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en avoient prefque entierement bannie. Appuïé de AN. 1570. l'autorité du pape, foûtenu du crédit du roi d'Efpagne, plein d'efperance dans le fecours que ce prince lui promettoit de la part de la Flandre, concevoit les plus hautes idées, & fe flattoit que tout alloit plier fous les efforts de fon zele. On ne peut que loüer fes intentions, & admirer fon courage: mais Dieu ne permit pas que le fuccès y répondît. S'étant ligué avec Jacques Fitz Morris & un autre Fitz Edmond fénéchal d'Imokil, ils affiegerent ensemble Kilken; mais ils furent repoullés par la garnison, qui fit une fortie fur eux. Le comte d'Ormond qui y fut envoïé d'Angleterre, perfuada à fon frere de fe foûmettre à la clemence de la Reine. Il le crut, & fe rendit prifonnier avec ses autres freres complices de la revolte; & le crédit du comte auprès d'Elizabeth, qui fut ravie de trouver cette occafion pour donner un témoignage fignalé de fa bonté & de fa moderation & qui voulut attacher cette maifon à fes interêts, fut cause qu'on ne les fit point comparoître en justice. Les reftes de la rebellion furent diffipées par le Viceroi.

En Ecofle on travailloit, au moins en apparence, au rétablissement de Marie. La reine d'Angleterre y avoit envoïé à cet effet des ambassadeurs; mais ils n'agirent que foiblement. Marie de son côté y envoïa Jacques Hamilton, chef, comme on l'a dit, de la maison la plus illuftre d'Ecoffe. Hamilton qui étoit comme exilé de fon pays, fut ravi d'y retourner à cette occasion; mais il n'y fit rien qui répondît à l'attente de la reine. Cependant Marie voïant qu'il y avoit de grandes divisions en An

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A N. 1570.

gleterre entre les grands du roïaume, s'appliqua à en gagner quelques-uns, afin de fe fervir d'eux contre Elifabeth dans le befoin. Elle fit entrer en particulier dans fes interêts le duc de Nortfolk, en lui promettant de l'époufer. Ce feigneur peu habile à diffimuler, se livrant à cette esperance, demanda legerement à Elizabeth la permiffion d'époufer Marie, & l'aflura qu'il avoit le confentement de cette reine. Cette imprudence lui coûta la liberté d'abord, & enfuite la vie: Elifabeth qui craignoit quelque confpiration, le fit mettre en prifon, & quelque tems après lui fit couper la tête. Dès lors la reine d'Ecoffe fut enfermée & gardée étroitement. Environ ce même tems le comte de Murray fut tué d'un coup de pistolet par un feigneur de la maison des Hamiltons, & cette mort fut fuivie de plufieurs confpirations en Angleterre, qui donnerent beaucoup de peine à Elifabeth. Rome éclata aufli contre cette Princeffe, & lui fit fentir tout le poids de fon autorité. Le pape Pie V. qui ne l'avoit attaquée jufqu'alors que d'une maniere communication indirecte, la profcrivit publiquement, & l'excom- De Thon lib. 46. munia par une bulle du 25. Février. Elle eft dépeinte dans cette bulle comme une efclave de fes crimes, Pii V. conftit. 101. qui ruinoit la religion Catholique en Ecoffe & en Angleterre ; qui s'étant approprié ce dernier roïaume, y ufurpoit encore monftrueufement l'autorité & la jurisdiction de fouverain chef de l'églife; qui avoit aboli l'auguste sacrifice de la Meffe pour établir les impietés de Calvin ; qui perfecutoit les évêques, les prêtres & tous les fideles par des banniffemens, des prisons, & toutes fortes de cruels fupplices & des vexations énormes, & qui étoit fi opiniâtre dans

II. Le pape publie une entenced'ex

contre Elifabeth.

Spond. ad hunc ann. n. 3. In bullario tom. 2.

fon impieté, que non seulement elle n'avoit pas A N. 1570. permis aux légats du faint fiege qui lui avoient été envoïés, d'entrer en Angleterre, mais encore qu'elle avoit méprifé les pieux avertissemens & les prieres des princes ses voifins: pour toutes ces raisons, le pape déclare qu'il excommunie Elisabeth, en la séparant elle & tous les adhérans de l'unité du corps de Jefus-Christ, comme des membres pouris, la privant de tout droit de roïauté, & difpenfant fes fujets du ferment de fidelité; défendant fous la même peine d'excommunication de lui obéïr, ou de déferer à aucuns de fes ordres & commandemens.

III.

La bulle eft affi

à la porte de l'é

veque.

vifib. Monarchia.

lib. 7. ad finem.

Spond. ad hunc

ann. n. 4.

