lín abbé du monaftere fit transferer le tombeau dans l'église proche de la facriftie sous une arcade de pierre de taille. Il eft d'un fort marbre gris en forme d'une auge, couvert d'un gros marbre noir marqueté de blanc, long de fix pieds, large de deux pieds, & haut d'un pied trois pouces, élevé sur quatre piliers de marbre avec cette épitaphe:

Cy gift la reine Brunehaut,
A qui le faint pape Gregoire
Donna des éloges de gloire,
Qui mettent fa vertu bien haut.
Sa pieté pour nos myfteres
Lui fit fonder trois monafteres
Sous la regle de faint Benoift,

Saint Martin, faint Jean, faint Andoche

Sont trois faints lieu où l'on connoist

Qu'elle eft exempte de reproche.

A quoy l'on a ajouté cette anagramme avec les vers fuivans:
Brunechilde reine de France

ANAGRAMME.
Benite fleur d'innocence rare
N'écoutez donc pas ces efprits,
Qui traitent cette bonne reine
D'ambitieufe, d'inhumaine,
Et d'autres termes de mépris.
On ne doit condamner fa vie,
Ny fur un tres lugubre fort,
Croyez qu'elle eft pour affurance
Une fleur benite en fa mort,
Mais fleur d'une rare innocence.

L'an 1632. Nicolas de Caftille, qui étoit abbé de faint Martin, fit ouvrir ce tombeau, dans lequel on trouva un coffre de plomb où il y avoit des cendres, des offemens, du char. bon, & une molette d'éperon, on les y remit & on le referma. Il y a encore dans l'églife plufieurs tombeaux d'abbez, parmi lefquels celui de Jean Petit le dernier regulier eft à remarquer. Car il Y eft representé tout nud, la mitre hors de la tête. On dit que c'eft parce qu'on le dépoüilla de fon abbaye, pour la donner au cardinal Rolin, quoiqu'il fût homme de

bien, & qu'il gouvernât fon monaftere avec édification.

L'abbaye de faint Andoche fut bâtie pour des religieufes Benedictines dans le même lieu où les infideles honoroient la déeffe Minerve. On y voit les refles du temple qui lui étoit confacré. Il est élevé & bâti en quarré de petites pierres dures. Les religieufes en font aujourd'hui leur cuifine. Tout proche de ce temple, on voir une cave affreufe dont les voûtes & les piliers femblent avoir le caractere d'antiquité. On prétend que c'est la prison dans laquelle ont été renfermez tant de martyrs, qu'on tenoit proche du temple, afin que s'ils venoient à renoncer la foy, ils fuffent tout portez pour offrir des facrifices profanes. On montre une petite fenêtre par laquelle on croit qu'on leur portoit à manger, & une autre par laquelle on leur parloit. On conferve dans cette abbaye, les corps de faint Siagre, de faint Simplice & de faint Caffien évêques d'Autun,du refte il n'y a aucune antiquité que les burettes de faint Andoche, qui font, ce me femble, de bronze & bien travaillées, & ont tout le caractere d'antiquité. En voicy la figure.

L'abbaye de faint Jean le Grand éclate aujourd'hui dans Autun par la grande regularité, par le nombre de fes religieufes, & par la beauté des bâtimens qui furpaffent tous les monafteres de filles que nous avons vûs en province, hors ceux de Paris & de faint Pierre de Lyon. Elle étoit autrefois fi celebre & fi reguliere, que la mere de faint Odilon abbé de Cluni, qui étoit de grande maifon, s'y retira, & y acheva fa courfe dans les pratiques d'une fainte obfervance. L'églife paroît ancienne auffi. bien que celle de la paroiffe de faint Jean, qui eft tout proche, & qui, comme je crois, étoit autrefois l'églife des religieux ou des clercs qui adminiftroient les divins mysteres aux religieufes. On voir dans celle-cy derriere l'autel, un peu à côté, une petite armoire où l'on gardoit autrefois le faint Sacrement. Il y a quelqu'apparence que cette abbaye fut fondée fur les ruines de quelques temples: car au trefois la ville d'Autun n'étoit pas moins fuperftitieuse que Rome ; & il n'y a pas long-temps que dans l'enclos du monastere on trouva une pierre de marbre rompuë par les deux bouts, fur laquelle on voit une affez bonne partie d'une figure de Neptune, qui pourroit bien y avoir été adoré. Un curieux ayant vû cette pierre, en offrit foixante pistoles à madame l'abbeffe, qui ne voulut point la donner. On nous montra auffi une autre pierre rompuë, fur laquelle il n'y avoit qu'une infcription, dont il ne reste que cecy,

