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fes. ordres, qu'il ne prétendoit pas pour cela déroAN. 1572. ger à fes édits de pacification, qu'il les ratifioit, & qu'il vouloit qu'on les obfervât religieusement; qu'il n'en avoit ainsi agi que pour aller au-devant de la conjuration de Coligni & de ses complices; qu'il ordonnoit donc que tous les Proteftans demeuraffent dans leurs maisons en paix & en sûreté : que les gouverneurs empêchaffent qu'on ne leur fit aucune violence, ni dans leur vie ni dans leurs biens, fur peine de mort contre ceux qui y contreviendroient. Que cependant, parce que leurs prêches & leurs affemblées publiques excitoient des troubles & faifoient beaucoup de mécontens, ils euffent à s'abftenir à l'avenir de tenir les affemblées ni publiques, ni même particulieres, jufqu'à ce que le roi en eût autrement ordonné, fur peine de la perte des biens, & de la vie même pour ceux qui n'obéïroient pas.

XXXVII.

Differentes vil

l'on maffacre les

hugenots.

·lib. 52. versùs fr

nem.

Dupleix hift. de

pag. 796.

Plufieurs provinces ne furent pas mieux traitées les du roiaume où que Paris. Le jour même qui préceda le mafsacre, le roi avoit écrit à differens gouverneurs, de faire parDe Thou in hift. tout main baffe fur les Calviniftes; & en conféquence, pendant deux mois on pe vit que meurtres meurtres dans D'Avila liv. 5. prefque toute la France. A Meaux, plufieurs furent France, tom. 3. égorgez, & d'autres précipitez dans la Marne. La présence de François de Montmorency qui étoit à Chantilly, & qui avoit le gouvernement de l'isle de France, empêcha les féditieux de rien entreprendre à Senlis. Mais il y eut de grands défordres à Orleans, dont les Calviniftes s'étoient deux fois emparez, & où les ruines des églifes qui étoient encore préfentes, animoient le peuple à la vengeance.

Angers

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Angers fuivit l'exemple d'Orleans; les habitans de AN. 1572 Troyes dont Coligny s'étoit plaint au roi quelque tems auparavant, aïant appris le maffacre de Paris, mirent des gardes aux portes de leur ville pour em-pêcher qu'aucun n'échappât, & tous ceux qui étoient Ïuspects aïant été mis en prison le 30. du mois d'Août, furent tuez cinq jours après par l'ordre d'Anne de Vaudray, feigneur de faint Phal, baillif de Troyes. L'on fe comporta avec la même fureur à Bourges, où François Hotman & Hugues Doneau, célébres profeffeurs en droit auroient péri, fi leurs écoliers ne fuffent venus à leur fecours. On ne fir en aucun endroit un plus grand carnage qu'à Lyon, dont François de Mandelot étoit gouverneur. Les foldats de la garnison aïant refusé d'être les bourreaux de leurs compatriotes, l'on choifit des hommes fans aveu, qui forcerent l'archevêché où étoient trois cens Calviniftes des principaux de la ville, & qui après avoir foüillé dans leurs bourfes, les maffacrerent impitoïablement ceux qui étoient dans les prifons de Roüane, furent traitez avec la même inhumanité. Le musicien Gaudimel qui avoit mis en chant les pfeaumes traduits par Marot & Beze, fut du nombre. A Touloufe on pendit cinq confeillers en robbe rouge à un orme dans la cour du palais : on compta près de vingt-cinq mille perfonnes de tuées dans ces differentes provinces.

On les traite plus

On se conduifit avec beaucoup moins de cruauté XXXVIIL en Provence, dont Claude de Savoye, comte de humainement en Tende étoit gouverneur, & en Dauphiné où de Provence & ca Gordes étoit lieutenant de roi : le premier qui étoit De Thou ut fup

allié de près à meffieurs de Montmorenci, répon

Dauphiné.

lib. 52. pag. 8304

dit à Jofeph Boniface de la Mole, qui lui appor AN. 1572. toit l'ordre du roi pour exterminer les Calvinistes du païs, qu'il ne croïoit pas que fa majesté approuvât une pareille violence, & que ces ordres ne pou voient partir que de quelques ennemis de la tranquillité publique, qui empruntoient son nom respectable; qu'il avoit reçu quelques jours auparavant des ordres contraires ; & qu'il aimoit mieux les fuivre, comme étant plus dignes de la bonté & de la clémence du prince. Quelques tems après ce géné reux gouverneur mourut, & l'on foupçonna qu'il avoit été empoisonné. Le comte de Garces, lieutenant de roi dans la Provence, imita fa douceur

XXXIX. L'évêque de Li

fes diocéfains Cal

&

par fes remontrances il obtint de la cour un ordre contraire au premier qui ne refpiroit que le fang & le carnage.

