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l'Autel de fon Eglife, parce qu'il efperoit qu'on priroit pour lui à tous les facrifices qu'on y offriroit: mais il changea depuis de penfée, aïant fait reflexion que cette fepulture étoit refervée aux Martyrs qui avoient eu le bonheur de verfer leur fang pour la caufe de JesusChrift, & pour la confeffion de fon nom.

Ainfi il eft neceffaire de diftinguer entre les motifs qui portent les fideles à rechercher des fepultures. En choifir une purement pour être réuni à ceux qu'on a aimez, pour mêler fes cendres avec les leur, pour faire connoître qu'on eft iffu d'une race noble, que l'on compte entre fes parens des perfonnes d'un grand nom, qu'on a d'illuftres alliances, c'eft une chose inutile, & fouvent une vanité criminelle. Mais defirer d'être enterré dans une Eglife & proche le tombeau d'un Saint, afin que cela nous procure des prieres & les fuffrages des fideles, c'eft prudence, c'eft aimer fon ame, c'eft lui moïenner des fecours falutaires, c'eft travailler à lui ouvrir l'entrée de la gloire éternelle.

Il faut neanmoins ajouter qu'il ne fert de rien aux pecheurs impenitens de faire ainfi inhumer leurs corps dans des lieux faints; que c'est même, felon faint Gregoire Pape, un at- Ibid. tentat qu'ils commettent contre la fainteté de nos Eglifes; qu'ils les fouillent en quelque maniere par l'impureté de leurs crimes, & que bien loin que leurs ames foient foulagées par une telle fepulture, elles en reçoivent un préjudice tres-notable; puifque leur damnation en devient plus grande & plus rigoureufe, à caufe de la profanation des lieux Saints dont ils fe rendent coupables.

Refte maintenant à examiner s'il eft à propos de faire de grandes pompes à la fepulture des défunts. Pour éclaircir cette matiere nous demeurons d'accord 1°. Que c'eft une tres Bb j

bonne œuvre & un acte de Religion d'enfevelir les morts; que Tobie s'eft rendu par là tresrecommandable; que l'Ecriture le loite de s'être appliqué à rendre ce bon office à ceux de fa nation; & qu'on a toûjours honoré les corps des fideles après leur mort: qu'on allumoit des torches & des cierges lors qu'on les inhumoit; qu'on chantoit des Pfeaumes & des Cantiques à leur convoi; que fouvent on lesembaumoit avec des parfums & des aromates; qu'on les expofoit même quelquefois à la vûë des fideles; qu'on obfervoit plufieurs ceremo Tertull. nies à leurs enterremens & les jours fuivans; 'Apolog. & qu'on leur dreffoit des fepulchres & des cap. 42. Vita fan- tombeaux pour conferver la memoire de leur Hi Cypria- nom, comme on le voit dans Tertullien, dans ri. Hier les Actes de faint Cyprien, dans faint Jerôme, nim.epift. dans faint Auguftin, & dans plufieurs autres. Augut. Ecrivains des premiers fiecles.

2749.

lib. 1.

cap. 13.

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fur

Conc. 2. 2o. Nous reconnoiffons qu'on honoroit ainfi in pfal les corps morts des fideles, parce qu'ils avoient 103.6 lib. de cu cooperé à plufieurs de leurs bonnes œuvres ; ta pro mor- qu'ils avoient été le temple du faint-Efprit, tuis c. 4 & qu'on croïoit fermement qu'ils devoient réfufciter glorieux à la fin des fiecles. » Il ne De ci faut pas, dit faint Auguftin, negliger ni abanzit. Den donner les corps de ceux qui font morts, tout des fideles & des perfonnes vertueuses, ❞ dont le faint-Efprit s'eft fervi comme d'inftrumens & d'organes pour toutes les bonnes œuvres. Car fi la robe d'un pere, ou fon anneau ou quelque autre chose femblable est d'autant plus précieufe à fes enfans, qu'ils ont plus d'affection & de refpect pour fa memoire; à plus forte raifon devons nous estimer nos corps qui nous font plus étroitement unis que des "habits quelque riches qu'ils puiffent être. Car ils ne fervent pas feulement d'ornement & de fecours à l'homme, mais ils font une partie de

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lui-même. Auffi voïons-nous qu'on a rendu
aux Juftes des premiers tems les derniers de-
voirs avec beaucoup de zele, qu'on a celebré
leurs obfeques, qu'on a eu foin de les inhumer
avec honneur; & qu'eux-mêmes durant leur ce
vie ont ordonné à leurs enfans d'enfevelir leurs ce
corps. Tobie eft loüé dans l'Ecriture d'avoir Ce
donné la fepulture aux morts; & l'An-
ge Raphaël témoigne que cela attira fur lui
les graces de Dieu. Nôtre Seigneur lui-même
qui devoit réfufciter le troifiéme jour, ne laiffe
pas
de relever & de vouloir qu'on publie com-
me une bonne ceuvre l'action de cette femme
pieufe, qui répandit fur lui un parfum pre- ce
cieux pour l'enfevelir, en quelque maniere, e
par avance. L'Evangile parle auffi avec éloge
de ceux qui eurent foin de recevoir fon
corps à
la defcente de la croix, de le couvrir de lin-
ceuls, & de l'enfevelir honorablement.

