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« Matth.

veillance. « Aimez vos ennemis, nous dit-il, beniffez ceux qui vous maud ffent; faites du « 44. bien à ceux qui vous haiffent, & priez pour « eeux qui vous perfecutent ; & qui vous ca- ce lomnient.

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Enfin faint Paul pour fupprimer nos murmures & pour appaifer nos plaintes dans les maux que Dieu nous envoie, nous remet devant les yeux l'obéiflance & la foumission que nous avons témoignée envers nos peres loifqu'ils nous châtioient dans nôtre jeuneffe; & il en conclut qu'il eft infiniment plus jufte & plus neceffaire d'être foumis à la Justice de Dieu qui eft nôtre Pere par excellence, & qui peut nous donner la veritable vie. « Si nous cc Hebreon avons eu du refpect, dit ce grand Apôtre, pour «12.9.10 les peres de notre corps, lorfqu'ils nous ont " châtiez, combien devons nous plus avoir de « foumiffion pour celui qui eft le peie des efprits, " afin de recevoir de lui la vraie vie? Car quant à nos peres, ils nous châtiolent comme il leur «< plaifoit, afin de nous regler pour cette vie qui dure fi peu. Mais Dieu nous châtie pour notre " bien veritable, afin de nous rendre participans de fa fainteté.

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Ce Docteur des Nations nous propofe encore l'exemple de Jefus-Chrift lui-même, qui étant fouverainement heureux par fon effence, s'eft volontairement foumis à une infinité de peines & de douleurs, & les a fouffertes avec une patience admirable, & fans en former la moindre plainte. « Jettez les yeux, dit il, fur «Ibid. v Jefus Chrift comme fur l'Auteur & le confom- «. 3. mateur de la Foi, qui au lieu de la vie tran- «< quille & heureufe dont il pouvoit jouir, a souf- « fert la Croix, en méprifant la honte & l'igno- « minie, & eft maintenant affis à la droite du c Trône de Dieu Penfez donc en vous-mêmes à celui qui a fouffert une fi grande contradiction «

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2.

❞ de la part des Ρ cheurs qui fe font élevez con»tre lui,afin que vous ne vous decouragiez point, » & que vous ne tombiez pas dans l'abattement. A quoi il faut ajoûter que le Prophete Ifaïe avoit predit long tems auparavant, que ce divin Sauveur n'ouvriroit point la bouche au milieu des maux qu'il devoit endurer; qu'il feroit mené à la mort comme une brebi qu'on va égorger, qu'il demeureroit dans le filence fans ouvrir la bouche, comme un agneau qui eft muet devant celui qui le tond.

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Ainfi ceux qui s'eftiment malheureux au milieu des maux qu'ils endurent,qui s'en plaignent & en murmurent, qui s'en prennent à la divine Providence, & qu'il l'accufent d'injuftice & de cruauté, font certainement tres coupables, car fermant les yeux à tout ce que l'Ecriture nous dit de la conftance & de la foumiffion des Saints, & ne voulant pas profiter de l'exemple de la fouveraine patience de JefusChrift qui eft le Saint des Saints, ils ne fuivent que l'impetuofité de leurs paffions, & ils s'emportent à des excés qui provoquent la colere de Dieu,& qui attireront fur eux d'horribles fupplices, à moins qu'ils n'en faffent une ferieufe & une folide penitence.

CHAPITRE

XIV.

L'on prouve par les faints Peres qu'il n'est point permis de fe plaindre ni de murmurer des maux & des tribulations que l'on endure.

Nous ferons infinis fi nous vs lions peres

porter tout ce que difent les faints Peres

contre ceux qui fe plaignent & qui murmu

rent des peines & des tribulations qu'ils éprouvent: car il n'y a point de matière dont ils aient parlé plus fouvent ni avec plus d'étendue; c'eft pourquoi nous nous contenterons d'expliquer les principales maximes qu'ils nous enfeignent fur ce fujet, & les raisonnemens les plus convaincants dont ils fe fervent pour combattre l'injuftice de ceux qui vivant dans l'adverfité, manquent de foumiffion, & témoignent de l'aigreur & de l'emportement.

1°. Ils nous declarent que fi nôtre cœur n'étoit point attaché aux biens temporels, que fi nous n'avions que de l'indifference pour toutes les chofes de la terre, que fi nous vivions ici bas comme des pelerins & comme des étrangers, que fi nous avions foin de combattre & de mortifier nos paffions, il ne fortiroit de nôtre bouche ni plaintes ni murmures lorfqu'on nous dépouilleroit de nos biens, qu'on nous perfecutereit, qu'on nous exileroit de nôtre patrie, & qu'on nous feroit fouffrir plufieurs autres tribulations; mais que la plupart de nos plaintes & de nos impatiences procedent du fond inépuisable de no spaffions, de nôtre amour propre, & de l'attache que

nous avons au monde.

