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L.

réfout d'attaquer

Pendant que ces novateurs s'appliquoient à réAN. 1570. pandre leurs erreurs en Pologne; Selim empereur Selim II. empe- des Turcs, obfervateur peu exact de l'alliance que reur des Turcs, fe Soliman II. fon pere avoit jurée avec les Venitiens, Tifle de Chypre, & que lui-même venoit de renouveller, réfolut De Thou hit lib. d'attaquer l'isle de Chypre, dont ceux-ci étoient les maîtres : cette résolution prise, il leur envoïa déclarer les prétentions qu'il avoit fur cette isle, & le deffein où il étoit de les faire valoir.

49. initio, p. 705.

LI.

Les Venitiens

pofer.

Le fénat de Venise répondit à l'envoïé de Selim prennent des me- au mois d'Avril 1570. que les Venitiens avoient,fui fures pour s'y op- vant le traité, cultivé religieusement & avec une De Thou hift. lib. foi fincere l'amitié du Sultan; qu'ils en avoient 49. Chalcondyle Dieu & leur confcience pour témoins : Qu'au reste, ils étoient prêts de fouffrir les dernieres extrêmitez, plutôt que d'être contraints par des menaces,

us fup.

Ou

par
d'autres voïes à des conditions qui feroient in-
juftes, ou indignes de la république : Que l'ifle de
Chypre n'étoit point de la dépendance des Muful
mans Qu'elle n'avoit jamais été foumife à l'em-
pire des Mammelus, & qu'on avoit païé jusqu'alors
le tribut dont on étoit convenu: Que les autres rai-
fons qu'on apportoit pour prétextes, avoient été
malicieusement inventées par ceux qui cherchoient
l'occafion d'intenter une injufte guerre : Qu'il n'é-
toit pas en la puiffance des princes d'empêcher les
crimes ; mais qu'il étoit de leur devoir de ne les pas
laiffer impunis: Qu'ils ne nioient pas, que quelques
pirates après leurs courfes contre les ordres du fénat,
ne fe fuflent cachez dans cette ifle; mais que les
Turcs ne pouvoient auffi nier, que lorfque quelques-
voleurs étoient tombez entre les mains des magif-

trats, ils avoient été auffi-tôt punis. Qu'ainfi les Venitiens appuïez fur la justice de leur cause étoient prêts de fe défendre, fi les Turcs les attaquoient injustement, & qu'ils efperoient que Dieu feroit le juste vengeur de tous les défordres & de tous les malheurs qui naîtroient de cette guerre : ainfi l'on congédia l'envoïé, & l'on le prépara férieusement à la guerre.

A N. 1570.

LIL.

parent de Nico

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Les Venitiens implorerent le fecours des princes contre leur ennemi commun, & pour y engager ceux-ci, le pape accorda un jubile géneral, afin d'attirer la miféricorde de Dieu, & les aumônes des fidéles: cependant l'empereur ne voulut point entrer dans cette guerre, & il n'y eut que le pape, l'Espagne & Venife, qui fe liguerent. Mustapha qui commandoit l'armée des Turcs, étant arrivé à la Les Turcs s'eme vûë de l'ifle, envoïa auffi-tôt pour demander qu'on la lui remît, ajoûtant qu'en cas de refus il déclaroit la guerre : mais comme on avoit armé pour défendre Chypre, on n'eut garde de la rendre, & le Turc forma auffi tôt le fiége de la ville de Nicofie, située au milieu de l'ifle. Ce fiége dura quarante-huit jours, & la ville fut prife enfin par les Turcs qui l'abandonnerent au pillage: on réferva pour Selim un nombre de femmes & de filles les plus doüées des graces de la nature, quelques jeunes gens les mieux faits, les meubles les plus précieux, & l'on en chargea trois vaiffeaux qui devoient faire voile vers Conftantinople; mais pendant qu'ils attendoient un tems favorable, une dame de l'ifle de Chypre, dont l'histoire ne nous a pas confervé le nom, y mit le feu, & priva ainfi le Sultan de ce qui lui étoit def

A N. 1570.

LIII.
Le grand vifir
Mehemet veut
menager la paix

des Turcs, tom. 2.

Muftapha fier de la prife de Nicofie, marcha contre Famagoufte, dont il forma auffi le fiége: il y trouva d'abord beaucoup de résistance ; mais la divifion qui se mit parmi les Chrétiens, le refus que les Espagnols firent d'abord de fournir de l'ar& des vaiffeaux, & les lenteurs qu'ils apportegent rent dans le fecours, qu'ils confentirent enfin de donner, laifferent tout le tems aux victorieux de poursuivre les conquêtes.

