Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Xenoph.Cy

gens de trait, faifoient le gros des ar-
mées chez les Perfes & chez les
Médes. Cyrus, qui avoit reconnu par
l'expérience que ces fortes de troupes
n'étoient propres qu'à combattre de
loin & par maniére d'efcarmouche,
& qui croioit qu'il étoit plus avanta-
geux d'en venir d'abord aux mains,
avoit changé cet ordre, & les avoit
réduites à un affez petit nombre,
armant les autres de toutes piéces
comme le refte de l'armée.

3. Chariots armés de faulx.

CYRUS introduifit un changement

op. 6. P. confidérable dans les chariots de

352.

guerre. Ils étoient en ufage lontems
avant lui, comme il paroit par les
livres facrés & par Homére. Ces cha-
riots n'avoient que deux roues. Ils
étoient attelés pour l'ordinaire de
quatre chevaux de front, & montés
par un homme d'une naiffance &
d'une valeur diftinguées qui combat-
toit, & par un autre qui n'étoit occu-
pé qu'à conduire le chariot. Cyrus
trouva que cet ufage, qui entraînoit
beaucoup de dépenfes, étoit d'une
utilité fort médiocre, puifque pour
trois cens chariots il faloit douze cens

[ocr errors]

chevaux, & fix cens hommes, dont il n'y en avoit que trois cens qui combatiffent effectivement, les trois cens autres hommes de mérite & de distinction qui auroient pu être ailleurs d'une grande utilité, ne fervant que d'écuiers. Pour remédier à cet inconvénient, il changea la forme des chariots, & doubla le nombre des combattans, en mettant le conducteur en état de combattre lui-même.

Il fit les roues plus fortes, afin qu'elles ne puffent pas être facilement brifées, & allongea les effieux, afin de leur donner une affiette plus ferme. Il ajouta à chaque bout de l'effieu des faulx longues de trois piés, qui étoient difpofées horizontalement; & fous te même effieu il en mit d'autres tournées contre terre, pour couper en pieces foit hommes, foit chevaux, que l'impétuofité des chariots avoit renverfés. Il paroit par différens endroits des Auteurs que dans la fuite on ajouta encore au bout du timon deux longues pointes, pour percer tout ce qui fe préfentoit; & qu'on arma le derrière du chariot de plufieurs rangs de couteaux aigus,pour empêcher qu'on n'y pût monter.

Liv. lib. 37

1. 41.

241.

Ces chariots furent en ufage pendant plufieurs fiécles dans tout l'orient. On les regardoit comme faisant la principale force des armées,comme la caufe la plus certaine des victoires, & comme l'appareil le plus capable de jetter la terreur parmi les ennemis.

Mais à mesure que l'art militaire vint à fe perfectionner, on en fentit les inconvéniens, & enfin on y renonça entiérement. En effet, pour en tirer quelque utilité, il faloit trouver des plaines vaftes & étendues, un terrain fort uni, un pays où il n'y eût ni ravins, ni ruiffeaux, ni vignes, ni bois.

Dans les tems postérieurs on imagina plufieurs moiens d'en rendre l'usage abfolument inutile. Il fuffifoit de leur oppofer un fimple foffé, qui les arréLiv. lib. 37 toit tout court. Quelquefois un Général habile & expérimenté, tel qu'Eumenès dans la bataille que Scipion livra contre Antiochus, détachoit contre les chariots les frondeurs, les archers, les tireurs de javelot ; lefquels épars de tous côtés les accabloient d'une grêle de pierres, de traits, de fléches, & jettant de grands cris en même tems que toute l'armée,

Plut. in Syl

répandoient la terreur & le défordre parmi les chevaux, & les obligeoient fouvent de fe tourner contre leurs propres troupes. D'autres fois on empéchoit l'action & l'effet des cha. pag. 463. riots, en s'en approchant tout d'un coup, & franchiffant avec une extrême rapidité l'efpace qui féparoit les deux armées. Car ils ne tiroient leur force que de la longueur de leur courfe, qui donnoit l'impétuofité & la roideur à leur mouvement, fans quoi ils étoient foibles & languiffans. C'eft par là que les Romains, fous Sylla, à la bataille de Chéronée, repoufférent & mirent en fuite les chariots des ennemis, criant avec de grands éclats de rire, comme dans les jeux du Cirque, qu'on en fît paroître d'autres.

4. Difcipline en paix & en guerre.

ON NE PEUT rien ajouter au bon ordre & à la difcipline que gardoient fous Cyrus les troupes Perfanes, foit lorfqu'on étoit en paix, foit lorfqu'on faifoit la guerre.

Ce qu'il pratiquoit en tems de paix & qui eft raporté fort au long en plufieurs endroits de la Cyropédie, pour former fes troupes par de fréquens

exercices, pour les faire à la fatigue par de pénibles & continuels travaux, pour les préparer aux véritables batailles par des combats fimulés, pour les remplir de courage & de hardieffe par les exhortations, les louanges,

récompenfes: tout cela, dis-je, eft un modéle parfait, pour quiconque eft chargé du commandement des troupes, à qui, pour l'ordinaire, la paix & l'oifiveté deviennent pernicieufes en énervant leurs forces par le relâchement de la difcipline, & en émouffant par l'inaction cette pointe de courage que le mouvement feul des armées & l'approche des ennemis augmentent infiniment. Une fage prévoiance de l'avenir doit faire préparer pendant la paix ce qui peut fervir en tems de guerre.

a

Dans un jour de marche tout étoit réglé & ordonné avec autant d'attention & d'exactitude, que dans un jour de bataille, fans qu'aucun foldat ou officier ofât quitter fon rang, ni s'écarter du drapeau. La coutume étoit, chez tous les peuples d'Afie,lorfqu'on

a Metuenfque futuri,

In pace, ut fapiens, aptarit idonea bello. Horat Satyr, s. lib. 2.

« AnteriorContinuar »