ou

menti dans la fuite par plufieurs exemples célèbres. Au reste Bernard étoit fils d'une concubine, & en ce cas Charlemagne voulut qu'il fuccédât à fon père, confor. mément à l'ancien ufage qui fubfiftoit encore; ou il étoit légitime, & en ce cas il auroit pu, fur-tout étant fils de l'aîné, être, par le choix de Charlemagne, fon principal fucceffeur au préjudice de Louis. Charlemagne l'avoit borné au Royaume d'Italie ; & de même que Pepin fon père n'avoit poffédé ce Royaume que fous Charlemagne, qui s'y étoit réfervé l'autorité, & qui fur-tout, à titre d'Empereur, étoit le vrai Souverain de Rome, il paroît que Bernard n'étoit auffi en Italie que le Lieutenant de l'Empereur Louis le Débonnaire fon oncle. Mandé à la Cour de Chron. Mo

l'Empereur, il y vint, & fe reconnut formellement fon vaffal, foit

fiae.

que Charlemagne l'eût ainfi ordonné, foit que Bernard ne fît que céder à la force.

Charlemagne, qui, comme tous les grands Princes, fe connoiffoit en hommes, avoit mis auprès de Bernard, pour diriger fa jeunesse, l'homme de fa Cour qui avoit le plus de mérite. C'étoit Vala, ré- . puté Prince du Sang, fils du Comte Bernard, lequel étoit fils naturel de Charles Martel: Vala fut fufpec à l'Empereur, parce que fes envieux voulurent qu'il le fût; on le manda : l'Empereur fut content de fes foumiffions, & ce fut dans la fuite un des hommes qui eurent le plus d'afcendant fur fon esprit.

Louis le Débonnaire avoit toujours à Rome cette plénitude de pouvoir qu'avoit eue fon père, & qu'on regardoit comme attachée au titre d'Empereur d'Occident. Mais on s'apperçut bientôt à Rome

que ce pouvoir n'étoit plus dans les mains de Charlemagne ; & les Papes, attentifs à tout, fongèrent en conféquence à fe rendre indépendans de leurs bienfaiteurs.

Il y eut une nouvelle confpiration contre le Pape Léon III. Dans le temps de la confpiration de Pafcal & de Campule, on avoit vu le Pape recourir à Charlemagne, comme à fon Seigneur, & lui demander justice & vengeance; on l'avoit vu auffi demander grace, au moins de la vie, pour les ennemis convaincus & condamnés. Cette fois-ci, le même s Pape fe fit juftice à lui-même, & une juftice rigoureufe; il fit mourir plufieurs des coupables : cette rigueur blessa doublement l'Empereur, & comme contraire à fa fouveraineté impériale, & comme contraire à la clémence pontificale, & à l'horreu que l'Eglife a pour le fang; il en fit faire de vifs reproches à Léon III,

geft. Ludov.

qui fe crut obligé de lui faire des excufes. L'Empereur envoya Bernard, Roi d'Italie, comme fon Lieutenant, prendre connoiffance de cette affaire fur les lieux; & les Romains, plus irrités que l'Empereur, de la cruauté de Léon, s'étant révoltés contre ce Pape, Bernard eut ordre encore de pacifier les troubles au nom de l'Empereur, comme modérateur fuprême de rItalie.

Léon mourut le 23 Mai 816. Nous avons vu que lorsqu'il avoit été nommé Pape à la place d'Adrien, fon premier foin avoit été d'envoyer demander l'agrément de CharlemaThegan. de gne. Etienne V, élu à la place de Léon, n'attendit point, pour s'inf taller dans le Pontificat, la confirmation de Louis; cependant, fur les plaintes de ce Prince, il lui fit prêter ferment par les Romains, & vint le trouver à Reims, apportant

£ 16. Anaitafe.

avec lui, pour l'Empereur & pour l'Impératrice, deux couronnes d'or, qu'il leur mit folennellement fur la tête, dans la Cathédrale de Reims; car la politique des Papes étoit, d'un côté, d'acquérir au Saint Siége, par cette cérémonie, des droits fur l'installation des Empereurs, tandis que, d'un autre côté, les mêmes Papes tâchoient d'enlever infenfiblement aux Empereurs le droit de confirmer leur élection.

Lorfque Léon III avoit couronné Charlemagne à Rome, ç'avoit été une furprise réelle ou fuppofée ; lorfque Pepin le Bref s'étoit fait couronner en France avec fes enfans par le Pape Etienne III, il avoit eu, pour en user ainfi, des raisons politiques qui ne fubfiftoient plus du temps de Louis le Débonnaire : Charlemagne, en ordonnant à celuici de fe couronner de fa propre main, avoit voulu faire entendre