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lui montrant la porte: Rien de tout ce qui fe dit ici, ne fort par là.

Le plus exquis de tous leurs mets étoit ce qu'ils appelloient la fauce moire, & les vieillards la préféroient à tout ce qu'on leur fervoit fur la i.Tuf. table. Denys le Tyran s'étant trouvé Qwajt. Lib. sà un de ces repas, n'en jugea pas de

3.98.

Pag. 47.

même, & ce ragoût lui parut fort
fade. Je ne m'en étonne pas, dit ce-
lui qui l'avoit préparé: l'affaifonne-
ment y a manqué. Et quel affaison-
nement, reprit le Tyran? La course,
la fueur, la fatigue, la faim, la foif.
Car c'eft là, ajouta le Cuifinier, ce
qui affaifonne ici tous nos mets.
4. AUTRES ORDONNANCES.

QUAND je parle d'ordonnances de Lycurgue, je n'entends pas des

loix écrites: il crut n'en devoir laiffer
prefque aucune de cette forte, perfua-


que ce qu'il y a de plus fort & de
plus efficace pour rendre les villes heu-
reufes & les peuples vertueux, c'eft
ce qui eft empreint dans les mœurs
& dans l'efprit des citoiens par
la
pratique même. Car les principes
que l'éducation y a gravés, demeu-
rent fermes & inébranlables, comme

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étant fondés fur la volonté feule, qui eft toujours un lien plus fort & plus durable que le joug de la néceffité; & les jeunes gens, qui ont été ainfi nourris & élevés, deviennent euxmêmes leurs loix & leurs légiflateurs. Voila pourquoi Lycurgue, au lieu de laiffer fes réglemens par écrit, les mit en usage, & les fit pratiquer.

Il regardoit l'éducation des enfans comme la plus grande & la plus importante affaire d'un Légiflateur. Son grand principe étoit qu'ils appartenoient encore plus à l'Etat qu'à leurs peres: & c'eft pour cela qu'il ne lailla pas ceux-ci maîtres de les élever à leur gré, & qu'il voulut que le public s'emparât de leur éducation, afin de les former fur des principes conftans & uniformes, qui leur infpiraffent de bonne heure l'amour de la patrie & de la vertu.

Si-tôt qu'un enfant étoit né, les Pag. 49 anciens de chaque tribu le vifitoient ; & s'ils le trouvoient bien formé, fort & vigoureux, ils ordonnoient qu'il fût nourri, & lui affignoient une

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*

* Je ne comprends pas | gner à chacun des enfans de comment ou pouvoit affi- Sparte pour fon héritage

T

des neuf mille portions pour fon he ritage. Si au contraire ils le trouvoient mal fait, délicat & foible, & s'ils jugeoient qu'il n'auroit ni force ni fante, ils le condannoient à périr, & le faifoient expofer.

On accourumoit de bonne heure les enfans à n'être point difficiles ni délicats pour le manger; à n'avoir point de peur dans les ténébres; à ne s'épouvanter pas quand on les laiffoit feuls; à ne point se livrer à la mauvaise humeur, ni à la criaillerie, ni Xenoph. de aux pleurs; à marcher nuds piés Lued. rep. p. pour le faire à la fatigue; à coucher durement; à porter le même habit en hiver & en été, pour s'endurcir contre le froid & le chaud.

77.

Plut. in Ly

A l'âge de fept ans on les diftriPag. 5o.buoit dans les claffes, où ils étoient élevés tous enfemble fous la même difcipline. Leur éducation n'étoit à proprement parler, qu'un apprentisfage d'obéiffance, le Législateur aiant

a

une des neuf mille portions
deftinées à cette ville. Le
nombre des citorens étoit-il
toujours le même ? Ne paf
foit-il jamais celui de neuf
je? Il n'eft point mar-

qué ici, comme dans le partage de la terre fainte que les portions affignées à une famille,y demeurassent toujours, & ne pussent étre entiérement aliénées.

* Ω'σε την παιδείας εἶναι μελέτην ευπειθείας.

bien

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bien compris que le moien le plus für d'avoir des Citoiens foumis à la Loi & aux Magistrats, ce qui fait le bon ordre & la félicité d'un Etat, étoit d'apprendre aux enfans dès l'âge le plus tendre à être parfaitement foumis aux Maîtres.

C

par

Pendant qu'on étoit à table, le Pag. $ Maître propofoit des queftions aux jeunes gens. On leur demandoit exemple: Qui eft le plus homme de bien de la Ville? Que dites-vous d'une telle action? Il faloit que la réponse fût promte, & accompagnée d'une raifon & d'une preuve conçue en peu de mots: car on les accoutumoit de bonne heure au stile laconique, c'est-à-dire à un ftile concis & ferré. Lycurgue vouloit que la monnoie fût fort pefante & de peu de valeur; & au contraire, que le difcours comprît en peu de paroles beaucoup de fens.

Pour ce qui eft des lettres, ils n'en Pag. Ssë apprenoient que pour le befoin. Toutes les fciences étoient bannies de leur pays. Leur étude ne tendoit qu'à favoir obéir, à fupporter les travaux, & à vaincre dans les combats. Ils avoient pour furintendant de leur éducation un des plus honnê¬ Tome II.

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ftitut. Lacon.

pag. 237.

tes hommes de la ville, & des plus qualifiés, qui établiffoit fur chaque troupe des maîtres d'une fageffe & d'une probité généralement recon

nues.

Pag. 50. Un vol d'une certaine efpece feuIdem in In-lement, & qui n'en avoit que le nom, étoit permis & même commandé aux jeunes gens. Ils fe gliffoient le plus finement & le plus fubtilement qu'ils pouvoient dans les jardins & dans les fales à manger, pour y dérober des herbes ou de la viande : & s'ils étoient découverts, on les puniffoit pour avoir manqué d'adreffe. On raconte qu'un d'eux aiant pris un petit renard, le cacha fous fa robe, & fouffrit, fans jetter un feul cri, qu'il lui déchirât le ventre avec les ongles & les dents, jufqu'à ce qu'il tomba mort fur la place. J'ai dit que ce vol n'en avoit que le nom, étant autorifé par la loi & par le confentement de tous les citoiens. La vûe du Légiflateur, en le permettant, avoit été d'infpirer aux jeunes Lacédémoniens, deftinés tous à la guerre, plus de hardieffe & de fineffe, de les accoutumer de bonne heure à la vie de foldat, & de leur apprendre à vivre de peu, & à pour

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