Charles eût l'humiliation de mendier ce fecours par des lettres très-preffantes. » Le plus puiffant Prince de » la terre fut réduit en cet état, dit Mézeray, » pour n'avoir pas eu » affez de force d'efprit, & pour » avoir été deftitué d'enfans légi» times deux chofes très-nécef " » faires à un Souverain «. Il mourut peu de temps après (le 8 Janvier 888), ou de douleur ou, feion quelques Auteurs, étranglé par l'ordre de ceux qui pouvoient encore redouter fes droits. Son déplorable règne fert d'époque au fiége mis devant Paris par les Normands, & fa conduite y donna lieu. Entraîné par de mauvais confeils (car par lui-même il étoit incapable d'un crime), il engagea Annal. Fuld. dans une conférence Godefroy Chef des Normands, & s'y étant rendu le plus fort, par artifice, il le fit maffacrer avec tous les Nor mands de fa fuite : en même temps Hugues, ce bâtard de Lothaire II & de Valdrade, dont nous avons déjà parlé, Hugues, qui, lui difputant toujours la Lorraine, étoit toujours l'Allié des Normands, & qui l'étoit encore plus particulièrement de Godefroy, auquel même il avoit donné fa foeur en mariage, Hugues étant venu trouver Charles fur fa parole, pour conférer avec lui de leurs intérêts, Charles le fit arrêter & lui fit crever les yeux. On avoit perfuadé à Charles qu'en fe défaifant ainfi des deux Chefs des ennemis, il termineroit pour jamais la guerre, & par cette violence perfide il la fit renaître avec plus de fureur que jamais. Les Normands coururent à la vengeance; leur jufte ressentiment ne mit plus de bornes Chronic. de aux ravages : ce fut alors qu'ils fe geft. Norm. déterminèrent à ce fameux fiège de Paris, foutenu avec tant de conf tance par Goffelin Evêque de cette ville, par l'Abbé Ebon fon neveu, & fur-tout par le vaillant Comte Eudes, digne fils de Robert le Fort. Il est à remarquer que Charles le Gras n'est point compris dans la lifte des Rois du nom de Charles qui ont régné fur la France. On ne compte, dans la Race Carlovingienne, que trois Rois de ce nom : Charlemagne, Charles le Chauve, & Charles le Simple. Charles le Bel, quatorzième Roi de la Race Capétienne, eft compté pour le quatrième Roi du nom de Charles. Cette omiffion de Charles le Gras peut venir des droits de Charles le Simple, que la Nation n'avoit pas tellement perdus de vue qu'elle ne les eût confacrés, en fe chargeant de la tutèle de ce jeune Prince, & en la confiant à un des plus grands Seigneurs du Royaume. D'ailleurs cette même Nation, qui avoit élu Charles le Gras, fembloit avoir révoqué fon élection, en abandonnant ce Prince. On peut remarquer encore que Charles le Gras eft le dernier Prince légitime de la Race Carlovingienne qui ait poffédé l'Empire. Si un bâtard de cette Maison a encore porté ou traîné ce titre d'Empereur, il eft für du moins que depuis Charles le Gras, l'Empire n'a plus été ni uni à la Couronne de France, ni poffédé par aucun Prince Carlovingien légitime. Sigonius dit que fur la fin de l'an 884, fous l'empire de Charles le Gros, le Pape Adrien III fit deux décrets très-préjudiciables à la Poftérité de Charlemagne; le premier, que le Pape étant élu, feroit facré fans attendre le confentement de l'Empereur: Ut Pontifex defignatus confecrari fine præfentiâ Regis aut legatorum ejus poffet. Le fecond, que Charles le Gros venant à mourir. fans enfans, le Royaume d'Italie & le titre d'Empereur demeureroient aux Italiens: Ut moriente Rege Craffo fine filiis, regnum Italicis Princi- Sigonius, de pibus, unà cum titulo Imperii tra- ann 884. deretur. Malgré ces décrets, l'Empire ne fit que passer sur la tête de quelques Italiens; il fe fixa, comme nous aurons bientôt occafion de le rapporter, chez les Allemands; nous voulons feulement obferver ici que, felon Le Blanc, ces Empereurs Allemands jouirent long-temps du droit de confirmer l'élection des Papes, & qu'ils exercèrent dans Rome tous les autres droits régaliens. Il est à remarquer que le fameux décret du Pape Nicolas II, du mois d'Avril 1059, pour l'élection des Papes, eft bien différent dans Baronius & dans Le Blanc ; celui regno Italia, |