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ces corps vigoureux où il femble que tout foit nerf, & où tout eft plein d'efprits; au refte fi bien commandées, & fi fouples aux ordres de leurs Généraux, qu'on eût cru que les foldats n'avoient tous qu'une même ame, tant on voioit de concert dans leurs mouvemens.

ARTICLE TROISIEME.

ARTS, SCIENCES.

JE n'entreprens point de parler de la poefie des Orientaux, qui ne nous eft gueres connue que par ce qui s'en trouve dans les Livres faints. Ces morceaux précieux fuffifent pour nous faire connoître l'origine de la poéfie, fa véritable destination, l'ufage qu'en ont fait les hommes infpirés de Dieu pour célébrer fa grandeur & chanter fes merveilles, la noblesse & la fublimité du ftile qui lui convient, proportionnée à la majefté des fujets qu'elle traite. Les difcours des amis de Job, établis comme lui dans l'orient, & qui n'étoient pas moins diftingués entre les Gentils par leur érudition que par leur naiffance, pourroient auffi nous donner quelque idée

du genre d'éloquence qui régnoit alors.

Ce que les Prêtres Egyptiens di- In Timas foient, felon Platon, des Grecs en pag. 22. général, & des Athéniens en particulier, qu'ils étoient des enfans dans l'antiquité, eft bien vrai à l'égard des arts & des sciences, dont ils ont fauffement attribué l'invention à des perfonnes chimériques & poftérieures de beaucoup au déluge. L'Ecriture nous Gen, ch.4 apprend que dès avant ce tems-là Dieu avoit découvert aux hommes l'art de cultiver la terre par le labour; de nourrir les troupeaux, en demeurant fous des tentes; de filer la laine & le lin, & d'en faire des étofes & de la toile; de polir le fer & l'airain, & de les faire fervir à une infinité d'ufages néceffaires à la vie ou à la fociété.

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La même Ecriture nous apprend encore qu'affez peu de tems après le déluge, l'induftrie humaine avoit fait plufieurs découvertes très-dignes d'admiration, & qu'elle avoit trouvé 10. le fecret de filer l'or, & de le faire entrer dans le tiffu des étofes: 20. le fecret de battre l'or, & de dorer par des couches légères le bois & les au

tres matiéres 3°. de jetter en fonte les métaux d'airain, d'argent, d'or; d'en faire toutes fortes de figures en imitant parfaitement la nature; d'exprimer les différens objets ; & d'en faire toutes fortes d'ornemens & de vaiffeaux: 40. d'appliquer la peinture, auffi-bien que la fculpture, fur le bois, fur les pierres, fur les marbres: 5. enfin, pour abréger, de faire la teinture des étofes dans les plus belles · couleurs.

Comme ce fut dans l'Afie que les hommes s'établirent d'abord après le déluge, il eft aifé de comprendre qu'elle fut comme le berceau des arts & des sciences, dont le fouvenir s'étoit confervé par la tradition, & dont la néceffité & le befoin les obligérent de renouveller, & pour ainsi dire de reffufciter l'ufage.

§. 1. Architecture.

LA CONSTRUCTION de la tour de Babel, & peu de tems après celle de ces fameufes villes, qui ont été regardées comme des prodiges, Babylone & Ninive; la magnificence des vaftes palais des Rois & des Seigneurs, diftribués en plufieurs fales & appar

temens, & ornés de tout ce que la dé cence & la commodité peuvent exiger; la régularité & la fymmétrie des colonnes & des voutes multipliées & élevées les unes fur les autres; la grandeur des portes des villes; la largeur & l'épaiffeur des remparts; la hauteur & la folidité des tours; la commodité des quais fur les bords des groffes riviéres ; la hardieffe des ponts bâtis fur les grands fleuves : tout cela, & plufieurs autres ouvrages femblables, montrent jufqu'où, dans une antiquité fi reculée, l'architecture avoit été portée.

Je ne fai pourtant fi dès lors elle étoit parvenue à cette perfection que la Grèce & l'Italie lui ont depuis donnée, & fi ces vaftes bâtimens de l'Afie & de l'Egypte; fi vantés par les anciens, avoient autant de régularité que de grandeur & d'étendue. J'entends parler de cinq ordres d'architecture, le Tofcan,le Dorique, l'Ionique, le Corinthien, le Compofite: mais je ne voi point d'ordre Afiatique ou Egyptien, ce qui donneroit affez lieu de douter fi la fymmétrie, les mefures, les proportions des coonnes, des pilaftres, & des autres

ornemens', régnoient parfaitement dans ces anciens édifices.

§. 2. Mufique.

IL N'EST PAS étonnant que dans un pays, comme l'Afie, livré au plaifir, aux délices, & à la bonne chére, la Mufique, qui en faifoit le principal affaisonnement, y ait été en honneur, & cultivée avec un grand foin. Le feul nom des principaux modes de. l'ancienne mufique, & que la moderne a confervés, le Dorien, le Phrygien, le Lydien, l'Ionien, l'Eolien, marque affez quel a été le lieu de sa naiffance, ou du moins celui où elle Gen. 31. 27. s'eft accrue & perf &tionnée. L'Ecriture fainte nous apprend que du tems de Laban la mufique & les inftrumens étoient fort en ufage dans le pays qu'il habitoit, c'est-à-dire, dans la Méfopotamie, puifqu'entre autres reproches qu'il fait à Jacob fon gendre, il fe plaint que par fa fuite précipitée il ne lui a pas laiffé lieu de le reconduire lui & fa famille avec des chants de joie, au bruit des tambours, Cyrop. 1. 4.& au fon des harpes. Dans le butin que Cyrus fit mettre à part pour Cyaxare fon oncle, il eft fait mention de

pag. 13.

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