Cette fentence d'excommunication imprimée à chée dans Londre Rome, fut affichée à Londres par Jean Felton au commencement du mois d'Août fur le foir, à la Sanderus lib. de porte même de l'évêque de Londres. Elle y demeura expofée jufqu'au lendemain huit heures du matin, fans qu'on fe doutât qui étoit celui qui avoit De Thou lib. 46. ainfi prêté fon miniftere au pape. Un ami de Felton qui étoit dans le fecret, lui confeilla de se retirer; mais Felton répondit, qu'il ne refuseroit point de fouffrir la mort pour une caufe fi fainte. Il fut en effet pris fur de fimples foupçons; & ayant été interrogé pour fçavoir de lui qui avoit affiché cette bulle: »Je veux bien vous délivrer, répondit-il, - d'inquiétude & de peine ; je confeffe librement que c'eft moi qui l'ai affichée. Sur cet aveu il fut condamné à mort, & conduit au fupplice le huitiéme d'Août ; & quand on l'exhorta à reconnoître fa faute, & à en demander pardon à la reine, il repliqua, qu'il ne l'avoit point offensée. Il eut d'abord la main droite coupée, & fut enfuite pendu

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au lieu ordinaire: on lui arracha le cœur & les en

trailles; on lui coupa aussi la tête, & son corps fut AN. 1670. mis en quatre quartiers, pour fervir de spectacle en

divers endroits.

IV.

les Catholiques.

La féverité de cette exécution caufa d'autant plus Ordres de la reine de murmure parmi le peuple, qu'on en avoit déja Elifabeth contre fait de pareilles, & que plufieurs avoient été punis Leti vied Elifabeth de mort, feulement pour avoir parlé en faveur des tom. 1. p.465. excommunications du pape. Cette conduite ne fut pas bien reçûë même des Proteftans, parmi lesquels il y avoit beaucoup de mécontens, finon de la reine, au moins de fes miniftres; & ces mécontens excitoient le peuple à la révolte. Elifabeth qui s'étoit mocquée d'abord de cette bulle du pape, reconnoissant dans la suite qu'elle avoit fait impreffion fur l'efprit de beaucoup de seigneurs, qui s'éloignoient de l'obéiffance qu'ils lui devoient, & que les Catholiques des provinces éloignées commençoient à remuer, crut qu'il étoit de fon interêt d'y remedier, & fit publier à fon de trompe les défenfes fuivantes : Que perfonne n'eût, fur peine de la vie, à appeller la reine de vive voix, ni par écrit, hérétique, fchifmatique, infidele, ufurpatrice, &c. Que perfonne, fous la même peine, n'eût la hardieffe de nommer qui que ce fût héritier de la couronne, ou dire qu'après la mort de la reine fa couronne appartiendroit à celui-ci, ou à celui-là, à moins que ce ne fuffent les propres enfans de la reine: Que perfonne n'eût encore à faire venir dans le roïaume, garder ou diftribuer des Agnus Dei, des chapelets, des images & des croix en ufage dans l'églife Romaine, fur peine de prison arbitraire, & de

confifcation de biens: Que perfonne n'eût la téme A N. 1570. rité de donner ou demander l'abfolution pour cause d'hérefie, fous peine d'être traité comme criminel de leze-majesté: Que perfonne, fous la même peine, n'osât porter ou faire porter directement ou indirectement, tout ce qui s'appelle bulles brefs apoftoliques, & autres écrits au nom du pape, ou de fes miniftres; ni entretenir aucune correfpondance avec la Cour de Rome, ni avec les miniftres & officiers du pape, & autres qui feroient à son fervice, à l'égard des chofes qui pourroient être préjudiciables à la couronne ou aux interêts de la reine: Que perfonne enfin, fous peine de confifcation de biens, n'allât s'établir dans les pays étrangers, & particulierement dans les états du pape, fans une permiffion expreffe de fa majesté.

V.

demande à Elifa

Marie.

lib. 46.

Cambden annal. regni Elifabeth.

Le roi de France ne fut pas plus écouté d'ElifaLe roi de France beth: ce prince follicita en vain la liberté de la reibeth la liberté de ne Marie. Elifabeth fe contenta de répondre, qu'il De Thou ut fup. ne falloit pas être furpris, fi après avoir découvert des pratiques qui avoient beaucoup de rapport à une conjuration, elle jugeoit à propos de veiller de plus près fur fes propres affaires, & de ne pas mettre en liberté une princeffe, qui afpiroit au roïaume d'une autre par des moïens qui ne paroif foient pas légitimes & fur qui les conjurez jettoient les yeux: que ce feroit une imprudence extrême, de négliger fon propre falut pour penfer à ce lui des autres Qu'au refte ni le roi de France, ni aucun autre prince, ne devoient trouver mauvais que dans tous les confeils qu'elle prenoit, elle fongeât fur toutes chofes à la propre conservation,

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