Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Tome II, p. 375.

pour moi, le beau bas-relief de marbre qui fait l'ornement
de fon Cabinet à Befançon. Ce monument a été trouvé
auprès de ce même Poligny, il y a environ trente ans,
par un payfan qui travailloit à la terre; un coup de pioche
a même écorné l'angle placé derrière la tête de la Diane.
M. Dunod a décrit cette agréable antiquité dans fon Hif-
toire de Besançon ; mais il ne l'a point fait
graver: c'est
un avantage pour mon Recueil, que d'avoir une liaison
qui le rapproche d'un auffi bon ouvrage.

L'agrément & la fertilité du canton dans lequel Poli→ gny est situé, avoient engagé les Romains à bâtir aux environs plufieurs maifons de campagne; les briques & les décombres que l'on trouve de tous les côtés, ne permettent pas d'en douter: mais en foupçonnant les Romains d'avoir fait beaucoup de dépenfe pour ces maisons de délices, je fuis bien éloigné de croire que ce bas-relief ait été travaillé dans la Gaule. Je fuis perfuadé, au contraire, que quelque Romain, riche ou curieux, l'a tranf porté autrefois d'Italie : le médiocre volume de ce marbre a même donné beaucoup de facilité pour ce tranfport; mais en quelque endroit qu'il ait été travaillé & qu'il ait été confervé, il doit avoir été diftingué. Le fujet de Diane convenoit à ce canton; mais l'Artiste a traité fa compo-. sition d'une manière agréable, & qui cependant n'eft pas exempte de reproche, quant à l'exactitude de la Fable, dont les caractères font donnés, & que les Arts doivent fuivre avec autant de fcrupule que ceux de l'Hiftoire: les Payens étoient encore plus obligés à cette exactitude; la Fable étant le fondement de leur Religion. En effet, on ne voit point dans cette composition Diane toujours courant aux bois; mais Diane en repos, qui paroît fixée par un Dieu, par un Amant, qui, pour lui plaire, eft auprès d'elle fous la forme de l'objet dont elle étoit le plus occupée. L'Artifte fait encore plus ; il préfente l'allégorie de l'allégorie, c'eft-à-dire, la Chafteté elle-même, féduite par la Volupté.

Оп

On eft fi fort accoutumé aux métamorphofes dans le fystème de la Fable, que l'on cherche d'abord celle que ce bas-relief peut préfenter, & l'Artifte induit le Spectateur en erreur, puifqu'en effet il commet une injuftice. On ne peut reprocher que le feul Endimion à la vertu de Diane; encore feroit-il fort aifé de la défendre, & de regarder cette fuppofition comme une allégorie dépendante du goût de la chaffe, dont un Chasseur eft animé, & qui l'engage à devancer le jour : c'est la Lune dont il s'agit en cette occafion, ce n'eft point Diane; elle, que toute l'Antiquité repréfente comme Vierge, & que les Hymnes d'Homère en particulier célèbrent du côté de la chafteté & de la vertu. Le choix de la position & celui de l'expreffion font très-agréables dans ce bas-relief; mais ces parties n'ont point de jufteffe, encore moins de convenance; il faut donc les regarder comme une licence de l'Artifte, qui pourroit dire, pour s'excufer, qu'il n'eft pas plus étonnant de voir Diane fur fon bas-relief tenir un cerf, pour ainfi dire, dans fes bras, que de la voir, comme Paufanias nous la préfente au fujet d'une ancienne ftatue des Eléens, tenir un léopard de la main droite, & un lion de la gauche. Une pareille excufe pourroit n'être point reçue, puifqu'en effet il ne s'agit que de la chaffe dans la ftatue que l'on voyoit en Elide. Le travail des objets principaux eft trèsbeau; mais les acceffoires, comme la tête du chien, & le payfage font négligés: tel eft en général le procédé des Anciens dans leurs plus beaux ouvrages.

Longueur huit pouces cinq lignes : hauteur cinq pouces quatre lignes.

PLANCHE CIX.

ON ne fe trompera pas beaucoup, fi l'on croit que le defir d'avoir une occafion de nommer la Ville de Befançon par fon ancien nom Romain de Vefontio ou de Bifontio, & de donner une preuve, médiocre à la vérité, Tome VI.

Xx

de fon importance dans les Gaules, comme capitale des Sequani, m'engage à publier le deffein de cette mofaïque. Je fens très-bien que des ornemens auffi fimples que des enlacemens, font inutiles pour la curiofité de l'efprit, & peu fatisfaifans pour l'agrément des yeux : cependant, une autre raifon m'a engagé à faire graver cette ancienne magnificence; j'ai toujours cherché à faire honneur aux Villes de la Gaule, des Antiquités qu'elles ont produit ; & j'ai cité avec complaifance les particuliers qui en ayant fenti le mérite, ne les ont point détruites, & les ont conservées en nature, ou du moins les ont fait dessiner, M. de Fleury, Grand-Maître des Eaux & Forêts, préfente toutes ces diftinctions. En faifant bâtir en 1759 une maison à Besançon, dans un terrein dépendant de l'Abbaye de S. Vincent, il a trouvé dans les fondations, un pavé de mofaïque très-bien confervé; il en a envoyé à Paris une très-grande portion, & le deffein complet à M. Trudaine de Montigny, qui a bien voulu me donner l'un; & l'autre pour le Cabinet du Roi: j'ajoûterai que le travail de cette mofaïque eft fort groffier, & pareil à celui que j'ai vû assez généralement dans les Gaules.

