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DÉMONSTRATION. Io. Il est clair d'abord qu'une Caufe phyfique ne peut jamais produire un effet qui excede fon activité. Donc le changement produit dans un Corps en mouvement, ne peut jamais excéder l'activité de la Caufe phyfique qui le fait naître. (Mit. 276 & 278).

II°. On fait enfuite que les Caufes motrices font des causes néceffaires, qui agiffent toujours felon toute l'étendue de leur activité. Donc l'activité de la Cause, est toujours proportionnelle à la quantité de l'effet. Donc un effet double ou triple, annonce une activité double ou triple dans la caufe: donc une activité double ou triple dans la caufe, eft toujours connexe avec une quantité double ou triple dans l'effet.

?

Donc la grandeur de l'effet, fait connoître l'activité de la Caufe qui le produit ; & l'activité de la cause fait connoître la grandeur ou la quantité de l'effet qui doit être produit. C. Q. F. D.

312. REMARQUE. L'Ame humaine, foit qu'on la regarde comme Caufe efficiente, foit qu'on ne la regarde que comme Caufe occafionnelle du mouvement, n'eft point une Caufe motrice proprement dite puifque les Caufes motrices dont il eft question dans la Phyfique, font toujours une action résultante d'une maffe multipliée par une viteffe.

Par l'acte de fa volonté, l'Ame humaine produit ou occafionne librement dans les efprits animaux ou dans les fibres & dans les mufcles de fon corps, une plus ou moins grande fomme de mouvement. Le mouvement de ces efprits animaux, de ces fibres & de ces muscles, voilà la Cause ou la Force motrice proprement dite dans l'homme : force auffi néceffaire en elle-même, & auffi inévitablement connexe avec fon effet, quand elle exifte, que la for

ce motrice d'une Machine à leviers & à poulies: avec cette feule différence, que la force motrice dans une pure Machine, eft néceffaire & dans fon existence & dans fon influence; au lieu que la force motrice dans l'homme, néceffaire dans fon influence, dépend de l'Ame libre, quant à fon exiftence: parce que l'Ame qui met librement en jeu fes Forces motrices, eft la maîtreffe d'en empêcher, d'en modifier, d'en fufpendre l'action, comme il lui plaît, en ce qui concerne les mouvemens libres du Corps qu'elle anime. (Mét. 271 & 1117).

OBJECTIONS A REFUTLR.

313. OBJECTION I. Si la premiere Loi du Mouvement, eft vraie & réelle; fi tous les Corps tendent naturellement à conferver toujours le même mouvêment dont ils font une fois animés, il s'enfuit :

1°. Que la Nature s'eft impofé abfurdement une Loi qu'elle ne fuit jamais : puifque tous les corps foumis à nos obfervations, éprouvent des changemens continuels & dans leur direction & dans leur viteffe.

II°. Que tout Mouvement une fois exiftant devroit être naturellement un Mouvement perpétuel : quoiqu'il foit conftant que tous les Corps tendent naturellement au repos; & que le Mouvement perpétuel répugne dans l'Ordre phyfique des chofes.

III°. Que Dieu, unique auteur de tout Mouvement, ayant commencé à mouvoir un Corps, devroit être obligé à mouvoir perfévéramment ce corps de la même maniere: ce que l'on n'a aucune raifon d'affirmer.

RÉPONSE. Io. La Nature ne s'eft point impofé une Loi chimérique, en s'impofant la loi que l'on attaque. En vertu de cette premiere Loi, tout Mouvement doit persévérer tel qu'il a commencé : à moins que

quelque Caufe ne lui occafionne du changement. Or toutes les fois qu'il arrive quelque changement dans le mouvement; il y a quelque caufe qui occafionne ce changement: donc la Nature fuit conftamment & perfévéramment la Loi qu'elle s'eft impofée, ou plutôt, qui lui a été impofée par fon Auteur.

Un Corps qui fe meut dans une direction quelconque auprès de la Terre, éprouve toujours une réfiftance de la part des Fluides qu'il déplace néceffai

.rement.

Un Corps qui fe meut de bas en haut, éprouve une réfiftance de la part de fa gravité; qui diminue fans ceffe fon mouvement.

Un Corps qui fe meut de haut en bas, reçoit fans ceffe de la part de fa gravité, de nouvelles impulfions; qui augmentent & accélerent fon mouvement.

