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dans l'expérience précédente, ne prouve rien en fa veur de cette Opinion.

Une dragme d'Eau diftillée, qui, battue avec un pilon de verre dans un mortier de verre, l'un & l'autre bien polis, s'épaiffit & fe convertit en partie en une pâte extrêment fine & déliée, ne devient pas une preuve plus fatisfaifante en ce genre. Elle prouve uniquement que du mortier & du pilon de verre, fe détachent peu peu des particules trèsfines, qui mêlées avec celles qu'y dépofe l'air ambiant, y forment cette pâte.

163. REMARQUE. Selon Heraclite, il n'y a également qu'un feul Principe des Corps: c'eft le Feu. Le Feu, difoit-il, fe change en air, l'air en pluie, la pluie en terre, la terre en toute forte de corps,

Ce grand Pleureur vouloit fans doute faire rire : en donnant sérieusement, pour une hypothese philofophique, ces puériles Métamorphofes, qui n'ont aucune lueur de vraisemblance & de raison.

SIXIEME SENTIMENT.

LES TROIS ÉLÉMENS DE Descartes.

163. EXPLICATION. Après avoir reconnu bien fin cérement, que l'Univers a été réellement créé comme le rapportent les Livres Saints: Defcartes examine comment auroit pu être produit de la maniere la plus fimple, ce même Univers. Donnez-moi fimplement une Matiere homogene, & un Mouvement permanant, dit Defcartes: c'est tout ce qu'il me faut, pour for'mer le Monde vifible.

Que le Tout-puiffant créé une Matiere homogene & dans fa fubftance & dans fes configurations, divifée en petits cubes femblables: qu'il imprime dans le Plein à tous ces petits Cubes égaux, un double Mouvement de rotation, l'un autour de leur centre

particulier, l'autre autour de certains centres communs de-là naîtront & les divers Principes des corps & l'harmonie générale de la Nature. Car voici ce qui doit néceffairement réfulter de cette très-fimple & très-féconde hypothese. (Fig. 6).

1o. Ces Cubes A, dans le Plein, ne peuvent fe mouvoir autour de leur centre particulier, fans que leurs angles fe rompent avec violence; & fans qu'il fe détache par-tout du fein des parties rompues & brifées avec effort, comme un nuage ou un torrent de particules incomparablement plus petites; que la violence & l'effort de la divifion, feront jaillir avec une inconcevable vîteffe, laquelle leur fera perfévéramment & inamiffiblement affectée.

Voilà un premier Elément, la Matiere fubtile D; qui, douée d'une vîteffe prodigieufe, & capable de prendre & de perdre fucceffivement toutes les figures poffibles, fe trouve propre à pénétrer avec une éton nante facilité, dans les moindres pores de tous les Corps.

les

Telle eft la Matiere qui compofe le Soleil, Étoiles, tous les Corps lumineux. Primum Elementum: Materia fubtilis, motu acta perniciffimo, nullius figura tenax.

II°. Ces Cubes ne peuvent continuer à rouler fur leur centre particulier, fans ufer par le frottement leurs parties anguleufes; fans parvenir à fe convertir enfin en globules liffes & polis, d'une plus ou moins grande maffe.

Voilà un fecond Elément, la Matiere globuleuse B; dont les molécules different de la matiere fubtile & par leur maffe qui eft bien plus grande, & par leur figure qui eft déterminée & conftante.

Cette Matiere globuleuse remplit les efpaces immenfes des Cieux; ou les efpaces qui feparent le Soleil & les Etoiles, des Corps opaques, répandus

& roulants dans leurs Tourbillons. Secundum Elementum: Materia globulofa, Materia atherea; feu Ma teria qua in globulos efformata, ethereas implet plagas.

III°. Ces Cubes n'ont pu se mouvoir dans le Plein autour de leurs centres particuliers, fans que leurs angles folides aient formé, en fe détachant du refte du cube, des Maffes anguleufes & irrégulieres; différentes, & de la Matiere globuleuse, qui est comme le centre & le noyau arrondi des Cubes divifés; & de la Matiere fubtile, qui eft comme une pouffiere échappée en infiniment petits éclats, du fein des parties notables de la divifion.

Voilà donc un troisieme Elément, la Matière branchue & canelée C, immensement variée dans ses maffes, irréguliere dans fes configurations, peu propre au mouvement, deftinée à former des Corps folides & maffifs par l'entrelacement de fes angles, de fes branches, de fes concavités.