PLANCHE C X.

Je rapporte le plan de ce Camp par la raifon que de tems immémorial, il eft appellé dans le pays Camp de pagne par Guil. Cefar, & qu'il porte ce nom dans les Cartes.

Carte de Cham

de Lille, &c.

Il eft fitué en Champagne, à cinq lieues Eft nord-est de la Ville de Troyes, fur le territoire de la Paroiffe de Lefmont; mais il n'a ni la forme ordinaire, ni l'étendue des Camps Romains que nous connoiffons, & qui fubfiftent que_nous aujourd'hui dans la France.

Ce Camp eft de forme triangulaire; il eft borné au levant par une chauffée que l'on appelle dans le pays chemin haut, qui a près de 800 toifes de longueur; ce chemin

a depuis neuf jufqu'à quinze pieds de hauteur, & douze, quinze & dix-huit pieds de largeur. Le Camp eft borné du côté du midi par une autre chauffée d'environ mille toifes de longueur; fa hauteur eft depuis trois jufqu'à cinq & neuf pieds; & fa largeur eft à peu-près comme celle de la chauffée précédente; le Camp eft enfin borné du côté du couchant par un retranchement ou rempart qui paroît avoir été très-élevé, mais aujourd'hui il est abaiffé par les charues qui le traverfent de tous les fens: on ne remarque fur ces trois côtés aucun veftige de foffés. Ce Camp occupe aujourd'hui plus de 180 arpens de terre labourable, & auroit pû, par conféquent, contenir plus de huit légions Romaines, & une armée de 50000 hommes ou environ.

La forme des Camps Romains dans la Gaule, & dont j'ai déja rapporté un grand nombre, étoit ordinairement quarrée ou circulaire ; & ces Camps étoient destinés pour une cohorte & tout au plus pour une ou deux légions.

On ne peut donc affurer que ce Camp de Lefmont ait été un Camp Romain; la dénomination de Camp de Céfar ne le prouveroit pas : on fçait par un grand nombre d'exemples qu'on attribue en France, aux Romains, les anciens monumens dont on ne connoît pas l'origine. Ce Camp doit être d'un tems poftérieur, & peut-être de celui des petits-fils de Clovis, qui, fous les regnes de Fredégonde & de Brunehault, levèrent de grandes armées, & fe firent la guerre dans cette partie de la France. Les François ayant trouvé ces deux chauffées élevées, capables de fervir de retranchement à une armée, élevèrent, du côté du couchant, une défense d'une chauffée à l'autre, pour fermer cet efpace. Au refte, je ne donne cette réflexion tirée de la chofe elle-même, que pour une conjecture qui n'eft appuyée sur aucune preuve pofitive.

Ce qui a le plus de rapport aux Antiquités de la Gaule, c'eft la chauffée qui ferme le Camp du côté du levant: elle paroît être une portion de la voye Romaine qui con

Baugier, Mém.

Hift. de Champ.

Tome II. P. 332.

duifoit de Langres à Reims, en paffant par Châlons-furMarne : cette voye eft décrite dans la Table de Peutinger; fçavoir xxi lieues Gauloifes; d'Andematunum, Langres, à Segelfera, lieu inconnu aux environs de Bar-fur-Aube; de Segeffera, xx1 lieues Gauloifes à Corobilium: la pofition de Châlons eft omife. Cette voye ou cette chauffée fubfifte en entier depuis Langres jufqu'à Châlons: elle est tracée fur la Carte de Champagne, de M. de Lifle, & fur les nouvelles Cartes de la France, levées d'après les opérations de MM. de l'Académie des Sciences. Cette chauffée paffe, en fortant de Langres, par Humets, enfuite par Beauchemin, Marac, Richebourg, Blefonville, Bricon, Barfur-Aube, par Brienne-le-Château; de-là, en fuivant la même direction, elle devoit paffer par le Camp de Lef mont pour fe rendre à Corbeille, qui eft le Corobilium de

la Table Itinéraire. Les chemins modernes de Brienne à Corbeille prennent un grand détour fur la droite. De Corbeille, la chauffée subsiste jusqu'à Châlons; elle est marquée fur la Carte de l'Académie : Ancien chemin des Romains, de Bar-fur-Aube à Châlons. Ainfi cette chauffée qui ferme le Camp du côté du levant, doit avoir été une portion de cette ancienne voye : la chauffée qui ferme le Camp du côté du midi, fe fépare de la première au point A, où l'on voit encore une groffe pierre de taille quarrée, qui a fervi autrefois de pied à une Croix. Cette chauffée, du côté du midi, devoit être une voye Romaine que l'on n'a point fuivie, & qui femble prendre fa direction du côté de Troyes, Auguftobona, Ville capitale des Peuples Tricaffes.

Le Camp de Lefmont n'étoit pas éloigné de Brienne, qui eft un ancien Comté-Pairie de Champagne. Brienne eft compofé de deux Bourgades voifines, dont l'une s'apFlad. ad ann. 951. pelle Brienne-la-Ville, l'autré Brienne-le-Château. Flodoard, dans fa Chronique, fait mention de Munitio Brena, qui a été poffédée anciennement par l'illuftre famille de Brienne. Ces Seigneurs prenoient le titre de Comes Bre

« AnteriorContinuar »