ob id à Concilio Tridentino profcriptus voluit)

etiam cum efficacif

fima gratia auxilio fervari non poffint.

Où ont-ils pris, que

le Concile de Trente

n'a condamné les
fentimens impies de

Calvin, qu'en ce que cet herefiarque a prétendu, que les Commandemens de Dieu étoient
impoffibles même avec la grace la plus efficace? N'eft-il pas certain au contraire que le
S. Concile a voulu rejetter abfolument & fans diftinction cette propofition impie, Dien
commande aux juftes des chofes impoffibles?

Mais fans s'étendre davantage fur ce fujet, il fuffit de remarquer, que l'Eglife s'étant expliquée tant de fois, que c'eft dans le fens de Janfenius qu'elle a condamné les cinq Propofitions: c'eft refifter à fon autorité, & s'élever contre les Decifions, que de pretendre comme a fait le P. Juenin, que la premiere Propofition (on en doit dire autant de la cinquiéme ) n'a été condamnée que dans le fens du pur Calvinifme, que tout le monde convient être contraire à la doctrine & au fyfteme de Janfenius.

que

l'on

Il eft neceffaire de repouffer encore icy une accufation tres-injufte, que l'Auteur du Livre de la Défenfe fait au même endroit contre l'Ordonnance de M. de Chartres fur le Cas de confcience. Il fe plaint de ce qu'on a traduit la premiere Propofition dans un fens defini, Quelques Commandemens de Dieu font impoffibles à des juftès, &c. au lieu de mettre dans un fens indefini, aux hommes juftes. Mais connoitre pour la traduction que a fuivi dans l'Ordonnance eft fidele, il fuffit de lire le cinquième & le fixiéme Extrait imprimé à la fin de la même Ordonnance, & tiré de l'Ouvrage qui commence, In nomine Domini, avoué de tout le parti. Un zelé défenfeur de Janfenius y foutient, que la Propofition, quoi qu'exprimée d'une maniere indefinie, peut neantmoins s'entendre non de tous les juftes, mais feulement de quelques juftes en particulier, & que c'eft dans ce dernier fens que Janfenius l'a avancée. L'Auteur de la Défenfe, qui diffimule dans l'article 15. le contenu de ces Extraits, par une contradiction manifefte, a prétendu lui-même article 17. en juftifier la doctrine.

Le P. Juenin eft donc bien à plaindre de s'être 'déclaré pour la caufe des Janfeniftes par des fupofitions fi honteufes & fi condamnables.

Tout est manifestement faux dans ces infignes fuppofitions. Il eft évident qu'Innocent X. a cenfuré le fens de Jansenius dans ces Propositions, &

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