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mais quelques mois après aïant fait informer fecréA N. 1571. tement contr'eux, il fit prendre les plus coupables, & leur procès fut fait par des juges que le roi avoit

LXXVII.

Charles IX. fait

Paris, & va au

parlement.

De Thou, loco Sup. lib. 5o. pag.

757

fait venir du Dauphiné & du Languedoc : quelques-uns furent punis de mort, d'autres bannis ou condamnez à des amendes pécuniaires, & les abfens profcrits.

Ces troubles étant appaifez, Charles IX. jugea à fon entrée dans propos de faire fon entrée folemnelle à Paris, qui fut fuivie quatre jours après de celle de la reine Elibeth fa femme,fille de l'empereur Maximilien. Le roi tint enfuite fon lit de justice au parlement, où il dit en substance: Que plus il faifoit de reflexions fur les malheurs qu'il avoit effuïez depuis fon avénement à la couronne, plus il reconnoiffoit qu'il avoit fujet de remercier Dieu, qui avoit pris un foin particulier de lui dès fon enfance, & qu'après Dieu il devoit en remercier la reine fa mere; que c'étoit par l'amour qu'elle avoit eu pour lui & pour la France, que le roïaume avoit été confervé au milieu des troubles des guerres civiles qu'à préfent qu'elles étoient assoupies, il ne lui restoit qu'à profiter des instructions de la reine pour regner avec équité, & travailler à conferver la paix qu'il l'efperoit ainfi avec l'assistance du Tout-puiffant, & les confeils falutaires de la reine fa mere, des ducs d'Anjou & d'Alençon fes freres, avec lesquels il étoit très-uni; & qui fe prêteroient volontiers avec zéle aux befoins de fon roïaume; il ajouta : Qu'il paroissoit au milieu de fon parlement, pour déplorer avec lui l'etat préfent des affaires, la corruption des mœurs qui avoit paffé dans tous les ordres de l'état, parmi

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les juges, comme parmi les inférieurs, & dans les cours fouveraines du roïaume.

Or, comme je fçai, continua-t'il, que la tranquillité publique dépend de l'exactitude avec laquel le on rend la juftice, je crois devoir furtout faire ensorte, que les abus introduits par un mauvais usage foient foigneufement réformez : & comme vous furpaffez les autres en autorité, vous devez auffi leur fervir d'exemple ; vous qui tenez ma place dans le premier parlement du roïaume; vous à qui j'ai confié ma puiffance, avec la fortune & la vie du peuple dont Dieu m'a chargé ; je veux que la réformation commence par vous, afin que vous puiffiez diminuer devant Dieu le compte que j'aurai à lui rendre ; & que vous affuriez le repos public en rendant également la justice à un chacun fans interêt & fans faveur. Il faut donc éloigner de vous tout ce qui pourroit avoir le moindre foupçon d'avarice, & bannir de votre compagnie ceux qui seroient atteints de ce défaut, de peur que l'averfion que le peuple en aura conçûë, ne s'étende à tous les autres. Éloignez de vous les factions, les partis, les brigues, & tout ce qui eft contraire à la vraïe justice, observez religieufement les conftitutions & les édits ; & fçachez que vous êtes établis pour obeïr aux loix, & non pas pour vous mettre au-dessus d'elles & les mépriser.

Le roi leur exposa ensuite, que s'il y avoit dans les ordres qu'il leur donnoit, quelque chofe qui méritât qu'on lui fit des remontrances, ils pouvoient le faire fans differer, & qu'il les écouteroit favorablement ; mais que quand ils feroient affurez

AN. 1571.

de fa volonté, il vouloit qu'ils obéïffent fans dispu

A N. 1571. ter plus long-tems avec leur roi & leur seigneur, parce qu'il entendoit fes affaires mieux que perfonne, & qu'il s'en réservoit le jugement. Qu'ils devoient fe tenir dans les bornes de la modération, comme étant établis par leur fouverain, pour rendre également la juftice aux parties, punir les crimes & obferver les édits ; qu'ils pouvoient être affurez d'obtenir des honneurs & de gagner fa bienveillance pour le prix de leur foumiffion, & qu'en faifant le contraire, ils s'attireroient infailliblement fon indignation : qu'il enjoignoit donc aux préfidens de s'affembler extraordinairement, avec quatre confeillers déleguez de la cour, aux jours & heures qui leur fembleroient les plus commodes, ou au palais, ou dans leurs maisons, & de mettre leurs avis par écrit, fur ce qu'ils jugeroient le plus convenable pour la juftice & la correction des mœurs, & qu'on le lui envoïât auffi-tôt. Le premier préfident Christophle de Thou, répondant au roi au nom du parlement, affura fa majesté, que chacun fe conduiroit de telle maniere, qu'on reconnoîtroit qu'ils n'avoient rien de plus à cœur, que de fe conformer à fes volontez dans l'adminiftration de la juftice.