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Ce faint Docteur declare encore en un autre lieu qu'on honore les corps des défunts, parce De Guras qu'ils doivent réfufciter à la fin des fiecles, & pro mortuis geren participer à la gloire qui eft preparée aux da c. to Saints, pour les recompenfer de leur vertu & 18, des bonnes œuvres qu'ils ont pratiquées. Il foûtient même que negliger de fatisfaire à ce devoir, c'eft manquer de Religion, & tomber dans une espece d'impieté.

3°. Mais nous foûtenons avec le même faint Auguftin, qu'il faut tant que l'on peut s'abitenir en ces rencontres des pompes, des grands appareils, & des dépenfes exceffives & faperAues; que ceux qui en font manifeftent leur fafte & leur vanité, & ne foulagent point les défunts; qu'ils dépen fent beaucoup d'argent fans rien meriter pour eux-mêmes, ni pour ceux dont ils pretendent honorer la memoire. Les ceremonies des enterremens, dit ce faint co Dofteur, le foin des funerailles, la longue fui- co

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Deci te des perfonnes qui accompagnent le convoi, vi. Dei, le choix de la fepulture, la pompe des obfe6.p.11. ques font plûtôt pour la confolation des vi&ferm vans, que pour le foulagement des morts. 172. Saint Jean Chryfoftome foûtient que c'est ordinairement le fafte & la vanité des vivans

qui les porte à faire des obfeques magnifiques aux défunts, & à leur conftruire des fepulchres Home'. revêtus d'or & de marbre. Il dit qu'ils ne cher£4. in chent par là qu'à contenter leur ambition, à

Joann.

faire parler d'eux, & à relever l'éclat de leur maifon, & qu'ils ne foulagent en rien leurs parens & leurs amis, puifqu'ils doivent fortie tout nuds de leurs tombeaux au jour de la réfurrection generale, & y laiffer les parfums, les linceuls précieux, & tous les ornemens dont on a paré leurs corps. Il ajoute que s'ils vouloient effectivement leur procurer quelque fecours & quelque foulagement, ils auroient foin d'accompagner leurs funerailles d'aumônes & de prieres, qui ont la force de fléchir la justice de Dieu, d'attirer fur eux fes mifericor→ des, & de les mettre en état de joüir au plûtôt de fon ineffable Majefté.

Saint Jerôme accufe ceux qui font ces pompes funebres, de prodiguer inutilement & de perdre leur argent, qui leur eft d'ailleurs f cher, & auquel leur cœur eft fi fortement attaché." Epargnez-vous ces peines & ces foins, vit leur dit-il, & fi vous ne pensez pas à vous6 A-mêmes, épargnez au moins vôtre argent que ❞ vous aimez avec tant de paffion. Pourquoi en

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veloppez-vous vos morts dans des étoffes tif» fues d'or ? Pourquoi vôtre ambition ne ceffe

t-elle point au milieu du deuil & des larmes ? » Croiez-vous que les corps des riches ne pour» roient pourrir à moins qu'ils ne fuffent dans la » foie & dans des vêtemens précieux ?

Ce faint Docteur confiderant que lors que

Matth.

Jofeph d'Arimathie voulut donner la fepulture In a 276 au corps de Jefus Chrift qui étoit mort entre les bras de la croix, fe contenta de l'enveloper dans un linceul blanc, dit que cette fimplicité condamne l'ambition des Grands de la terre, qui veulent que leurs richeffes les accompagnent jufques dans le tombeau, & qui ne fçauroient fe refoudre de s'en paffer lors même qu'ils ne font plus que cendre & pouffiere.

Cependant combien voit-on tous les jours de gens dans le monde qui tombent dans ce défaut Ils fe font conftruire de leur vivant de fuperbes maufolées, ou ils ordonnent par leurs teftamens qu'on leur en dreffe immediatement après leur mort: Ils veulent fe diftinguer des autres hommes par des magnificences exterieures, après qu'ils font rentrez dans le fein de la terre: Ils cherchent à faire parler d'eux après même qu'ils ne feront plus : Ils laiffent fur la terre des monumens éternels de leur luxe & de leur vanité; & ils portent aux pieds du trône de Jefus-Chrift les pechez qu'ils ont contractez en defirant & en recherchant ces vains ornemens.

CHAPITRE XXVII.

L'on examine fi l'on peut s'affliger la mort de fes parens & de fes amis.

A

do

Près avoir expliqué dans toute la fuite de ce Traité comment nous devons être dif polez par rapport à nôtre propre mort, nous y preparer, & la recevoir; il faut maintenant parler de celle des autres, & examiner s'il nous eft permis de nous affliger & de verfer des larmes, lors que nos parens & nos amis fortent: de ce monde, & que nous ne les voïons plus parmi nous. Or les propofitions fuivantes ferviront à éclaircir cette matiere.

B.br

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