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RUNT, QUONIAM VIRTUTI
TUÆ FORTUNA CONJUNCTA

EST. Qu'il feroit à fouhaiter que
notre jeune Nobleffe, qui dans un
tems de paix ne fait à quoi s'occu
per, eût un pareil goût pour l'agri-
culture, dont certainement, après ce
que nous venons de voir de Cyrus
elle ne devroit pas fe croire desho-
norée; fur tout quand on fait que
cette même agriculture a fait pen-
dant plufieurs fiécles l'occupation
ordinaire de la nation du monde la
plus guerriére & la plus courageufe:
on fent affez que je parle des Ro-

mains.

Invention des Poftes & des Couriers.

J'AI PROMIS de parler ici de Xenoph. C l'invention des poftes & des couriers.232. Elle eft attribuée à Cyrus; & je ne fache point en effet qu'avant lui il en foit fait mention. Comme l'empire des Perfes, depuis fes derniéres conquêtes, avoit une vafte étendue, & qu'il exigeoit que tous les Gouverneurs des provinces & tous les premiers Officiers des troupes lui écriviffent exactement pour l'informer de tout ce qui fe paffoit chacun dans

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leur département & dans leur armée, pour rendre ce commerce plus fûr & plus promt, & se mettre en état d'être averti en diligence de toutes les affaires, & d'y donner ordre fur le champ, il établit des couriers & des poftes dans chaque province. Aiant fupputé ce qu'un bon cheval, pouffé avec force, pouvoit faire de chemin en un jour, fans pourtant se ruiner, il fit construire à proportion des écuries également diftantes l'une de l'autre, & il y envoia des chevaux & des palefréniers pour en prendre foin. Ily établit auffi un Maître, pour recevoir les paquêts des couriers qui arrivoient,& les donner à d'autres, & pour prendre les chevaux qui avoient couru, & en fournir de frais. Ainfi la pofte marchoit jour & nuit, & faifoit grande diligence, fans que ni la pluie, ni la neige, ni la chaleur, ni aucune autre incommodité des faifons y mît Herod, L. s. obftacle. Hérodote parle des mêmes couriers fous Xerxès.

1.98.

Ces couriers s'appelloient en langue Perfane Anapor. La Surinten

* Aja vient d'un

mot,

qui dans cette langue fignifie un fervice comme par force. Ceft de là que les Grecs ont fait leur verbe |

¿ggapéusiv. compellere, cogere: & les Latin angariare. Selon Suidas. ils s'appelloient aussi Asten. dæ.

Fortun. Alex.

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dance des poftes devint une charge confidérable. Darius, le dernier des Plut. I. 1. de Rois de Perfe, l'avoit remplie, avant p. 316. Et in que de monter fur le trône. Xéno-vit. Alex. p. 674. ubi pro phon remarque que cet établiffement Ασγάνδη:, ίσα duroit encore de fon tems; ce quigendum As'accorde parfaitement avec ce qui eft raporté dans le livre d'Efther au fujet de l'Edit donné par Affuérus en faveur des Juifs, & qui fut porté par tout ce vafte empire avec une rapidité qui auroit été impoffible fans les poftes que Cyrus avoit établies.

On eft furpris avec raifon de voir que cet établissement des poftes & des couriers,trouvé d'abord en orient par Cyrus, & mis enfuite en ufage par fes fucceffeurs pendant tant de fiécles; qu'un tel établiffement, disje, fi utile au gouvernement, n'ait point paffé en occident, fur tout parmi des peuples auffi habiles dans la politique qu'étoient les Grecs & les Romains, où l'on en voit des traces.

Il est encore étonnant que cette premiére invention des poftes n'ait pas conduit plus loin, & qu'on en ait borné fi lontems l'ufage aux feules affaires de l'Etat, fans être touché des grands avantages que le public

en pouvoit tirer, pour la facilité da commerce de la vie, & du négoce des marchands & des banquiers; pour l'expédition des affaires des particuliers; pour la promtitude des voiages qui demandoient de la diligence; pour la communication aifée des familles, des villes, & des provinces; pour la fûreté des fommes remises d'une contrée dans une autre. On fait quelle difficulté on avoit alors, & pendant les fiécles fuivans, à fe communiquer des nouvelles, & à traiter d'affaires, étant nécessaire pour cela ou d'envoier exprès un domestique, ce qui ne fe pouvoit faire fans beaucoup de dépense & de lenteur; ou d'attendre le départ de quelque perfonne qui allât dans la province où l'on vouloit écrire, ce qui étoit fujet à une infinité de contretems, de longueurs, & d'accidens. Nous jouiffons maintenant à peu de frais de cette commodité; mais nous n'en fentons pas affez l'avantage, que la privation feule peut faire bien connoître. La France en a l'obligation à l'Univerfité de Paris; & je ne puis m'empêcher d'en faire ici la remarque: j'efpére qu'on me par

donnera

donnera cette digreffion. Comme elle étoit la feule dans tout le roiaume, & qu'il y venoit de toutes les provinces un grand nombre d'écoliers, elle établit en leur faveur des Meffagers,dont les fonctions étoient, non feulement de porter hardes, or, argent, pierreries, facs des procès, informations, enquêtes; de faire la conduite de toutes perfonnes indifféremment, fourniffant chevaux & nourriture; mais encore de porter les lettres miffives des particuliers, & tous leurs paquêts.

Ces Meffagers font fouvent appellés dans les Regitres des Nations de la Faculté des Arts, Nuntii volantes, pour marquer la diligence qu'ils étoient tenus de faire. Ils fervoient le Public auffi-bien que l'Univerfité.

L'Etat eft donc redevable à l'Univerfité de Paris de l'établissement des Meffageries, & du port des Lettres. Elle a fait cet établiffement à fes frais & dépens, à la fatisfaction de nos Rois & du Public. Elle l'a foutenu depuis 1576 contre les différentes entreprises des Traitans, ce qui lui a couté des fommes immenfes. Ce ne fut qu'en cette année 1576 que le Roi Henri III. par fon Edit du

Tome II.

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