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reftoit au tems de Théodoret qu'un filet d'eau, qui couloit à travers les mafures, & qui n'aiant plus de pente ni d'écoulement libre, dégénéroit néceffairement en un marais.

VII. Par tous ces changemens, Babylone devint entiérement déferte & tous fes environs devinrent auffi affreux & auffi abandonnés que le lieu qu'elle avoit occupé: & les géographes les plus habiles ne favent aujourd'hui où le déterminer. Ainfi fut accompli à la lettre ce que Dieu avoit prédit: Je perdrai le nom de Babylone... Ifai. 14. 2. Je couvrirai d'un marais le lieu qu'elle oc-23. cupe maintenant. Je rechercherai avec foin jufqu'à fes moindres veftiges pour les effacer. Je ferai moi-même la recherche, le Seigneur, avec un œil jaloux, pour découvrir s'il ne reftera rien d'une ville ennemie de mon nom & de Jérufalem. Je balaierai avec foin la place où elle aura été, & je la rendrai fi nette, en effaçant jusqu'aux moindres veftiges d'une ville, que perfonne ne pourra conferver la mémoire du lieu choifi par Nemrod, & aboli par moi qui fuis le Seigneur. Scopabo eam in fcopa terens,

dicit Dominus exercituum.

a Nunc omnino deftru

dit

&ta, ita, ut vix ejus fuperfint rudera Baudran,

من

VII. Dieu ne s'étoit pas contenté de faire predire tous ces changemens: il avoit voulu terminer & fceller cette prédiction par un ferment, pour en Lai. 14. 24. marquer davantage la certitude. Le Seigneur des armées a fait ce ferment: Je jure que ce que j'ai réfolu arrivera, & que ce que j'ai arrêté s'exécutera. Mais pour donner à ce formidable ferment toute fon étendue, il ne faut pas le borner ni à Babylone, ni au peuple qui l'a habitée, ni aux Princes qui y ont régné. C'est la malédiction du monde entier que nous lifons ici, C'est l'anathême général des impies. C'est l'arrêt foudroiant qui féparera pour toujours les deux cités de Babylone & de Jérufalem, & qui mettra un éternel divorce entre les faints & les réprouvés. Les Ecritures qui l'ont prédit fubfifteront jufqu'au jour où il fera exécuté. La fentence en eft écrite ici, & mife comme en dépôt dans les archives publiques de la religion. Juravit Dominus exercituum, dicens: Sinon, ut putavi,ita erit ; & quomodo tractavi, fic eveniet.

Ce que j'ai dit fur la prophétie qui regarde Babylone, eft prefque entiérement tiré d'un excellent ouvrage encore manufcrit fur Ifaïe.

§. IV.

Suites de la prife de Babylone.

CYRUS étant entré dans la ville cyrop. lib. 7. de la manière que nous l'avons mar- pag. 192. qué, fit faire main baffe fur tous ceux qui fe rencontrérent dans les rues : puis il ordonna aux bourgeois de lui apporter toutes leurs armes, & de fe tenir enfuite renfermés dans leurs maisons. Le lendemain à la pointe du jour, quand la garnison qui étoit dans la citadelle eut appris que la ville étoit prise, & le Roi tué, elle se rendit à Cyrus. Ainfi prefque fans coup férir, & fans trouver aucune résistance, il fe vit maître paisible de la plus forte place qui fût au monde.

Cyrus commença par remercier les dieux de l'heureux fuccès qu'ils venoient de lui accorder. Il affembla les principaux Officiers, dont il loua publiquement le courage, la fageffe, le zêle & l'attachement pour fa perfonne, & diftribua des récompenfes à toute l'armée. Il leur remontra en- Pag. 197. fuite que l'unique moien de confer- 200. ver ce qu'ils avoient acquis, étoit de perfévérer dans leur ancienne vertu : Que le fruit de la victoire n'étoit pas

Bag, 202.

de s'abandonner aux délices & à l'oi fiveté : Qu'après avoir vaincu les ennemis par la force des armes, il feroit honteux de fe laiffer vaincre par les attraits de la volupté: Qu'enfin, pour conferver leur ancienne gloire, il faloit maintenir à Babylone parmi les Perfes la même difcipline qui étoit obfervée dans leur pays, & pour cela donner leurs principaux foins à la bonne éducation des enfans. Par là, dit-il, nous deviendrons nous-mêmes plus vertueux de jour en jour, en nous efforçant de leur donner de bons exemples, & il fera bien difficile qu'ils fe corrompent,lorfque parmi nous ils ne verront & n'entendront rien qui ne les porte à la vertu, & qu'ils feront continuellement dans une pratique d'exercices louables & honnêtes.

Cyrus confia à différentes perfonnes, felon les qualités qu'il leur connoiffoit, différentes parties & différens foins du gouvernement: mais il fe réserva à lui feul celui de former des généraux, des gouverneurs de provinces, des ministres, des ambaffadeurs, perfuadé que c'étoit là proprement le devoir & l'occupa

tion

tion d'un roi, & que de là dépen-
doient fa gloire, le fuccès des affai-
res, le repos & le bonheur de l'em-
pire. Son grand talent étoit d'étudier
le caractére des hommes, afin de mar-
quer à chaque perfonne fa place; de
donner de l'autorité à proportion du
mérite; de faire concourir le bien
particulier au bien public; & de con-
duire tout l'Etat
par un mouvement
fi réglé, que tout fe liât & s'entretînt,
& que la force des uns ne fût em-
ploiée que pour l'utilité des autres.
Chacun avoit fon diftrict & fon objet
particulier, dont il rendoit compte à
celui qui étoit au deffus de lui, & ce-
lui-là à un troifiéme, & ainfi de tous
les autres, jufqu'à ce que par ces dif-
férens dégrés & par cette fubordina-
tion réglée la connoiffance des affai-
res parvînt jufqu'au Roi, qui ne de-
meuroit point oifif au milieu de tout
ce mouvement, mais étoit comme
l'ame du corps de l'Etat, qu'il gou-
vernoit par ce moien avec autant de
facilité, qu'un pere gouverne fa fa-
mille.

Lorsque dans la fuite il envoia des cyrop. 1.8. Gouverneurs, qu'on appelloit Satra-P. 29. pes, dans les provinces qu'il avoit

Tome II.

M

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