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Lib. ad

Ainfi Tertullien écrivant aux Martyrs renfermez dans des cachots obfcurs pour la Foi Martyres, de Jesus Christ, leur reprefente que s'ils font cap.1. reflexion que le monde depuis le peché nous tient lieu de prifon, ils ne croiront pas qu'on les ait emprifonnez, mais plutôt qu'ils ont été mis en liberté. Il leur prouve enfuite que le monde eft une veritable prifon, parce que d'épaiffes tenebres qui aveuglent les efprits y regnent de toutes parts, que les volontez y font captives fous les liens du peché, qu'on y fent la mauvaise odeur des vices, qu'on y voit un nombre prodigieux de criminels en lå per

Lib. 1. de

cap. 30.

fonne de tous les hommes. Il ajoûte qu'il n'im-
porte à des Chrétiens qui ont renoncé au mon-
de, où ils foient dans le monde; & que n'aïant

que
de l'indifference pour toutes les chofes
temporelles, nulle privation, nulle feparation,
nulle captivité ne les peut conftrifter."

Ainfi faint Auguftin foûtient que la plupart civit. Dei des hommes ne s'afflig igent & ne fe plaignent de la mifere du tems que parce qu'ils n'ont pas dequoi fatisfaire leur luxe, leur intemperance, & leurs autres cupiditez: mais qu'il eft tres rare d'en trouver qui ne foient touchez des pertes & des calamitez publiques que parce qu'elles leur ôtent le moien d'affilter les pauvres, & de pratiquer plufieurs autres bon

Conc. 1. in

nes œuvres.

Ainfi le même S. Auguftin enfeigne que les Pfal. 3+ Fideles qui font veritablement détachez de touExpolit. Pfal. 52. tes les chofes de la terre, ne reffentent pas plus de douleur lorsqu'on leur enleve leurs biens que quand on coupe les cheveux de leur tête'; & que l'afflction où l'on tombe en ces rencontres eft ordinairement une preuve de la paffion qu'on avoit pour le monde, parce qu'on perd fans douleur ce qu'on a poffedé fans attache, & pour le prouver, il dit que fi on nous ôte, & fi on nous enleve nôtre manteau ou nôtre robe, cela ne nous caufe point de douleur fenfible, parce que ces fortes de vêtemens ne tiennent point a nôtre corps; mais que fi on entreprend d'arracher une partie de la peau de nos membres, nous reffentons alors de tresvives douleurs, parce que cette peau eft colléc & attachée à notre chair.

2o. Les faints Peres nous reprefentent que dans les maux que nous endurons, nous ne devons pas tant regarder la malice de nos ennemis qui nous les font fouffrir, que les ordres de la divine Providence qui le permet;

qu'à la verité la mauvaise volonté des hommes vient de leur propre fond, mais qu'ils ne pourroient l'executer fans la permiffion de Dieu; qu'ils ne font que les miniftres de fa juftice & de fes vengeances; que c'eft en ce fens que le Prophete nous affure qu'il n'y a point de mal dans la Cité que Dieu ne l'ait fait, & que par confequent fe plaindre & murmurer des tribulations que l'on éprouve, c'est fe plaindre de Dieu même, murmurer contre fa Juftice, deroger à fa fouveraine Sageffe, & accufer fon infinie bonté.

Comme la plupart des Chrétiens ne font point d'attention à ces veritez, & qu'ils ne regardent que leurs ennemis qui font ordinairement tres injuftes & pleines de malignité, ils font accablez de douleur dans les pertes, dans les difgraces, dans les infortunes qui leur arrivent; ils s'en plaignent, & Is en murmurent. Mais s'ils ren ontoient jufqu'à Dieu; s'ils confideroient qu'il n'arrive rien que par fes ordres ou par fa permiflion; que leurs ennemis ne pourroient leur nu re, s'ils n'en avoient reçu le pouvoir de fa Juftice, & qu'ils ne font que les execureurs de ses volontez;s'ils faifoient reflexion que fa Providence regle toutes chofes, qu'elle atteint depuis un bout du monde jufqu'à l'autre, & qu'il ne fe paffe rien à fon infçû, & fans qu'elle l'ait ordonné de toute Eternité; il eft certain que leurs plaintes, leurs impatiences, leur murmures cefferoient auffi tôt. Ils adoreroient la main invifible qui les frappe; ils fe foûmettroient avec joie à toutes les tribulations qui les accueillent, & ils diroient en toutes rencontres; que le nom du Seigneur foit beni; il n'eft rien arrivé que par fes ordres; c'eft lui qui nous avoit donné ces biens, c'eft lui qui nous les a ôtez; & de toutes leurs peines & de toutes leurs afflictions, ils

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