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ter les efprits, & rendre les hommes fouples & foumis aux loix, comme les chevaux que l'on forme & que l'on dreffe dès leurs plus tendres années. C'eft pour cela qu'Agéfilas confeilla à Xénophon de faire venir fes enfans à Sparte, afin qu'ils y appriffent la plus belle & la plus grande de toutes les sciences, qui eft celle de commander & d'obéir.

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5.

Respect pour

Plut.in La

con. Inftitut.

37.

UNE des leçons qu'on inculquoit le plus fouvent & le plus fortement aux les vieillards. jeunes Lacédémoniens, étoit d'avoir un grand refpect pour les vieillards,pag. & de leur en donner des marques en toute occafion, en les faluant, en leur cédant le pas dans les rues, en fe levant par honneur devant eux dans les compagnies & dans les affemblées publiques, mais fur-tout en recevant avec docilité & foumiffion leurs avis, & même leurs réprimandes. On reconnoiffoit à ce caractére un Lacédémonien., En ufer autrement, ç'eût été fe dégrader foi-même, & faire injure à fa patrie. Un vieillard d'Athénes entrant dans le théatre pour affifter aux fpectacles, aucun de fes compatriotes ne lui offrit de place. Dès qu'il appro

2 Μαθηταίς αυτών άρχεσθαι καὶ ἄρχειν.

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1. Sur le choix

des enfans qui

devoient être élevés on ex posés.

cha de l'endroit où étoient affis les Ambaffadeurs de Lacédémone avec leur fuite, tous se levérent devant-le vieillard, & le placérent au milieu d'eux. a Lyfandre avoit donc raifon de dire que la vieilleffe n'avoit nulle part de domicile fi honorable que dans la ville de Sparte, & qu'il étoit beau d'y vieillir.

2. Chofes blämables dans les Loix de Lycurgue.

POUR mieux faire fentir le foible des loix de Lycurgue, je n'aurois qu'à les comparer à celles de Moyfe, qu'on reconnoît bien avoir été dictées par une fageffe plus qu'humaine. Mais mon deffein n'eft pas d'entrer ici.dans un détail exact de tout ce qui pourroit être blâmé dans les ordonnances de Lycurgue: je me contenterai de quelques légères réfléxions, que le Lecteur fans doute, juftement bleffé & révolté par le fimple récit de quelques-unes de ces ordonnances, aura déja faites avant moi.

EN EFFET, pour commencer

par

le

a Lyfandrum Lacedæ- | lium fenectutis. Cic. de monium dicere aiunt fo- Senect. n. 63. Ey Azxilitum: Lacedæmone effe

honeftiffimum domici

aun nisa mião. Plut, in Moral p. 795.

choix

choix des enfans qui devoient être élevés ou expofés, qui ne feroit choqué de l'injufte & barbare coutume de prononcer un arrêt de mort contre ceux des enfans qui avoient le malheur de naître avec une complé xion trop foible & trop délicate pour pouvoir foutenir les fatigues & les exercices auxquels la République deftinoit tous fes Sujets ? Eft-il donc impoffible, & cela eft-il fans exemple, que des enfans, foibles d'abord & délicats, fe fortifient dans la fuite de l'âge, & deviennent même trèsrobuftes? Quand cela feroit, n'efton en état de fervir fa patrie que par les forces du corps? & compte-t-on pour rien la fageffe, la prudence, le confeil, la générofité, le courage, la grandeur d'ame, en un mot toutes les qualités qui dépendent de l'efprit? Omnino illud honeftum, quod ex animo excelfo magnificoque quærimus ̧offic. n. 79. animi efficitur non corporis viribus. Ly-1bid. n. 76. curgue lui-même a-t-il rendu moins de fervice & fait moins d'honneur à Sparte par l'établiffement de fes loix, que les plus grands Capitaines par leurs victoires? Agéfilas étoit d'une taille fi petite, & d'une mine fi peu

Tome II.

A a

Cic. lib. 1.

2.

Soin un'

avantageufe, qu'à fa premiére vûe les Egyptiens ne purent s'empécher de rire: & cependant il avoit fait trembler le grand Roi de Perse jusques dans le fond de fon palais.

MAIS, ce qui eft bien plus fort que tout ce que je viens de raporter, un autre a-t-il quelque droit fur la vie des hommes, que celui de qui ils l'ont reçue, c'est-à-dire que Dieu même; & un Légiflateur n'ufurpet-il pas visiblement fon autorité quand indépendamment de lui il s'arroge un tel pouvoir? Cette or donnance du Décalogue, qui n'étoit autre chofe que le renouvellement de la loi naturelle, Tu ne tueras point, condanne généralement tous ceux des anciens qui croioient avoir droit de vie & de mort fur leurs efclaves, & même fur leurs enfans.

LE GRAND défaut des loix de Ly que des corps. curgue, comme Platon & Ariftote l'ont remarqué, c'eft qu'elles ne tendoient qu'à former un peuple de soldats. Ce Légiflateur paroît en tout occupé du foin de fortifier les corps, nullement de celui de cultiver les efprits. Pourquoi bannir de sa République tous les arts & toutes les fcien

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çes, dont un des fruits le plus avan tageux eft d'adoucir les mœurs, de polir l'efprit, de perfectionner le cœur, & d'infpirer des maniéres douces, civiles, honnêtes, propres en un mot à entretenir la focieté, & à rendre le commerce de la vie agréable? De là vient que le caractére des Lacédémoniens avoit quelque chofe de dur, d'austére, & fouvent même de féroce: défaut, qui venoit en partie de leur éducation, & qui aliéna d'eux l'efprit de tous les alliés.

gard des en

CETOIT une excellente pratique 3. Cruauté à Sparte d'accoutumer de bonne heu-barbare à l'ére les jeunes gens à fouffrir le chaud, fans. le froid, la faim, la foif; & d'affu jettir par différens exercices durs & pénibles le corps à la raifon, à la quelle il doit fervir de miniftre pour exécuter les ordres, ce qu'il ne peut faire, s'il n'eft en état de fupporter toutes fortes de fatigues. Mais faloitil porter cette épreuve jufqu'au trai, tement inhumain dont nous avons parlé & n'étoit-ce pas une brutalité

a Omues artes, quibus ætas puerilis ad humanitatem informari folet. Pro Arch. n. 4.

b Exercendum corpus,

& ica afficiendum eft, ut
obedire confilio rationi-
que poffit in exequendis
negotiis & labore tole-
rande. Lib. 1. de off.n. 79.

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