Dans le Dauphiné, Bertrand de Simiane, feigneur de Gordes élevé dans la maifon de Montmorency représenta le grand crédit que Montbrun avoit dans le parti, & le danger auquel on s'expofoit en réduifant les Calviniftes au défespoir; ainfi voïant que le peuple avoit déja commencé à en égorger quelques-uns à Valence & à Romans, il arrêta par autorité le cours de cette fanglante execution. Saint Herem, gouverneur d'Auvergne, attaché pareillement aux Montmorencis, ufa de la même modération, & répondit qu'il n'obéïroit jamais à des or◄ dres fi cruels, s'il ne les recevoit du roi même.

Enfin, l'on peut dire qu'il refta beaucoup plus Seux fauve tous de Calviniftes dans les provinces qu'il n'en périt. Le viniftes. clergé tout maltraité qu'il avoit été par ces hérétiGall. Chriftiana, ques, en fauva autant qu'il put en differens en

San-Marth. In

2010. 2. pag 652.

Echard de fcript.

ord.

341.

droits. Le lieutenant de roi de Lifieux aïant communiqué ses ordres à l'évêque Jean Hennuyer de A N. 1572. l'ordre de faint Dominique, qui avoit été précep- or fratr. praditeur d'Antoine de Bourbon, duc de Vendôme, de- cat. tom. 2. pag. puis roi de Navarre, ce prélat s'oppofa à leur execution : « Non, lui dit-il, vous n'exécuterez pas vos ordres, & je n'y consentirai jamais je fuis le pafteur de l'églife de Lifieux, & ceux que vous voulez faire égorger font mes oüailles ; il eft vrai « qu'elles font égarées, mais je ne désespere pas de « les faire un jour rentrer dans la bergerie de Je- « fus-Christ. Je ne vois pas dans l'évangile, que le « pasteur doive fouffrir qu'on répande le fang de Tes brebis ; j'y lis au contraire, qu'il eft obligé de « verser son fang, & de donner la vie pour elles. « Retournez-vous- en donc avec cet ordre qu'on « n'exécutera jamais, tant que Dieu me conservera «< la vie, que je n'ai reçûë de lui que pour être em- « ploïée au bien spirituel & temporel de mon trou- «

peau."

ce.

Le lieutenant furpris de cette fermeté, lui demanda par écrit un acte de refus, pour lui fervir de décharge envers le roi : le prélat le lui accorda, & lui dit qu'il étoit affuré de la bonté du prince, qu'on l'avoit furpris en cette occafion, & qu'il ne doutoit nullement qu'il ne trouvât bon fon refus; qu'en cout cas il fe chargeroit de tout le mal qui en pou roit arriver. Dieu favorifa le zéle du prélat ; fon oppofition aïant été envoïée au roi par le lieutenant, a majefté en fut édifiée, & révoqua aussi-tôt ses ordres à l'égard du diocèse de Lifieux; le cher troupeau docile aux inftructions de fon pasteur, fut f

AN. 1572

X L.

Ce qu'on fit a

Rome & en Efpa

vivement touché de fa conduite, qu'il rentra pref qu'entierement dans le bercail.

Cette exécution fut regardée à Rome & en Esgne au fujet de la pagne d'un œil different. Gregoire XIII. n'enS. Barthelemi. vifageant que le bien qu'il s'imaginoit devoir en Mezeray abregé résulter pour la réligion Catholique en France, 12 pag. 260. ordonna une proceffion, où il assista lui-même dechronol. du P. de puis faint Pierre jufqu'à l'églife de faint Louis, pour S. Romuald in- rendre graces à Dieu d'un fi heureux fuccès, & il

ebron. tom. 5. in

Dans le tréfor

fol. pag. 661.

XLI..
Les restes des

fit frapper quelques médailles, pour perpétuer la memoire de cet évenement, où lui-même eft repréfenté d'un côté, & de l'autre un Ange tenant une croix d'une main & une épée de l'autre, exterminant les hérétiques, & particulierement l'amiral. En Efpagne on fit le panégyrique de cette même action en présence du roi Philippe II. & on osa lui donner. le nom de triomphe de l'églife militante.

Les Proteftans de France qui avoient échappé Calviniftes fe re- au carnage de la S. Barthelemi, fe retirerent danstirent en differens le Vivarez & dans les provinces voifines; mais la De Thon, loco crainte qu'on n'exerçât encore fur eux un traitement fup. lib. 58. pag. aufft rigoureux que celui qu'ils venoient d'éprou

Lieux.

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ver, obligea plufieurs à abandonner le roïaume: quelques-uns pafferent en Angleterre, où ils trouverent un azyle auprès de la reine Elisabeth. L'électeur Frederic Palatin, & les cantons de Zurich & de. Berne en Suiffe, retirerent tous ceux qui voulurent, Le réfugier chez eux, & la ville de Genêve leur offrit tous les fecours qui pouvoient dépendre d'elle. Les deux fils aînez de l'amiral qui avoient trouvé le moïen de s'échapper, & les malheureux reftes de la. famille de Coligni se retirerent d'abord à Genêve-,

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