LXXVIII.
Demandes des

députez de la Ro

chelle au roi.

De Thou

tib. so pag. 759.

Les députez de la Rochelle qui étoient toujours à la cour, demanderent plufieurs chofes au roi, entr'autres : Qu'on rétablit dans le confeil le chancelier de l'Hôpital: Qu'on retirât de Guienne le marquis de Villars, qu'on avoit fait fucceder à Montluc : Qu'on éloignât de la cour & des affaires le cardinal de Lorraine & le duc de Guife: Qu'on

reftituât au prince de Condé le château de Valery ; &
fur tout, que les fentences, arrêts & jugemens ren-
dus contre les Proteftans pendant la guerre en hai-
ne de la religion, fuffent caffez & de nul effet ;
que ceux qui avoient été condamnez fuffent rétablis
dans leurs biens, dans leur réputation & dans leurs
honneurs, & que tous les monumens qui en ref-
toient fuffent abolis, afin d'oublier les chofes paf-
fées. Le fondement de cette derniere demande étoit
l'affaire arrivée il y avoit trois ans à Philippe Gâti-
nes, riche marchand à Paris, & homme de bien,
qui aïant été accufé d'avoir tenu des assemblées noc-
turnes en fa maifon contre les édits du roi, & d'a-
voir permis qu'on y eût fait la céne, avoit été con-
damné à mort avec Richard fon frere, & Nicolas
Croquet fon beaufrere; tous leurs biens avoient
été confifquez; & l'on avoit ajoûté à la feverité de
ce jugement, rendu à la follicitation des factieux,
que la maifon de Gâtines dans la ruë faint Denis,
où l'affemblée avoit été tenuë, feroit rafée, la pla-
ce renduë publique, & que pour
que pour conferver à per-
petuité la memoire de cette execution, on y
éleve-
roit une pyramide, fur laquelle feroit gravée la fen-
tence de mort.

A N. 1571.

LXIX.
On rétablit la

memoire de Gâti

nes.

De Thou loco

Les députés de la Rochelle demanderent donc que cette fentence fût caffée ; que la pyramide dreffée en la place de la maison de Gâtines, & qui reprefentoit une croix, fût renverfée, pour abolir le fup.cit. fouvenir d'une pareille injuftice, & que la memoire du défunt fût réhabilitée. Le roi crut cette de- pag. 780. mande juste : mais ceux qui favorifoient les seditieux, persuaderent, que fi l'on ôtoit ce monu

Dupleix hift. de

France tom. 3.

ment, le peuple prendroit auffi-tôt cette action AN. 1571. pour un préjudice porté à la religion catholique; ce qui obligea d'ufer de ce temperament; il fut conclu que pour arrêter le peuple, cette pyramide, feroit tranfportée de nuit dans le cimetiere des faints Innocens ; qu'on effaceroit la fentence de mort gravée sur la table de cuivre, & qu'en fa place on y mettroit un éloge de la croix ; par ce moïen on crut pouvoir contenter les Proteftans & le peuple. Claude Marcel prevoft des marchands fut chargé de l'execution. Mais la chofe ne put fe faire fi fécretement, que le peuple n'en fût informé : dès le matin les féditieux prirent les armes, coururent par la ville, & pillerent quelques maisons. Le gouverneur de Paris François de Montmorency vint auffi-tôt, & appaifa le bruit. Mais plufieurs furent tuez dans le tumulte, & un homme d'affez baffe condition fut pendu aux fenêtres d'une maison voifine.

LXXX. Réponse du roi

députés.

Le roi répondit aux autres demandes des dépuaux demandes des tés, que le chancelier de l'Hôpital étoit trop âgé & trop infirme pour pouvoir vacquer aux fonctions de cette charge; que l'on traiteroit du rappel du marquis de Villars avec le prince de Navarre : Qu'il ne conviendroit pas de difgracier brufquement le cardinal de Lorraine & le duc de Guise, qui avoient rendu de grands fervices à l'état, & qu'il étoit neceffaire d'en déliberer mûrement, avant que de fe porter à un tel éclat ; enfin sa majesté parut consentir à la restitution du château de Vallery. Les députés s'en rétournerent contents, & informerent la reine de Navarre, le prince son fils & l'amiral de

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