Un Corps qui fe meut horisontalement dans la région de l'air, eft fans ceffe follicité & déterminé par fa gravité, à s'approcher du centre de la Terre. Et s'il fe meut horisontalement fur un Plan plus ou moins poli: il effuie une réfiftance de la part de fa gravité; qui, l'appliquant & le preffant continuellement contre le plan, oppofe fans ceffe au mouvement horisontal, un obftacle à vaincre, un obstacle capable de le détruire à la fin totalement.

On voit par-là que, fi les Corps paroiffent tendre naturellement ou au repos ou à un changement de mouvement : cette tendance a pour fource, non leur nature même; mais la réfiftance ou l'action d'une foule de caufes, qui font étrangeres & à leur nature & à leur mouvement actuel.

II°. En vertu de cette premiere Loi, tout Mouvement devroit être invariable & toujours permanant: fi aucune cause ne s'oppofoit à fon invariable permanançe, Mais comme nous ne connoissons aucune efpece de mouvement, qui ne rencontre dans la Na

ture, des caufes propres à changer fans ceffe ou fa direction ou fa viteffe: il s'enfuit qu'en vertu de cette premiere Loi, tout mouvement dans la Nature, loin d'être conftamment le même, felon fon exigence naturelle & intrinfeque, doit constamment changer, felon l'occurrence & l'exigence des caufes deftinées à opérer ces changemens.

Le Mouvement perpétuel répugne naturellement : parce que, pour que le Mouvement perpétuel eût lieu, il faudroit, ou qu'un corps en mouvement pût continuer à fe mouvoir fans ceffe, fans rencontrer aucun obftacle; ou qu'un corps en mouvement pût produire dans un reffort ou dans une machine qu'il iroit mettre en jeu, un mouvement plus grand que

fon

propre mouvement; un mouvement qui retournant tout entier dans fa caufe, pût réparer les pertes continuelles qu'elle effuie à l'occafion des obstacles oppofés à fon mouvement primitif. L'une & l'autre hypothefe paroît impoffible dans l'état naturel des choses: donc, dans l'état naturel des chofes, le Mouvement perpétuel est chimérique,

III. L'Auteur de la Nature & du Mouvement, eft un être effentiellement fage, conféquent, immuable, incapable d'agir par caprice & fans raifon : ce qu'il a une fois établi & décerné, est décerné & étabii pour toujours. (Mét. 952).

Ainfi, affirmer que le mouvement donné à un Corps par l'Auteur de la Nature, ne changera point, s'il n'y a pas de caufe qui en exige le changement: c'eft affirmer fimplement que l'Auteur de la Nature, eft un être invariable dans fes volontés & dans fon action, un être toujours conféquent à lui-même, & incapable d'agir par boutade & fans raison: ce qui, loin d'être une abfurdité, eft un Principe trèscertain & très-philofophique,

Cette caufe ou cette raifon de changement dans

le mouvement d'un Corps, eft ou l'action de fa gra vité, ou la réfiftance des fluides, ou le choc de différens corps caufes dont on apperçoit toujours ou féparément ou conjointement l'influence; toutes les fois qu'on voit du changement dans le mouvement d'un corps.

314. OBJECTION II. Si la feconde Loi du Mouvement, eft vraie & réelle; fi tout Corps en mouvement, tend naturellement à fe mouvoir par une ligne droite :

I. Il s'enfuit d'abord que le Mouvement en ligne courbe, ellipt que ou circulaire, est un mouvement contre nature puifque c'est un mouvement contraire à l'exigence naturelle de tous les corps en

mouvement.

Or, la Terre, les Planetes, les Cometes, fe meuvent en ligne courbe autour du Soleil. Le Soleil luimême fe meut en ligne courbe, au centre du Monde planétaire, autour de fon centre & de fon axe; & il eft affez probable que les Etoiles ont un mouvement femblable à celui du Soleil, un mouvement de rotation autour de leur axe fenfiblement immobile. Donc tous les Corps les plus notables de l'Univers, auroient un mouvement contre nature.

II°. Il s'enfuit encore qu'un Corps mu en ligne courbe, elliptique ou circulaire, tend à fe mouvoir par la Tangente. Or, un corps ne peut point tendrę à fe mouvoir par la tangente.

Car un Corps mu en ligne circulaire ou elliptique, par exemple, la Terre mue autour du Soleil, ne peut tendre à fe mouvoir par la tangente à fa courbe: fans tendre à s'éloigner du centre de fon mouvement. Or la Terre ne peut tendre naturellement à s'éloigner du centre de fon mouvement, du centre du Soleil: fans quoi elle tendroit naturellement & à s'approcher

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