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aiant affemblé les Officiers, & leur aiant marqué la différence infinie qu'il y avoit entre les troupes ennemies & les leur, leur rendit bientôt le cou

rage.

que pour

Cyrop. 1. 6.

Cyrus avoit pris toutes les mesures néceffaires pour que fon armée ne p. 158-163. manquât de rien, & avoit donné fes ordres tant pour la marche la bataille qu'il fe préparoit de livrer, étant defcendu pour cela dans un détail étonnant que Xénophon raporte fort au long, & qui s'étendoit depuis les premiers Commandans jufqu'aux plus bas Officiers, parce qu'il favoit bien que c'eft de telles précautions que dépend le fuccès des entreprises, qui fouvent échouent par les plus légéres négligences, comme il arrive quelquefois que le jeu & le mouvement des plus grandes machines est arrété par le dérangement d'une feule roue quelque petite qu'elle foit.

Ce Prince connoiffoit tous les Offi- Lib. 5.p.131. ciers de l'armée par leurs noms, & se 132. fervant d'une comparaifon triviale mais expreffive, il avoit coutume de dire qu'il trouvoit bien étrange que les artifans fûffent les noms de tous leurs outils, & qu'un Général fût G

Lib. 6. p.

160-161.

indifferent que de ne favoir pas les noms de fes Capitaines, qui font autant d'inftrumens dont il fe fert dans toutes fes entreprises. D'ailleurs il jugeoit que cet ufage avoit quelque chofe de plus honorable pour les Officiers, de plus engageant, & de plus propre à les porter à faire leur devoir, en leur laiffant penfer qu'ils étoient connus & eftimés du Général.

Lorfque tous les préparatifs furent achevés,Cyrus prit congé de Cyaxare, qui demeura en Médie avec la troifiéme partie feulement de fes troupes, pour ne pas laiffer fon pays entièrement dégarni.

Cyrus, qui favoit qu'il est toujours avantageux de faire la guerre dans le pays ennemi, n'attendit pas que les Babyloniens vinffent l'attaquer dans le fien, mais il marcha à leur rencontre, dans le deffein de faire confumer leurs fourages par fes troupes, & encore plus de les déconcerter par la promtitude & par la hardieffe de cette entreprise. Après une très longue marche, il joignit les ennemis à Thymbrée, ville de la Lydie, fituée affez près de Sardes capitale du pays. Ils n'avoient point cru que ce Prince,

avec une armée plus foible de la moitié que la leur, pût fonger à les venir chercher dans leur pays; & ils furent étrangement furpris de l'y voir arriver, fans qu'ils euffent eu le tems ni de ramaffer les vivres qui étoient néceffaires pour la fubfiftance d'une armée auffi nombreuse que la leur, ni d'affembler toutes les troupes qu'ils vouloient lui opposer.

§. VI.

Bataille de Thymbrée entre Cyrus
&Créfus.

CETTE bataille eft un des plus confidérables événemens de l'antiquité, puifqu'elle décida de l'empire de l'Afie entre les Affyriens de Babylone &

l'Acad. des

les Perfes. C'eft ce qui a engagé M. Tom. 6. des Freret, l'un de mes confreres dans Mémoires de l'Académie des Belles Lettres, à Belles Lettres l'examiner avec un foin particulier, pag. 532. d'autant plus volontiers, comme il le remarque, que c'eft ici la premiére bataille rangée dont nous connoiffions le détail avec quelque étendue. Je me fuis mis en poffeffion de profiter du travail & des lumieres des autres,

Cyrop. 1. 6.

p. 167.

mais fans leur en dérober la gloire,
& fans m'ôter auffi la liberté d'y faire
les changemens que je juge néceffai-
res. Je donnerai à la defcription de
cette bataille plus d'étendue que je
n'ai coutume de faire, parce que Cy-
rus étant confidéré comme un des
plus grands Capitaines dont il foit
parlé dans l'antiquité, les gens du
métier feront bien aifes de le fuivre
ici dans toutes fes démarches: &
d'ailleurs la manière dont les anciens
faifoient la
guerre, & donnoient les
combats, fait une partie effentielle de
leur hiftoire.

Dans l'armée de Cyrus les Compagnies d'infanterie étoient de cent hommes fans compter le Capitaine. La Compagnie avoit quatre Efcouades, qui étoient de vingt-quatre hommes chacune, non compris celui qui la commandoit. L'Efcouade fe partageoit en deux files, chacune de douze hommes. Dix compagnies avoient un Chef pour les commander, qui répond affez à ce que nous appellons Colonel; & dix de ces Corps avoient un Commandant, qu'on pourroit appeller Brigadier.

Lib. 2. p. 39. J'ai déja remarqué que Cyrus, lorf

40.

qu'il vint à la tête de trente mille Perfans au fecours de fon oncle Cyaxare, fit dès lors un changement confidérable dans fes troupes. Les deux tiers ne fe fervoient que de javelots ou d'arcs, & par conféquent ne pouvoient combattre que de loin. Au lieu de cela Cyrus les arma pour la plupart de cuiraffes, de boucliers, & d'épées ou de haches; & laiffa peu de foldats armés à la légére.

Les Perfes ne favoient alors ce que Lib. 4.99. c'étoit que de combattre à cheval, 100. lib. 5. Cyrus, convaincu que rien n'est plus 138. décifif pour le gain d'une bataille' que la cavalerie, fentit bien cet inconvénient, & de loin il prit de fages précautions pour y remédier. Il en vint à bout, & peu à peu il forma un corps de cavalerie Perlane qui monta jufqu'à dix mille hommes, qui étoient les meilleures troupes de l'armée.

Je parlerai ailleurs du changement qu'il introduifit dans les chariots de guerre. Ileft tems de venir au dénombrement des troupes de l'une & de l'autre armée, que l'on ne peut fixer que par conjecture, & en réuniffant plufieurs endroits de Xénophon, cet Auteur aiant omis d'en marquer ici

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