Enfin madame l'abbeffe nous montra une piece de monnoye d'or, trouvée prés de fa maison, qu'on croit y avoir été autrefois fabriquée; parce que d'un côté on voit la figure d'un Saint avec ce mot S. Johannes B. & de l'autre une ef fece de fleur de lys avec cette infcription A. Denarius, c'està-dire, aureus denarius, telle que nous la reprefentons icy.

Outre ces trois abbayes, il y en avoit autrefois une fort celebre bâtie par faint Euphrone évêque d'Autun, fous le nom de faint Symphorien, dont faint Germain fut tiré, pour être élevé fur le Siege de Paris, d'où il tira lui-même des religieux, pour mettre dans l'abbaye de faint Vincent, qu'il avoit bâtie au fauxbourg de fa ville épifcopale. Aujourd'hui ce n'est plus qu'un prieuré conventuel poffedé par les chanoines reguliers de fainte Geneviève, qui embelliffent tous les jours cette maifon. L'églife n'eft pas grande, mais elle eft jolie & fort propre. On y voit dans une crypte fouterraine les premiers tombeaux de faint Symphorien, de faint Faufte fon pere, & de fainte Augufte fa mere, chacun fous un autel, foutenu par des colonnes. Aujourd'hui ces trois corps faints font dans trois autres fepulcres de pierre derriere le, grand autel, où ils furent trouvez l'an 1467. du temps que le cardinal Rolin étoit prieur commendataire du monaftere & on reconnut que c'étoit leurs reliques par un tableau qui étoit proche, où ils étoient reprefentez, & au bas duquel étoient écrits ces vers:

Fauftus & Augufta jacent inter hæc duo bufta,
Integer & fanus medius jacet Symphorianus.

Les corps de faint Euphrone & de faint Procul évêques d'Autun font confervez dans le grand autel. On nous montra encore dans la facriftie une châffe de bois, dans laquelle on prétend que font les reliques de faint Ardent abbé de Tournus,duquel on fait l'office dans cette églife le même jour qu'on en fait à Tournus. Mais j'ai vu dans quelques memoires du R. P.Dom Hugues Lantenace,homme fçavant & fort exact, que ce Saint eft un faint Ardent martyr. Enfin nous vîmes dans le bas de l'églife un grand tombeau de marbre en forme de coffre, où l'on dit que font les reliques de faint Franchet Franconei archevêque de Sens, transférées du monastere de fainte Colombe à faint Symphorien, dont la translation est marquée dans le martyrologe de ce monaftere le 3 des calendes de janvier. On voit fur ce tombeau un monogramme

en cette maniere:

I. Part.

X

Mais le lieu le plus venerable d'Autun, c'eft l'églife de faint Pierre l'Etrier, à une demie lieuë de la ville, où eft le premier cimetiere des chrétiens. On y voit une infinité de fepulcres de pierre faits comme des auges, & tous couverts, dans lesquels il y a fans doute une infinité de Saints, & peutêtre des Martyrs. Au milieu de tous ces tombeaux on remarque celui de faint Amateur premier évêque d'Autun, qui n'est distingué des autres, que par une efpece de petite chapelle, qu'on a élevée deffus. Un peu plus loin on voit celui de faint Caffien auffi évêque d'Autun, fous une petite cha pelle à peu prés femblable à celle de faint Amateur. Il eft tel que Gregoire de Tours le dépeint, mais dans la derniere negligence, & il eft furprenant qu'un lieu auffi venerable soit comme abandonné. Dans l'églife de faint Pierre l'Etrier, qui affurément eft ancienne, on remarque le tombeau de faint Rheticius évêque d'Autun du côté de l'épitre, & dans la nef contre la muraille du côté de l'évangile celui de faint Pragmatius auffi évêque d'Autun. Nous vîmes auffi dans cette église une pierre nouvellement découverte, fur laquelle étoit l'infcription fuivante.

MEMORIAE AETERNAE

QVIE THE QVAE VIXIT ANN. I. D. III H.VIII. DECESSIT VIII. KAL NOV VALENTE VIET VALENTINIANO.II.CONSS.