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& l'ufage des actes étant très-peu commun, la preuve de la parenté fe faifoit par témoins, lefquels dépofoient d'avoir entendu dire à leurs pères ou à leurs aïeux, qu'il y avoit de la parenté entre telle & telle famille. Les Papes donnoient la plus grande authenticité à de pareilles preuves, & la plus grande étendue aux prohibitions réfultantes d'une parenté ainfi prouvée. A la vérité, Judith avoit aliéné les efprits par des intrigues dignes de Brunehaut, & même par des crimes dignes de Frédégonde. Frédéric Evêque d'Utrecht, Prélat d'une vertu rigide, plus touché peut-être qu'il n'auroit dû l'être de ce prétexte de parenté, reprocha publiquement à Louis le Débonnaire, à fa table, fon mariage avec Judith, par un emportement de zèle qu'on appeloit alors liberté apoftolique, & qu'on auroit pu appeler un manque de refpect

& une témérité, puifque c'étoit infulter l'Empereur chez lui, à fa table, & d'ailleurs l'avilir aux yeux de fes fujets. Judith qui auroit pu faire exiler Frédéric, le fit affaffiner.

On renferma de nouveau Louis le Débonnaire dans l'Abbaye de S. Médard de Soiffons; mais on ne l'invita plus à fe faire Moine, on prit des mesures plus violentes pour affurer fa dépofition. Ebon, Arche- Thgan, . vêque de Reims, fils d'un Serf de vit Lud. Pii. la Glèbe, Ebon, élevé aux plus hautes dignités de l'Eglife par l'Empereur Louis le Débonnaire, mais, qui s'étoit vendu à l'Empereur Lothaire, parce que celui-ci étoit le plus fort, propofa, dans une Affemblée des Evêques & des Grands qui fe tenoit à Compiègne, `de dégrader Louis, de le condamner à la pénitence publique, de lui interdire pour toujours l'ufage des armes,

tin.

& de le revêtir d'un habit de Pénitent, qu'il ne pourroit jamais quitter, parce qu'on jugeroit qu'il lui étoît; donné des crimes ou pour des

pour

fautes qu'il falloit expier par une pénitence qui durât toute la vie. Ce projet fut exécuté. Les Evêques drefsèrent un écrit que l'Empereur figna, & par lequel il fe reconnút coupable, 1°. de facrilège, parce qu'il

avoit violé le ferment qu'il avoit Annat Ber- fait de bien gouverner (accufation Aunal. Me- un peu vague); 2°. d'homicide Bertin. Fuld, commis dans la perfonne de Bernard for neveu; c'étoit en effet le

tenf.

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crime qui pefoit le plus fur fon
coeur; 3°. enfin d'être l'auteur de

tous les maux que fon peuple fouf-
froit par
les diffentions domestiques.
Ce point étoit vrai encore; la foi-
bleffe du Roi produit tous les

maux.

Parmi les crimes dont on le chargeoit, & dont il se laiffoit charger,

étoit celui d'avoir fait la guerre en Carême; car en tout autre temps, la guerre, aux yeux du Clergé même, étoit une action louable & glorieuse, dont il ne falloit s'abftenir en Carême que par mortification. Plût à Dieu au moins que la Religion eût continué de dérober à la guerre générale certains temps de l'année comme elle déroba dans la fuite, aux guerres privées (1), certains jours de la femaine, ne pouvant obtenir davantage !

Louis le Débonnaire lut lui-même à haute voix cet écrit infamant, & le remit aux Evêques, qui le posèrent fur l'autel; il demanda pardon publiquement à fes fils de leur avoir fait

la guerre; puis il fe profterna devant l'autel fur une haire: les Evêques lui détachèrent fa ceinture militaire, le dépouillèrent de fes vêteinens,

(1) La trève du Seigneur.

92.

Annal. Fuld.

& le revêtirent de l'habit de Péni

tent.

Le Peuple fut ému à cet étrange fpectacle, il s'affligea de tant d'abaiffement, & s'indigna de tant de violence; la pitié entra dans tous les coeurs; la Nature même reprit une partie de fes droits. Pepin & Louis, honteux d'avoir laissé traiter ainsi leur père & le fils de Charlemagne, prièrent du moins Lothaire de le Thegan. c. remettre en liberté: fur fon refus Vit. Lud. Pii. ils prirent les armes, & Lothaire Annal. Ber fe voyant abandonné à fon tour, Jaiffa fon père libre à Saint Denis ; mais Louis ne voulut pas reprendre les ornemens impériaux avant d'avoir été réconcilié à l'Eglife par les Evêques la cérémonie de fa réhabilitation fe fit dans l'église de Saint Denis avec autant de folennité qu'en avoit eu celle de fa dépofition; les Evêques lui ôtèrent de leurs mains ce vil vêtement d'efclave fpirituel

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