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2.

34.

1. 3..

1. Il eft certain que la trifteffe & la douleur que nous témoignons à leur mort eft jufte & raisonnable. La nature exige que nous faffions connoître que nous ne fommes. pas infenfibles à ces pertes. La pieté même ne condamne point nôtre affliction & nos larmes en ces rencontres: elle les approuve au contraire, & les. loüe: car nous apprenons des faintes Ecritures que Sara étant morte, Abraham la pleura, &. Genef. 23. en fit le deuil, que Jacob croïant que fon fils Jofeph. avoit été devoré par une bête fauvage déchira fes vêtemens, fe couvrit d'un cilice, Genef 37. & le pleura fort long-tems; que Jofeph voïant Jacob fon pere expiré, fe jetta fur fon vifage, Genefa, & le baifa en pleurant; que toute l'Egypte pleura le même Jacob foixante & dix jours; Deuteron que les enfans d'Ifraël pleurerent la mort de Moife pendant trente jours; qu'ils s'affligerent auffi à celle de Samuel & du Roy T Reg. Jofias, fans que Dieu ait blâmé leurs lar 2. Para mes & leur douleur; que Job témoigna de la hp 3. douleur & de la trifteffe à la mort de fes en224% fans; que David pleura la mort de Saul, & de Job.1.20. Jonathas fon fils; qu'il pleura encore tresamerement la mort de fon fils Abfalom, qui lui 2. Reg.1. faifoit neanmoins la guerre, & qu'ils dit plu2. Reg.» fieurs fois : Abfalom mon fils, Abfalom mon fils, qui me fera la grace de mourir pour vous, 2 mon fils Abfalom, Absalom mon fils; que Marie fœur de Lazare pleura amerement la Iban. 82% mort de fon frere, & que plufieurs des Juifs vinrent pour la confoler & Marthe fa fœur.

34.8..

2:5. In

118,33. "";

dit

Le Sage nous ordonne même de pleurer & de n'être pas infenfibles à la mort de nos proErelichés & de nos amis : Pleurez fur un mort, il, parce qu'il a perdu la lumiere: Mon fils, répandez vos larmes fur un mort, & pleurez » comme un homme qui a reçu une grande 17. 18. plaie. Enfeveliffez fon corps felon la coûtume

& cap 38 16.

20

222.10.33

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& ne negligez point fa fepulture. Faites un es grand deuil pendant un jour dans l'amertume ce de vôtre ame, pour ne pas donner fujet de par- c ler mal de vous. Faites ce deuil felon le merite ce de la perfonne un jour ou deux pour ne point donner lieu à la médifance.

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CG

Saint Paul approuve auffi que nous nous en affligions, pourvû neanmoins que nôtre douleur n'aille point jufqu'à l'excès, & qu'elle foit fage & moderée: car il ne nous défend de nous en attrifter qu'en la maniere des Infideles, qui n'ayant point l'efperance de la réfurrection font inconfolables à la mort de leurs parens & de leurs amis, & croient les perdre pour toûjours: Ut non contriftemini ficut cateri qui fpem 1.Theffal. non habent.

4.13.

Cet Apôtre pour nous faire comprendre qu'à la fin du monde il y aura des tems facheux, marque en particulier qu'il fe trouvera des hommes dénaturez, inhumains, fans affection; & par confequent il condamne ceux qui ne témoignent aucune douleur à la mort de ceux qui leur appartiennent: car felon le Jugement de tous les gens fages & judicieux, ils font fans affection, infenfibles, inhumains, indolens, ftupides.

Horsit

Saint Bafile confiderant que Job cet hom me fi doux, fi patient, fi moderé, déchira fes vetêmens lors qu'on lui vint annoncer que fes enfans avoient été écrafez fous les ruines d'une maison, dit qu'agiffant ainfi il fit voir que fon cœur étoit plein de compaffion, 23. & qu'il aimoit tendrement ses enfans; mais que fe confolant peu de tems après, loüant Dieu, & difant Le Seigneur me les avoit donnez, le Seigneur me les a ôtez, il donnoit des marques de fa vertu & de fa juftice; qu'en s'affligeant il rendi: à fes enfans ce qu'il leur devoit, & qu'en cffuïant fes larmes, il rea B. b vj

2. Tie moth.3.5.

dit auffi à Dieu ce qu'il lui devoit. Pammachius iffu de Confuls & Conful lu même ayant époufé Pauline fille de fainte Paule, la perdit bien-tôt après par une mort cruelle qui l'emporta dans la fleur de fon âge : il s'en affligea, & il en témoigna beaucoup pif. de douleur. Saint Paulin fon ami lui écrivit en cette rencontre pour le confoler. Mais bien loin de le blâmer de s'être ainfi attrifté, il ́ reconnut que les larmes qu'il avoit verfées, avoient été pieufes & faintes ; & il fe contenta de l'avertir de mettre des bornes à fa douleur, & de ne permettre pas qu'elle fe portât à des extremitez déraisonnables.

872.