La Terre, les Planetes, les Cometes, font principalement compofées de ce troifieme élément. Tertlum Elementum: Materia ramofa, Materia ftriata, ex quá folida conflantur Corpora.

IV°. Que ces trois Élémens, encore mêlés & confondus entre eux, aient été, dès le commencement des tems, partagés en tout autant de grandes Portions, qu'il y a aujourd'hui d'Etoiles fixes; & que chaque Portion de cette matiere ainfi mêlangée, ait reçu une impulfion générale, qui l'ait forcée à fe mouvoir comme un Fluide, autour d'un Centre commun !

De-là, felon Descartes, l'origine des divers grands Tourbillons; qui, par les feules Loix mécaniques, ont formé ou pu former ce vifible Univers: en le fuppofant divifé en autant de grands Tourbillons, qu'il y a d'Etoiles fixes.

Notre Soleil eft le centre d'un grand Tourbillon,

dans lequel nagent & circulent nos Planetes, & qui s'étend jufqu'aux Tourbillons des Etoiles voifines. Chaque Etoile eft le centre d'un autre grand tourbillon; dans lequel nagent auffi des planetes femblables aux nôtres, & à qui l'étoile placée au centre 1ert de Soleil.

164. EXPÉRIENCE. Si on fait tourner rapidement fur fon axe, un Globe creux de verre, dans lequel on ait mis trois Liquides de différente pefanteur, de l'huile, de l'eau, du mercure; le plus léger refte au centre le plus pefant fe porte vers la circonférence : le troifieme fe place entre les deux autres. La même chofe, dit Defcartes, a dû arriver aux trois Elemens, primitivement mélangés & confondus dans les grands Tourbillons.

I. La Matiere fubtile, le plus petit & le plus mobile des trois élémens, a dû demeurer au centre du Tourbillon; & y former un Corps lumineux, qu un Soleil.

ou

II°. La Matiere anguleufe & cannelée, le plus maffif & le moins mobile des trois élémens, a dû être emportée plus ou moins avant, felon fon plus ou moins d'inertie, vers la circonférence du Tourbillon.

Eparfe d'abord au hafard vers la circonférence du Tourbillon, cette matiere branchue & cannelée a dû s'y former fucceffivement en Globes opaques, de différente denfité & de différente grandeur; que l'Impulfion fera enfuite defcendre plus ou moins avant vers le centre du Tourbillon, felon leur plus ou moins de denfité.

III. La Matiere globuleuse, plus maffive que la Matiere fubtile, moins maffive que la Matiere bran chue & cannelée, a dû fe placer vers le milieu du Tourbillon. Les divers globules de ce fecond élé

ment,

ment, n'étant pas tous d'égale maffe: ils ont dû fe diftribuer en différentes couches; les plus petits plus près du centre, les plus grands plus loin du centre.

Chaque couche d'un Tourbillon, s'efforce en vain de s'enfuir par la tangente: elle est forcée à fe mouvoir circulairement ou elliptiquement, par la cou che fupérieure, qui l'arrête & la captive dans fon efpace. La derniere couche d'un Tourbillon, par exemple, du Tourbillon folaire, eft arrêtée par les dernieres couches des Tourbillons contigus; & le dernier de tous les Tourbillons existans, est arrêté & captivé dans fa derniere couche, par le fimple défaut d'un Efpace ultérieur, dans lequel cette der niere couche puiffe s'étendre & fe répandre.

Chaque Tourbillon, en roulant autour de fon cen tre commun ou de fon étoile, emporte par fon impulfion, les Planetes qui nagent dans lui : à peu près comme un Courant d'eau, emporte un arbre qui flotte dans fon onde.

Les Planetes plus éloignées du centre, mettent plus de tems que les autres à faire leur révolution: parce que les différentes couches des Tourbillons ayant toutes la même vîteffe; les couches plus éloignées du centre, doivent mettre d'autant plus de tems à faire leur révolution, qu'elles ont plus d'ef pace à parcourir pour l'achever.

165. REMARQUE. Tel eft en précis, le fublime Rêve de Descartes, fur l'origine & fur le mécanifme de l'Univers!

Ce n'eft point ici le lieu de fuivre ce Philofophe célebre, à travers les divers théâtres de la Nature; où, par le moyen de fes trois Elemens & de l'Impul fion, imitateur ou rival du Créateur, fon audacieux génie forme les différens Corps, folides, liquides fluides; fait naître la Pefanteur, d'une matiere fans Tome I.

N

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