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étoient redevables de leur trône.

Les Perfes n'étoient pas feulement Herod. lib. ennemis de l'injuftice, comme nous 1, cap, 138, venons de le voir; ils avoient encore en horreur le menfonge, qui-paffa toujours parmi eux pour un vice bas & infamant. Ce qu'ils trouvoient le plus lâche après le menfonge, c'étoit de vivre d'emprunt. Une telle vie leur paroiffoit fainéante, honteufe, fervile, & d'autant plus méprifable qu'elle portoit à mentir.

§. IV. Attention fur les Provinces.

IL PAROIT facile de maintenir le bon ordre dans la capitale du roiaume, où la conduite des Magiftrats & des Juges eft éclairée de près, & où la vue feule du trône eft capable de tenir les fujets dans le refpect. Il n'en eft pas ainfi des provinces, où l'éloignement du Prince & l'efpérance de l'impunité peuvent donner lieu à beaucoup de malverfations de la part des Officiers & des Magiftrats, & de défordres de la part des peuples. C'est à quoi la politique des Perfes s'appliquoit avec le plus de foin, & l'on peut dire auffi avec le plus de fuccès.

teurs varient

L'empire des Perfes fe divifoit ent * Les A cent vingt-fept Gouvernemens, fur le nombre dont ceux qui en étoient chargés des Strapies s'appelloient Satrapes. Ils avoient au rop. lib. 8. p. deffus d'eux trois principaux Minif

229-232..

tres qui veilloient fur leur conduite, & à qui ils rendoient compte de toutes les affaires de leurs provinces, & qui devoient enfuite en faire le raport au Roi. C'étoit Darius Médus c'eft-à-dire Cyaxare, ou plûtôt Cyrus fous le nom de fon oncle, qui avoit établi ce bon ordre dans l'empire. Ces Satrapes, par leur établis fement, étoient chargés de fe rendre, chacun dans fa province, auffi attentifs aux intérêts des peuples qu'à ceux du Prince: car Cyrus étoit perfuadé qu'on ne devoit point mettre de différence entre ces deux fortes d'inté rêts, qui font néceffairement liés enfemble, puifque les peuples ne peu vent être heureux fi le Prince n'eft puiffant & en état de les défendre, ni le Prince être véritablement puiffant fi les peuples ne font heureux.

Ces Satrapes étoient les perfonnes de l'Etat les plus confidérables, à qui Cyrus affigna des fonds & des revenus proportionnés à l'importance de

leurs emplois. Il vouloit qu'ils vé cuffent noblement dans la province, pour s'attirer le refpect & des grands & des peuples qui étoient confiés à Leurs foins; & que par cette raifon leur train, leur équipage, leur table répondîffent à leur dignité, fans pourtant fortir des bornes d'une fage & raifonnable modeftie. Il fe propofoit lui-même à eux pour modéle, comme il fouhaitoit qu'ils le fuffent aussi de leur côté pour tous les Seigneurs fur lefquels ils avoient quelque intendance: en forte que le même ordre qui régnoit dans la Cour du Prince fût auffi observé à proportion dans la Cour des Satrapes, & dans la maifon des grands Seigneurs. Au refte, pour prévenir, autant qu'il lui étoit poffible, tous les abus qu'on auroit pu faire d'une autorité auffi grande qu'étoit celle des Satrapes, il s'en étoit réfervé à lui feul la nomiiration, & il voulut que les Gouverneurs de places, les Commandans des troupes, & d'autres pareils Officiers, euffent raport directement au Prince, & réçuffent de lui les ordres, afin que files Satrapes venoient à abufer de leur pouvoir, ils fuffent

qu'ils trouveroient en eux autant d'infpecteurs & de cenfeurs. Et pour rendre ce commerce de lettres plus fûr & plus promt, il établit dans toute l'étendue de fon empire des couriers qui alloient jour & nuit, & faifoient une diligence extraordinaire. Je différe d'en parler à la fin de ce paragraphe, pour ne point interrompre la matiére que je traite.

Le Roi ne se reposoit pas entiérement du foin des provinces fur les Satrapes & les Gouverneurs: il en prenoit connoiffance par lui-même, perfuadé que ce n'eft régner qu'à demi, que de régner par les autres. Un Officier de la Couronne étoit chargé de lui dire tous les matins Plut. ad en l'éveillant: Sire, levez-vous, Princ. indoit fongez à remplir les fonctions pour lef

p. 780.

Xenoph. in Oeconom. P

من

quelles Oromafde vous a placé fur le trône. Oromafde étoit un Dieu confidérable, honoré anciennement chez les Perfes. Un bon Prince, dit Plutarque en raportant cette coutume, n'a pas befoin qu'un Officier lui répéte tous les jours cet avis: l'amour pour fon peuple & fon bon cœur le lui difent affez.

Chez les Perfes le Roi fe croioit

228.

donc obligé, felon l'ancienne coutume qui y étoit établie, de vifiter en perfonne toutes les provinces de fon empire; & il comprenoit, comme a Pline le dit de Trajan, que la gloire la plus folide & la joie la plus fenfible d'un bon Prince, eft d'aller de tems en tems montrer aux peuples leur Pere commun; réconcilier les villes troublées par des haines mutuelles & des diffenfions; arréter les mouvemens préts à éclater, moins par l'austérité du commandement que par l'autorité de la raifon; empécher les injuftices & les violences des Magiftrats; caffer abfolument tout ce qui s'eft fait contre l'ordre & contre les régles; en un mot, porter par tout, comme un aftre bienfaifant, des influences falutaires, ou plutôt, comme une efpéce de divinité, connoître tout, entendre tout, fe rendre préfent à tout, fans rejetter jamais aucune plainte ni aucune fuppli

cation.

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a Reconciliare æmulas oportuerit, poftremò ve. civitates tumentefque lociffimi fideris populos non imperio ma- omnia invifere, omnia gis quàm ratione com- audire, & undecumque pefcere, intercedere ini- invocatum, ftatim, velut quitatibus Magiftra- numen, adeffe & adfifte tuum, infectumque red-re. Plin. in Panegyr. Traj. dere quidquid fieri non

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