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AN. 1572.

Sujets d'inquié

les IX.

ensuite à Bafle, où après avoir demeuré quelques mois, ils vinrent enfin à Berne, & y furent reçûs avec toute forte d'honneur & de bonté. D'un autre côté, plusieurs Calvinistes effraïez des horreurs d'un long exil, & ne pouvant le réfoudre à vivre éloignez de leurs familles, cederent à la violence, & pour s'accommoder au tems, fe firent catholiques, en fignant la formule de foi qu'on leur préfentoit. Cependant comme le roi de Navarre & le prince XLII. de Condé perféveroient dans la religion des Pro- tue du roi Charteftans; Charles IX. pour les intimider, fe fit apporter des armes le 9. de Septembre, affembla fes fup.cit.b. 53. capitaines des gardes, & jura qu'il avoit réfolu d'exterminer le refte des Proteftans, en commençant› par le prince de Condé, enfuite par le roi de Navarre, & ordonna à ces capitaines de se tenir prêts pour l'execution. Mais la reine sa femme, princesse prudente & fage, & qui avoit beaucoup de crédit fur fon efprit, lui aïant représenté qu'il ne devoit rien faire dans une chofe fi importante, fans con fulter fes confeillers, il quitta les armes & fit retirer' fes officiers.

Le lendemain il manda le roi de Navarre & le prince de Condé, les fit entrer dans fon cabinet, & leur répréfenta de nouveau, que les troubles & les révoltes de fon roïaume ne venoient que des divifions que caufoient les nouvelles erreurs ; que les malheurs que l'héréfie avoit fait naître, étant des preuves évidentes des impiétez qu'elle enfeignoit, il étoit dans la réfolution d'en extirper le principe, en ne permettant point d'autre exercice de religion, que celui de la Catholique fondée fur l'écri

De Thou, loca

XLIII. Remontrances

qu'il fait au roi

de Navarre & au prince de Condé.

De Thou loco"

prà

Duplex hift. de"

France, tom. z.

pag. 72.

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AN. 1572.

XLIV. Réponses du roi

ques,

ture fainte, autorifée fur les traditions apostoli, confirmée par des miracles fans nombre, & établie fur la fucceffion des pontifes Romains depuis faint Pierre que lorfqu'il avoit fait mettre à mort l'amiral & fes complices, il avoit eu fes raisons pour ne pas obferver dans cette occafion les formalitez de la justice, aufquelles un monarque, ditil, n'eft point obligé, fur-tout contre des perfonnes qui avoient si souvent conspiré contre l'état & contre la perfonne facré des rois il ajoûta, que quoiqu'ils fuffent coupables eux-mêmes de la derniere rébellion, il leur pardonnoit volontiers, en confidération de leur naiffance; mais que se croïant obligé de procurer le falut de leurs ames, il n'avoit que trois chofes à leur propofer, ou la messe, ou la mort, ou une prison perpetuelle, qu'il leur en laiffoit le choix, & qu'ils euffent à fe déterminer fur le champ.

Le roi de Navarre répondit modeftement au roi, de Navarre & du que la religion n'étant pas une chose indifferente, prince de Condé if alloit travailler à fe faire inftruire, & qu'on feroit De Thou bift. content de fa docilité. La réponse du prince de

au roi.

lib, 53.

Condé ne fut pas tout-à-fait fi moderée : il dit au roi, qu'aïant été élevé & nourri dans la religion de fon pere, & la croïant la meilleure, il fupplioit fa majefté de ne lui faire là-dessus aucune violence; que des trois chofes qu'elle lui avoit proposées, il se garderoit bien de choifir la premiere ; mais que le roi étoit le maître du choix des deux autres, & qu'il trouveroit toûjours en lui toute l'obéïffance qu'il pouvoit fouhaiter dans un fujet très-fidéle.

Sur cette réponse, le roi tâcha de faire convain

AN. 1572.

XLV.

Le ministre du

Rofier & le pere lert à la conver

Maldonat, travail

fion des deux prin

ces.

lib. 53. pag. 836.

1626.

cre les deux princes de la verité de la religion catholique, & il fit tenir fur ce fujet une conférence par le miniftre Sureau du Rofier, qui venoit d'abjurer fes erreurs. La conference se tint en présence du roi de Navarre, de Catherine de Bourbon fa fœur, du prince de Condé, de Marie de Cleves fa femme, & de Françoise d'Orleans fa belle-mere, qui tous avoient déja eu plufieurs entretiens fur la De Thou in hist. même matiere avec le pere Maldonat Jefuite. Du. Genev. anne Rofier parla avec tant de folidité & d'éloquence, que le roi de Navarre & les princesses déja fort ébranlez par les menaces de Charles IX. acheverent de fe déterminer pour la religion Catholique. Mais le prince de Condé qui n'avoit pas paru fatisfait de cette conference publique, tirant du Rofier à part, lui demanda s'il étoit perfuadé de tout ce qu'il venoit de dire, ou si ce n'étoit point la crainte qui l'eût fait parler contre fes propres fentimens. Le ministre répondit, qu'il étoit assuré de ce qu'il avoit dit, qu'il le penfoit de même, & fortifia de nouveau plufieurs des raifons qu'il avoit apportées dans la conference. Le prince après l'avoir laiffé un peu parler, lui dit: Si les chofes que j'ai apprises dès ma jeuneffe dans vos écoles étoient véritables, je les foutiendrois avec fermeté aux dépens même de ma vie : mais si j'ai erré, & fi je me fuis trompé, il faut quitter mon erreur, & me rendre à la verité : & depuis ce tems-là ce prince parut chancelant, & fe détermina enfin à abjurer le Calvinifme entre les mains du cardinal de Bourbon.