Mais c'eft principalement de faint Auguftin que nous apprenons qu'il eft jufte & naturelde s'attrifter en ces rencontres. Il declare après l'Apôtre, que nous ne devons pas nous attrifter comme les autres hommes qui n'ont point l'efperance de la réfurrection glorieuse : Serm. Mais qu'il y a une trifteffe que la nature nous infpire, & que nous devons reffentir à la mort de ceux que nous aimons, parce qu'encore· que nous fçachions qu'ils ne nous abandonnent pas pour toûjours, & que nous les fuivrons bien-tôt nous-mêmes, l'affection naturelle que avons pour eux eft contriftée de cette: feparation. Il ajoute que les larmes que nous verfons alors, font louables, pourvû qu'elles: ne foient pas exceffives, & qu'elles ne nous> empêchent pas d'écouter & de recevoir tout: ce qui peut contribuer à notre confolation. H foûtient même qu'il y auroit de l'inhumanité: à ne s'affliger point de la mort de nos parens:

& de nos amis.

Serm.. 27337

Ce grand Saint obeït lui-même aux mouve-
mens de la nature à la mort de fa mere; car.
ilen reffentit une tres-vive douleur, & il fal-
lut
que les lumieres de la foi la moderaffent..

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CC

cap. 125

Lors qu'elle fut morte dit-il, je lui fer- confeff mai les yeux, & en même tems je me fentis cb 9. frappé d'une douleur qui me perça jufques au ce fond du cœur Elle vouloit fe répandre au ce dehors par des ruiffeaux de larmes; mais me ce faifant une extrême violence, je commandois co à mes yeux de los reprimer, & je fouffrois beaucoup dans ce combat de moi-même con- c tre moi-même. Auffi-tôt qu'elle eut rendu le ce dernier foupir, mon fils Adeodat jetta un « grand cri, & commença à pleurer: mais fur co ce que nous l'en blâmafies, il fe tut. Il fe c paffa quelque chofe de femblable en moi : car ce il fallut que la force de la raifon s'oppofât à ce. ma foiblefle, & fupprimât mes larmes.

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CC.

Pierre de Blois écrivant à Henri fecond

Roi d'Angleterre fur la mort du Prince Hen- Epift. 24ri fon fils, lui mande que la pieté & la nature exigent qu'on s'afflige en ces occafions; & qu'ainfi il ne condamne point la douleur qu'il a reflentie, & qu'il a témoignée par les lar-mes; qu'il l'exhorte feulement à la moderer, & à ne permettre pas qu'elle s'emporte à des excès qui ne conviennent point à des chrétiens, & qui le des honoreroient devant Dieu & devant les hommes.

Mais il ne faut pas s'arrêter davantage à produire des autoritez pour prouver ce que nous avons avancé, puisque l'Evangile nous apprend; & que les faints Peres le remarquent expreffement, que Jesus-Christ a bien voulu pleurer la mort de Lazare; pour nous apprendre que la nature veut que nous foïons touchez de la mort de nos amis & de nos pa-rens; que la pieté même nous y engage, qu'elle condamne ceux qui font paroître dè l'infenfibilité en ces rencontres.

8:

2o. Il faut avoir foin, comme nous l'avons déja infinué, de moderer fa douleur,,

regler par les vues & par les principes de la for & de la Religion, & d'éviter une infinité de défauts où tombent les gens du monde, qui n'écouttent que la voix de la chair & du

ng, qui fe laiffent dominer par leurs paffions, & qui donnent fouvent le nom d'amour & de vertu à leurs propres cupiditez.

Le Sage qui nous ordonne de pleurer la mort de nos amis & de nos parens, nous avertit de mettre des bornes à nôtre douleur, de peur qu'elle ne foit exceffive, & qu'elle ne nous caufe du préjudice, fans procurer aucun foulagement aux défunts. Mon fils, dit-il, répandez vos larmes fur un mort: Faites un grand deuil pendant un jour dans l'amertume » de vôtre ame pour ne pas donner fujet de mal Eccli.» parler de vous. Mais ne foiez pas inconfola

38. 17 Casequent.

2ble dans votre trifteffe: car la trifteffe conduit » à la mort ; elle accable toute la vigueur & "l'abattement du cœur fait baiffer la tête. Vous » ne servirez de rien au mort en vous affligeant; → & vous vous ferez à vous-même un tres-grand » mal. Que la paix où le mort est entré appaise dans vous le regret que vous avez de fa mort, → & confolez-vous de ce que fon efprit s'est separé de fon corps.

Il faut fe fouvenir de ce que nous avons rap porté, que faint Paul nous défend de nous attrifter à la mort de nos parens & de nos amis. en la maniere des infideles, c'eft-à-dire avec excès, & de nous laiffer dominer par nôtre douleur, parceque l'efperance de la refurreetion doit nous foutenir & nous confoler.

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3. Theffal. 4.13.

Les faints Peres condamnent auffi ces douleurs exceffives, aufquelles plufieurs s'empor-tent en ces occafions: ils foûtiennent qu'elles font injurieufes à la bonté de Dieu, & à la foi de la réfurrection. Si nous croions la ré"furrection de Jefus-Chrift, dit Tertullien

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