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nant du difcours du Roi quand Madame de Rofoi lui avoit présenté sa fille, ne voulut pas la demander pour fon frere, fans en avoir parlé à Sa Majefté. Le Roi, rempli de bontez pour moi, & toujours attentif à mes interêts, dit à Renaud de Dammartin qu'il avoit des raisons pour s'opposer à cette alliance, & le chargea de prier fon frere de ne point y fonger. Cette priere, ou plûtôt cette défense, ne diminua rien de la passion de Robert, peut-être même l'irrita - t'elle encore; mais elle renversa ses espérances, & le força de cacher fes fentimens. En arrivant à Rethel, j'avois appris de Mademoiselle de Rocheville, ce détail, si satisfaisant pour moi. Madame de Rofoi étoit trop pénétrante, pour ne pas percer la vérité; elle pensa que j'avois prévenu le Roi: cependant elle ne

parut pas le soupçonner; au contraire, elle dit que fi Renaud de Dammartin lui eût fait l'honneur de lui parler, elle lui auroit épargné la peine de s'ouvrir au Roi, en lui apprenant qu'elle avoit des engagemens pour sa fille.

L'arrivée du Vicomte de Melun fit renaître les espérances du Comte de Dammartin: il lui parla; mais il trouva le Vicomte déja prévenu par le Roi; je veux dire, que ce Prince s'étoit assez expliqué au Vicomte, pour qu'il rejettât toutes les propofitions qu'on pourroit lui faire pour fa Niece, à mon préjudice. Ce fage Prince lui avoit appris les engagemens de sa sœur avec mon pere: il avoit fait plus; fa bonté étoit allée jufqu'à dire au Vicomte, que c'étoit à lui à vaincre la répugnance que Madame de Rofoi montroit pour un mariage fi convenable. Le Roi n'en dit pas davantage au Vicomte; il voulut épargner à ce frere plein d'honneur, la honte dont il se seroit crû couvert, s'il avoit appris l'égarement & les artifices de fa fœur.

Mon pere fut chez le Vicomte de Melun dès le lendemain qu'il eut parlé à Madame de Rofoi; il fut furpris & charme de le trouver déja instruit. J'ai parlé à ma fœur, lui dit le Vicomte; elle est convenuë des engagemens de fon mari avec vous; elle m'a de plus assuré qu'elle étoit dans le dessein de les tenir. Je l'avoüe cependant, j'ai apperçû chez elle, ainsi que le Roi m'en avoit prévenu, de la répugnance à voir ma Niece Comtesse de Rethel du moins si promptement. Elle m'a dit que des raisons, dont elle ne pouvoit m'instruire, l'obligeoient à différer encore quelque tems; puis elle a ajouté que, comme mere, elle étoit la maîtreffe absoluë de donner ou de refuser sa fille. A ce discours, j'ai répondu en frere qui veut qu'une fœur se respecte, respecte la volonté d'un mari, & les engagemens qu'il avoit pris avec un homme tel que vous. Mon pere sentit la nécessité de ne rien lais fer ignorer au Vicomte: il parla; mais le Vicomte, prévenu d'eftime pour sa sœur, la défendit long-tems. Il opposa à mon pere la maniere dont elle recevoit les foins de Guebriant, & le dessein où elle paroisfoit être de recompenser sa respectueuse tendresse. Il est vrai que Madame de Rofoi, depuis quelque tems, n'alloit que très-rarement à la Cour, & qu'invisible chez elle à tout le monde, elle ne voïoit que Gue

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briant. Après une longue con versation, le Vicomte convaincu, dit à mon pere: Il faut, fans paroître sçavoir le motif odieux des retardemens de ma fœur, la contraindre à confentir au retour du Comte votre fils: il faut qu'incessamment elle le rende possesseur d'un bien, qui, felon les loix de l'honneur, lui appartient. Hélas! le Vicomte n'exécuta que trop bien ce projet. Il lui parla, & d'un ton fi ferme, qu'elle lui promit enfin de m'é crire, pour m'annoncer mon bonheur, & pour merappeller. Elle lui demanda seulement deux jours, en l'assurant qu'en sa préfence, elle exécuteroit la parole qu'elle lui donnoit. Le Vicomte dit à mon pere ce qu'il avoit obtenu de Madame de Rosoi. Ce court délai ne leur parut point suspect: il fut cependant trop

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