XLVI

Ils abjurent l'h

La cour fut fi fatisfaite du zéle & de l'habileté de du Rosier, qu'elle l'emploïa à ce ministere en plu- refie.

lib. 16. pag. 475.

fieurs endroits de Paris, & qu'elle l'envoïa enfuite AN. 1572. avec le Jefuite Maldonat dans le païs Meffin, où ils Beze hift. ecclef. firent une ample moiffon. Il fe rendit auffi de Mets à Sedan à la priere du duc de Montpenfier, pour travailler à la converfion de Françoife fa fille, femme de Robert de la Mark, duc de Bouillon, mais il ne gagna rien fur l'efprit de cette dame ; & lui-même chagrin du peu de fuccès de ce voïage, & se voïant blâmé par les amis qu'il avoit en Allemagne, rentra dans le parti des prétendus réformez dans lequel

XLVII. Ils écrivent au pape.

iDe Thou in bit. lib. 53. pag. 837.

Spond. hoc anno

77. 16.

il mourut.

Le roi de Navarre & le prince de Condé, écrivírent au pape le 3. d'Octobre : ils marquoient dans leur lettre, qu'ils reffentoient une vive douleur d'avoir été fi long-tems exclus de la communion de l'églife par la faulle doctrine dans laquelle ils avoient été inftruits dès leur jeuneffe. Que ce n'étoit pas tant la faute de leurs peres, que celle de ceux qui les avoient féduits : qu'après avoir reconnu leurs erreurs par les fages avertiffemens du roi, de la reine mere, des freres de fa majefté, du cardinal de Bourbon & du duc de Montpenfier, ils les avoient détestez, & avoient mis leur confeffion de foi entre les mains de fon nonce; qu'ils étoient affurez par la confiance qu'ils avoient dans fa charité, dont ils imploroient la clémence, qu'il voudroit bien les recevoir dans le fein de l'églife, & ils le prierent en parriculier de leur accorder les difpenfes néceffaires pour la validité des mariages qu'ils avoient contractez fans cette formalité. Le pape touché de ces témoignages de foumiffion, leur répondit le premier de Novembre; les combla de louanges, & non-seulement

envoïa

envoya les dispenses, mais confirma par une bulle expreffe le mariage des deux princes.

AN. 1572.

Navarre pour ré

Edit du roi de tablir la religion fes états. De Thou in hist. Duplex hift. de France, com. 3.

Catholique dans

lib. 53. pag. 839.

pag. 783.

Cependant le roi de Navarre pour donner des XLVIII. preuves plus fenfibles de fon changement & de fon retour à l'églife, fit un édit le 16. d'Octobre, par lequel fuivant le conseil de sa femme, de la reine mere & du cardinal de Bourbon fon oncle, il défendit l'exercice de la religion Calvinifte dans tous fes états, & particulierement dans la principauté de Bearn; il ordonna auffi par le même édit, le rétablissement de la religion Catholique, la restitution des biens ecclefiaftiques qu'on avoit enlevez au clergé, & le banniffement des miniftres du païs, s'ils refufoient d'abjurer leurs erreurs. Antoine de Grammont, gouverneur du Bearn, fut porteur de cet édit, & chargé de fon exécution: mais les Bearnois refuferent de se foumettre, fous prétexte que leur fouverain n'étant pas libre, n'agissoit, felon eux, que par l'inftigation des perfonnes qui le retenoient comme prifonnier, & qui gênoient, difoient-ils, fa confcience. Le roi fit auffi un édit, par lequel il privoit de toutes charges publiques ceux qui faifoient encore profeffion du Calvinisme, quoiqu'ils y euffent renoncé exterieurement, foit que ces charges fussent militaires ou de judicature; on n'en excepta que ceux qui exerçoient les moindres charges, & qui avoient fait publiquement abjuration de leurs erreurs. Charles, duc de Lorraine, avoit défendu à ses sujets dès le 14. de Septembre, l'exercice de la religion Proteftante, que la licence, difoit-il, avoit introduit dans fes états malgré lui & fans fon ordre : il permit toutefois aux Proteftans

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