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Selim de fon côté n'oublioit rien pour inquiéter la république de Venife; il la harceloit en plufieurs endroits de fes états, afin de l'obliger à faire diverfion de fes forces. Il envoïa en Albanie le bacha Achmet avec foixante mille hommes ; & le bacha aïant mis l'épouvante de tous côtez, affiégea Dulcigno, ville de l'ancienne Illyrie, aujourd'hui Dalmatie, fituée fur le bord de la mer Adriatique, avec un château & un bon port. Hali aborda dans l'isle de Chio au mois d'Août avec une flotte de quarantė galeres, & dans le même tems, le bey de Negrepont le fuivit avec le refte de l'armée navale,

Les differentes négociations du pape pour faire une ligue entre les princes Chrétiens, ne laiffoient entre les Veni- pas cependant de donner de l'inquiétude aux Turcs: tiens & les Turcs. ils appréhendoient de voir tomber fur eux tous les Chalcond. hift. fouverains de la Chrétienté. Le grand vifir Mehemet, qui n'avoit point été d'avis qu'on portât la guerre en Chypre, craignoit auffi que ces grands mouvemens ne fussent préjudiciables à l'empire Ot toman ; & ce qui le touchoit davantage, étoit la grande autorité que Mustapha fon ennemi fe concilioit par fes conquêtes. Ces differentes pensées lui

lib. 15. pag. 698.

Spond, ad hunc an. n. I.

Y

A N. 1771.

en firent naître de pacifiques : il tenta de porter les Venitiens à quelque accommodement, & il les trouva tellement difpofez, qu'ils ne tarderent pas à envoïer Jacques Ragazzoni à Constantinople, pour écouter les propofitions que l'on feroit à la républiPendant ce temsque. -là, la ligue dont on a parlé, fut ratifiée au mois de Mai de cette année 1571. entre le pape Pie V. Philippe II. roi d'Espagne, & la république de Venife, & elle arrêta le fuccès dé la négociation de Ragazzoni, fans être plus utile aux Venitiens. Famagoufte toujours attaquée par Siège de Famale Turc avec chaleur, fe vit en affez peu de tems goufte par les réduite à l'extrêmité : la difette y combattit au-de- Turcs.

Chalcond. ut

703.704.

dans pour le victorieux, qui l'affiégeoit au-dehors fup. lib. 15. pag. fans aucun relâche, & avec des forces très-fuperieu- 703.& 704. res à celles des affiégez. Les befoins furent fi preffans, que les principaux de la ville présenterent au gouverneur Bragadin une requête, dans laquelle après lui avoir expofé leur zéle, & le courage avec lequel ils avoient défendu la ville, jufqu'à fe foucier peu de perdre la vie, ils le prioient d'avoir égard au danger évident, auquel ils étoient expofez avec leurs femmes & leurs enfans ; & de pourvoir à leur confervation par la reddition de la place à des conditions honnêtes, afin de les garantir de la cruauté des ennemis.

cours

Bragadin fur cette requête, aïant affemblé les magiftrats & les principaux officiers, leur fit un difplein de modération & de fageffe, & les exhorta à tout efperer du fecours, qu'il comptoit devoir arriver dans peu de Candie où il avoit envoïć pour ce sujet : il ajouta, que fi cette esperance étoit

vaine, il n'étoit pas homme à les vouloir abandonA N. 1571. ner à la fureur de l'ennemi, & à causer leur perte entiere par fon opiniâtreté. Qu'il déploroit à la verité leur malheur, qu'il avoit beaucoup admiré jufqu'ici la valeur & la conftance, tant des chefs, que des foldats & des citoïens ; mais qu'il ne falloit pas fi aisément accorder les lauriers à un ennemi, qui s'étoit fi souvent reconnu pour vaincu. D'ailleurs pensez-vous, ajouta-t'il, que ce fier vainqueur vous épargne, quand vous vous ferez livrez à lui? où eft la foi que ces infidéles ont gardée à ceux qui fe font rendus rappellez dans votre memoire, comment ils traiterent l'ifle de Rhodes, quelques belles promeffes qu'ils euffent données de ne maltraiter perfonne, & quoiqu'on eût affaire alors à celui de tous les Sultans qui avoit le plus de réputation de garder la parole ? Enfin Bragadin les assura, que fuivant la néceffité, il prendroit un parti qui feroit conforme à leurs fentimens : ce difcours en gagna quelques-uns; mais le plus grand nombre foutint abfolument, qu'il falloit compofer avec l'ennemi, & fe rendre pour éviter un plus grand

LV.'

Les affiégez de

ve pour traiter de

lib. 49. pag. 73.

mal.

Les Turcs aïant achevé leurs travaux, mirent le mandent une tré- feu aux mines le 30. de Juillet, & abbatirent tout leur reddition. ce qui reftoit entier de la tour du Havre, & une De Thou, hift. partie d'un fort qui défendoit la porte : dans le même tems ils fe jetterent fur les murs, l'on combattit vivement durant fix heures, & plufieurs infidéles demeurerent fur la place. Le jour fuivant, le combat recommença vers le midi, mais avec moins de force & moins de perte de part & d'autre'; enfin

après

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